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Genoskin : la biotech toulousaine poursuit son aventure américaine et vise les 7 M€ de CA en 2024

Biotechnologies. Pionnier de la production et de la commercialisation de kits standardisés prêts à l’emploi de modèles de peau humaine ex vivo pour l’industrie cosmétique, la chimie, la pharmacie et la recherche, le toulousain Genoskin connaît une réussite discrète. Pourtant son succès, et son implantation réussie aux États-Unis, auraient de quoi inspirer nombre de start-up et PME françaises.

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Photo de l'activité de Genoskin
Fondée en 2011 par Pascal Descargues, la société toulousaine a ouvert en 2018 une entité à Boston pour se rapprocher de ses clients américains. Le bureau compte aujourd’hui 12 salariés, et bientôt 16 d’ici la fin de l’année 2024. (©Genoskin)

Chaque année, le célèbre quotidien économique et financier britannique le Financial Times publie la liste des 1 000 entreprises européennes à la plus forte croissance. En 2022, la société toulousaine Genoskin avait fait une entrée fracassante dans ce classement en se hissant à la 531e place grâce à un taux de croissance de 300% entre 2017 et 2020. Elle avait même réalisé l’exploit de faire partie du Top 5 dans la catégorie des produits chimiques et pharmaceutiques.

Une (belle) surprise qui n’en est, en réalité, pas vraiment une. Méconnue du grand public, la medtech fondée en 2011 par Pascal Descargues s’est en effet imposée en à peine quelques années comme une figure majeure du secteur de la santé, et plus précisément des biotechnologies. Comment ? En proposant aux laboratoires et industriels des secteurs de la pharmacie, de la chimie et de la cosmétique des modèles de peau humaine pour tester l’innocuité de leurs produits (crème, vaccin…) lors d’essais précliniques.

Développement d’une activité de service

Récupérés auprès des hôpitaux et cliniques, ces restes de peau issus d’opérations de chirurgie esthétique sont conditionnés et transformés en kits prêts à l’emploi. Véritable alternative aux tests sur les animaux, ce procédé révolutionnaire ne se veut pas seulement éthique, il est aussi plus efficient affirme Frédérick Roques, directeur financier de Genoskin :

Nous avons mis au point une technologie innovante qui permet de maintenir les tissus vivants en vie et surtout fonctionnels pendant plus d’une semaine. Contrairement à une peau de synthèse qui est neutre, cette peau conserve tout le passé immunologique et les caractéristiques du patient. Cela permet à nos clients d’obtenir des données plus précises et donc plus pertinentes. »

Installée au sein du Centre Pierre Potier, sur le site de l’Oncopole, la spin-off de l’université Paul Sabatier et du CNRS a déjà investi plus de 12 M€ pour accélérer son développement et rester compétitive. Elle commercialise désormais sur Internet six modèles de peau, variations de leur premier modèle NativeSkin. Parmi eux : l’HypoSkin, qui offre actuellement l’alternative la plus proche à l’injection directe d’un composé sous la couche cutanée et FlowSkin, un modèle de peau humaine perfusée ex-vivo.

Désireuse d’étendre ses domaines d’activités et de profiter d’un marché plus vaste, l’entreprise toulousaine a amorcé il y a quelques années un virage stratégique. Au départ exclusivement portés sur la vente de ces modules de peau, « nous avons commencé à réaliser des tests ainsi que des études en interne, au sein de notre laboratoire, pour sécuriser le développement de médicaments pour l’industrie pharmaceutique et biotechnologique, indique Frédérick Roques. Aujourd’hui, cette partie de sous-traitance représente 70% de notre chiffre d’affaires, contre 30% pour l’activité de négoce. »

Implantation réussie aux États-Unis

Photo des kits contenant des biopsies de peau humaine
Les kits contiennent des biopsies de peau humaine, produits à partir de dons d’échantillons de peau issus de chirurgie plastique, et restant fonctionnelle et vivante grâce à l’utilisation d’une matrice biologique nourricière. (©Genoskin)

Bien qu’attachée à Toulouse – où elle conserve son siège social et son centre d’excellence de R&D – Genoskin a ouvert en 2018 une entité à Salem, près de Boston, dans le Massachusetts. Objectif pour Pascal Descargues, qui s’est installé là-bas avec sa famille : réussir à pénétrer durablement le marché pharmaceutique américain. Pari gagnant.

En pleine croissance, le laboratoire compte aujourd’hui 16 salariés et annonce vouloir recruter quatre nouveaux collaborateurs en 2024 pour renforcer son activité commerciale. « Cette implantation dans la Mecque de la biotechnologie nous a permis de nous libérer de certaines contraintes logistiques, notamment douanières. Nos modules ayant entre sept et dix jours de vie, le timing est un enjeu crucial », détaille Frédérick Roques, qui rappelle que la société a toujours réalisé la majeure partie de son activité à l’étranger (80%), pour l’essentiel aux États-Unis et en Europe, la faute à un marché hexagonal moins dynamique (5%).

Fort aujourd’hui de savoir-faire uniques et d’une quarantaine de salariés (majoritairement des chercheurs) répartie entre ses deux sites, Genoskin a généré un chiffre d’affaires de 5,8 M€ en 2023, contre 4,2 M€ en 2021.

« Suite à l’annonce de l’Agence de régulation et de contrôle américaine (FDA) de supprimer l’obligation de recourir à l’expérimentation sur les animaux dans le cadre du développement de produits pharmaceutiques, nous prévoyons une montée en charge significative de notre activité, annonce le directeur financier de la medtech toulousaine. Cette montée en puissance s’accompagne d’une stratégie marketing renforcée et adaptée pour développer notre portefeuille clients. » Objectif ? Atteindre les 7 M€ de CA en 2024.