Informations Juridiques

Quid du partage de la valeur dans les PME ?

Droit social. L’Assemblée Nationale a adopté le projet de loi sur le partage de la valeur avec plusieurs modifications par rapport à l’accord des partenaires sociaux, notamment sur la date d’entrée en vigueur du dispositif concernant les PME, avancée à 2024.

Lecture 7 min
Graphique montrant une croissance
(Crédit : Pixabay)

Le projet de loi transposant l’accord national interprofessionnel sur le partage de la valeur (Ani du 10 février 2023) a été adopté en première lecture par l’Assemblée nationale. Pour les entreprises de 11 à 50 salariés, son intérêt principal est de rendre obligatoire la mise en place d’un dispositif de partage de la valeur en faveur des salariés (prime « Macron », participation, intéressement, plan d’épargne salariale, abondement à un plan d’épargne entreprise ou à un plan d‘épargne retraite). La mesure ne s’applique qu’aux entreprises constituées sous forme de société. Les entreprises individuelles ne sont pas concernées ni celles déjà couvertes par un dispositif de partage.

L’Assemblée nationale a avancé d’un an la date de cette obligation qui s’appliquerait ainsi dès les exercices ouverts à partir du 1er janvier 2024. D’ici là, les branches professionnelles devront ouvrir des négociations pour définir des accords de partage de la valeur pouvant être adoptés par les entreprises.

Le projet de loi vise à améliorer le pouvoir d’achat des salariés du secteur privé. L’ensemble des mesures a un caractère expérimental pour une période de cinq ans. En 2020, les dispositifs de partage de la valeur dans les entreprises de plus de dix salariés ont représenté 19 Mds€ par an, soit en moyenne 2 440 € par salarié. Dans les entreprises de dix à quaranteneuf salariés seuls 6 % des salariés en bénéficient (3 % dans les entreprises de moins de neuf salariés).

La prime exceptionnelle de pouvoir d’achat de 2022 a, quant à elle, bénéficié à 5,5 millions de salariés pour près de 4,4Mds€. Les dispositifs de partage de la valeur présentent pour l’entreprise l’avantage d’une exonération de charges sociales.

De leur côté, les salariés bénéficient d’une augmentation de leur rémunération, mais sans garantie de pérennité, exonérée de cotisations sociales, mais sans prise en compte pour les droits à la retraite.

Bénéfice au moins égal à 1 % du chiffres d’affaires

Dans les sociétés de 11 à moins de 50 salariés, l’obligation de mettre en place un dispositif de partage concernera les entreprises dont le bénéfice net fiscal est au moins égal à 1% du chiffre d’affaires pendant trois exercices consécutifs. Compte tenu de sa date d’entrée en vigueur, la mesure s’appliquera aux exercices ouverts à partir du 1er janvier 2024, en tenant compte du bénéfice et du chiffre d’affaires des trois exercices précédents, soit pour la première fois, les exercices 2021, 2022 et 2023.

En matière de participation aux résultats, la réserve spéciale de participation doit être recalculée en cas de rectification du bénéfice suite à une vérification fiscale, afin de permettre aux salariés de bénéficier d’une éventuelle revalorisation. Il s’agit aussi de dissuader les manoeuvres frauduleuses ou des stratégies d’optimisation. Cette disposition, jusqu’à présent d’ordre réglementaire sera inscrite dans la loi.

Participation aux résultats

La participation aux résultats concerne environ 18millions de salariés pour un montant de quelque 10 Mds€ par an, versée sous forme de prime ou de placement en épargne, indisponible pendant cinq ans.

Obligatoire dans les entreprises d’au moins 50 salariés, la participation peut également être mise en place par accord dans les autres entreprises. Le montant de la réserve de participation à distribuer aux salariés est calculé selon une formule définie légalement. Le projet de loi prévoit, pour les entreprises de moins de 50 salariés, la possibilité de recourir à une formule de calcul dérogatoire à la formule légale, moins ou plus favorable (pourcentage du bénéfice net fiscal ou du résultat comptable avant impôt, par exemple).

Contrairement à l’accord interprofessionnel, l’Assemblée nationale a exclu qu’une formule dérogatoire puisse être décidée unilatéralement par l’employeur, limitant cette possibilité aux accords d’entreprise ou de branche, conformément au droit commun. Quelle que soit la formule utilisée, le montant de la prime de participation ne peut pas dépasser 32 994 € en 2023 (75% du plafond annuel de la sécurité sociale).

Formule légale de calcul de la participation

La formule légale de calcul de la réserve de participation est malaisée à appréhender. De nature comptable, elle prend en compte le bénéfice fiscal net, le montant des capitaux propres, le montant des salaires et la valeur ajoutée : (1/2 x [bénéfice net – 5% des capitaux propres]) x (salaires/valeur ajoutée) Bénéfice net diminué d’une partie des capitaux propres. Les capitaux propres correspondent aux sommes investies par les associés ou actionnaires, étant entendu qu’une distribution de dividende vient les réduire.

À l’inverse, une augmentation de capital conduit à baisser le montant de la participation. Diminuer le bénéfice des capitaux propres vise à éviter que les salariés ne bénéficient d’une participation trop importante par rapport aux fonds propres dont dispose l’entreprise pour financer ses activités, au risque de compromettre sa pérennité.

Exemple
Bénéfice 150 000 €
Capitaux propres 100 000 €
Salaires 400 000 €
Valeur ajoutée 600 000 €

Le pourcentage de 5 % est censé correspondre à la rémunération du capital. Un résultat positif nécessite donc un bénéfice supérieur à 5 % des capitaux propres. Ratio salaires/valeur ajoutée. Le ratio salaires/valeur ajoutée mesure la part de la rémunération des salariés dans la richesse créée par l’entreprise. Un ratio élevé signale que les salariés perçoivent une part importante de la richesse créée (secteurs à forte valeur ajoutée tels l’industrie ou les services), une valeur faible une part moins importante (commerces, agriculture).

Prime de pouvoir d’achat

La prime de pouvoir d’achat (ou prime « Macron ») deviendrait une des modalités du partage obligatoire de la valeur dans les entreprises de 11 à 50 salariés. www.assembleenationale.fr/dyn/16/dossiers/partage_valeur_accord