Malus horribilis
Législation. À partir du 1er mars, presque toutes les voitures thermiques passeront par la case malus. Jusqu à 70 000€. Gros coup de rabot pour les aides fiscales à l’achat des voitures électriques.
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Entre gouvernement démis et projet de budget censuré, on ne savait plus très bien où on en était en matière de malus écologique. La seule chose qu’on avait intégrée était la disparition pure et simple de certaines aides et la baisse significative du bonus accordé aux véhicules 100% électriques, désormais corrélé au revenu fiscal des acheteurs. Pour bénéficier de la prime maximum de 4000€, il convient désormais d’avoir un revenu fiscal de référence ne dépassant 16 300€. Autrement dit, être dans une situation financière ne permettant pas d’acheter une voiture électrique neuve. Constat peu ou prou identique pour l’aide de 3 000€, imposant de déclarer moins de 26 200€. Les autres auront droit à un bonus divisé par deux et réduit à 2000€. Une prime riquiqui à placer en regard des tarifs des modèles électriques qui, hormis quelques citadines, restent à des niveaux élevés les réservant à des clients aisés. Et comme si c’était encore trop facile de décrocher la prime, il convient de respecter d’autres critères : un poids inférieur à 2,4t pour 2025, un prix de vente de 47 000€ maxi, sans oublier le score environnemental excluant, en particulier, les voitures assemblées en Chine. Ces conditions risquent de s’aggraver dès 2026, en particulier celle liée au poids.
Comme si, au-delà des discours creux, on voulait inciter les clients à se détourner des 100% électriques... Du coté des voitures thermiques : c’est le malus quasi assuré. Et ce dès le 1er mars. Avec un maximum fixé provisoirement à 70 000€ pour les modèles émettant plus de 189g/km de CO2. Cette majoration annuelle de 10 000€ se poursuivra en 2026 et 2027 pour atteindre 90 000€. Cela ne concerne que quelques milliers de voitures immatriculées en France. D’ores et déjà, une bonne part des acheteurs concernés contournent l’obstacle de diverses façons.
Les Clio et 208 de base touchées par le malus
Pour le commun des mortels, la potion est à peine moins amère. Dès le 1er mars, le seuil d’exemption passera de 118 à 113g/km d’émissions de CO2. Une baisse de cinq grammes qui se poursuivra l’année prochaine et en 2027 pour arriver à 103g/km. Un niveau sous lequel les voitures à moteur thermiques sont plutôt rares. Dès cette année, les modèles échappant à la taxation seront peu nombreux. Les petites voitures populaires qui constituent la structure du marché national seront touchées. Ce sera le cas des trois meilleures ventes de 2024. La Renault Clio de base équipée du TCe 90ch ECO2, un moteur modeste s’il en est, sera concernée par le malus 2025. De même, la Peugeot 208 thermique motorisée par le bloc PureTech essence de 100ch, qui émet 118g passera à la caisse dès le printemps.
Le « Journal de l’Automobile » a calculé que la proportion des Peugeot 208 touchées par l’élargissement de la taxe passerait de 13 à 44%. Exemple encore plus caricatural : la Dacia Sandero, la voiture la moins chère de sa catégorie, 3e meilleure vente en France en 2024 et n°1 auprès des clients particuliers. 88% d’entre elles seront affectées d’un malus. Comme si l’addition n’était pas encore assez indigeste, il faudra y ajouter l’an prochain l’abaissement du poids au-delà duquel sera appliqué un malus supplémentaire, frappant les véhicules jugés trop lourds. Jusqu’à présent, les modèles se situant sous la barre des 1600 kg en étaient exemptés. Le premier janvier prochain, le seuil sera fixé à 1500 kg avec une taxe de 10€ par kg supplémentaire jusqu’à 1600 kg. De quoi faire encore grimper davantage l’addition et concerner de très nombreux modèles familiaux. Les 100% électriques devraient également être touchés. Et comme le poids conséquent de leurs batteries entraine une inévitable surcharge pondérale se chiffrant en centaines de kilos, cela risque de faire mal au portefeuille. Vouloir que les français passent à l’électrique tout en réduisant fortement le bonus et en instaurant un malus au poids est pour le moins paradoxal...
Cerise sur ce gâteau : les régions ont voté l’augmentation du prix des « cartes grises » pour la porter dans de nombreux cas à 60€ par cheval fiscal, tout près du seuil maximum de 65€. On voudrait dissuader les français d’acheter des voitures neuves qu’on ne s’y prendrait pas autrement. Si le marché poursuit sa descente aux enfers mois après mois, il ne faudra pas jouer les étonnés.