Olivier et Patrick Bacquié
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Olivier et Patrick Bacquié

Maison Bacquié : quatre générations de commerçants.

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Photo d'Olivier et Patrick Bacquié
Olivier et Patrick Bacquié sont les arrière-petits-fils de Jules Bacquié, le fondateur de l’épicerie emblématique du quartier Victor Hugo, à Toulouse. (Crédit : DR)

Chez les Bacquié, on est épicier de père en fils depuis 1896. Originaire du Lauragais, Jules Bacquié, l’arrière-grand-père d’Olivier et de Patrick Bacquié, faisait déjà du commerce grâce au Canal du Midi. À cette époque, le café comme l’huile arrivaient par péniche jusqu’au centre de Toulouse. « Il y avait beaucoup d’épiceries autour de la place Victor Hugo, toutes torréfiaient le café à l’époque. Nous sommes les derniers des Mohicans, les seuls à être restés », explique Olivier Bacquié.

Âgé de 65 ans, l’intéressé a démarré sa carrière dans le commerce à l’âge de 19 ans. « Mon père Jacques, qui a repris la boutique, a connu la révolution des supérettes avec l’arrivée des supermarchés. Mais vous savez, travailler dans le commerce, c’est apprendre à s’adapter aux situations de crise, aux évolutions des modes de consommation des clients et proposer de nouveaux produits. »

Une histoire de transmission

Alors accessible facilement en voiture, la Maison Bacquié était à l’origine une épicerie au sens strict du terme. Autrement dit, les clients venaient y faire leurs courses, acheter des produits lourds, parfois volumineux. Depuis tout a changé et l’enseigne est devenue une épicerie fine et une cave à vins vendant une sélection de produits alimentaires et spiritueux d’exception : truffe, foie gras, caviar, saumon fumé, confitures, miels, gâteaux et madeleines, terrines, épices, whisky, armagnac, champagne…

Olivier Bacquié s’est également lancé dans la vente de thés et d’accessoires en ouvrant une seconde boutique rue Boulbonne. Toutefois, la vente de café assure encore aujourd’hui la majeure partie du chiffre d’affaires de l’entreprise. Conscients de l’essor du e-commerce, les deux chefs d’entreprise songent d’ailleurs fortement à développer les ventes sur internet.

« Les clients sont de plus en plus curieux et aussi connaisseurs, nous sommes donc toujours en quête de nouveautés. Nous avons eu par exemple une forte demande sur le jus de gingembre et après quelques recherches, nous avons réussi à dénicher le bon producteur pour commercialiser ce produit dans la boutique », raconte Olivier Bacquié qui adore aller à la pêche aux informations. « Quand je vais voir mes filles à Paris, je passe un temps fou au Bon marché. Pour moi, c’est le meilleur catalogue au monde ! »

(©Maison Bacquié)

Des défenseurs du bien manger

Malgré une concurrence exacerbée, notamment en plein centre-ville, les boutiques des Cafés Bacquié restent encore aujourd’hui une institution à Toulouse. L’épicerie fournit d’ailleurs de nombreux cafés et restaurants. Depuis l’incendie du torréfacteur en décembre 2019, autrement dit en pleine période de Noël, les grains de café sont torréfiés au Havre, chez leur principal importateur.

« Pour des raisons techniques, nous n’assurons plus pour le moment la cuisson des grains mais nous continuons à faire nos propres mélanges, c’est notre marque de fabrique. Cela nous permet de conserver l’odeur si particulière du café et c’est très important car les clients y sont très attachés. Ça fait vraiment partie du folklore de la boutique de Victor Hugo et d’ailleurs, d’ici l’été nous allons reprendre la torréfaction sur site, se réjouit l’ainé de la fratrie. Les travaux sont presque terminés. Ils nous restent à refaire deux cheminées avec l’accord des architectes des bâtiments de France. »

Une bonne nouvelle à l’heure où le café en grains fait un retour magistral sur le marché avec des consommateurs de plus en plus soucieux de la qualité des produits qu’ils consomment. « La démocratisation des dosettes et capsules individuelles a fortement impacté notre activité, mais nous avons réussi à garder le cap et rebondir. »

« Le comptoir c’est la meilleure école »

Olivier Bacquié aurait aimé être commissaire-priseur, mais son père en a décidé autrement, lui demandant de reprendre la boutique juste après son baccalauréat. « Le terrain, c’est la meilleure des formations. Ici, on travaille encore à l’ancienne. Mon frère et moi sommes présents à la boutique tous les jours. Il faut que les clients nous voient. Nous connaissons d’ailleurs les histoires de chacun ou presque », confie le chef d’entreprise qui loue l’ambiance familiale qui règne dans les boutiques Bacquié : « Nous adorons jouer la comédie façon Pagnol avec les clients et nos collaborateurs. »

Et même s’il est encore trop tôt pour parler de la succession, Olivier Bacquié nourrie secrètement le désir de voir une de ses deux filles ou une de ses deux nièces reprendre le flambeau. Ce serait alors la cinquième génération de torréfacteurs !