Voiture électrique : scepticisme et attentisme
Étude. Une étude commandée par La Plate-Forme Automobile, qui réunit l’ensemble des acteurs de la filière, met en évidence les réticences de deux-tiers des français vis à vis du tout électrique.
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Pour l’Europe et le nouveau commissaire français, Stéphane Séjourné, aucun doute n’est permis : l’avenir de la voiture sera électrique ou ne sera pas. Circulez, il n’y a rien à voir. Même alignement coté Etat : c’est le tout électrique ou rien. Une position rigide éloignée, c’est un euphémisme, des constats faits par les professionnels du secteur et de ceux qui, in fine, ont les clés de la décision : les clients. Pour le moment, une large majorité d’acheteurs potentiels est sur la réserve. C’est ce qui ressort d’une étude, réalisée à l’initiative de La Plate-Forme Automobile, dirigée par Luc Chatel, l’ancien ministre de Nicolas Sarkozy.
À tout juste dix ans de l’abandon définitif des moteurs thermiques, les Français sont pour le moins dubitatifs sur l’efficacité de la transition énergétique pour lutter efficacement sur le réchauffement climatique. Seulement 43% des personnes interrogées par l’Institut CSA estiment que la voiture électrique constitue une réponse satisfaisante. Ce qui signifie que plus de la moitié des Français n’y croient pas !
Selon l’étude de La Plate-Forme Automobile, près de 70% estiment que l’arrêt de la production des voitures thermiques aura des effets négatifs pour l’industrie automobile nationale et pour les consommateurs. Inutile de leur faire le coup de « la pédagogie », vieille ficelle effilochée qu’on ressort à chaque problème : 78% ont très bien compris les tenants et les aboutissants des nouvelles règles.
De façon globale, près de la moitié des français (48%) exprime une défiance certaine vis à vis de la voiture électrique. L’Institut CSA a classé les Français interrogés en cinq grandes catégories. Aux deux extrémités, on retrouve d’un côté les « électro-allergiques », 11% manifestant un rejet résolu pour les véhicules à batterie et de l’autre les « électro-enthousiastes », 16% affichant une opinion positive vis à vis des 100% électriques. Au total, ils représentent un gros quart des français.
Des Doutes Et Peu De Certitudes
Plus d’un tiers (37%) des sondés se retrouve dans le camp des « électro-sceptiques ». C’est le groupe principal. Ils sont, dixit l’institut CSA « attachés à leur voiture et à la liberté qui s’y attache ». Pour eux, « la voiture électrique n’a pas de perspective viable et l’enjeu serait de concevoir des véhicules thermiques moins polluants ». La deuxième catégorie en pourcentage (25%) est celle est « électro-prudents ». Pas opposé à la voiture électrique sur le principe, ils préfèrent toutefois attendre avant de franchir le pas. Des prix de vente plus bas ? Des points de recharge en nombre suffisant ? Une autonomie plus importante ? Avec deux attentistes sur trois : inverser la tendance ne sera pas une chose aisée. Enfin, les « détachés du volant » (11%) ne se sentent pas concernés par le sujet. Sans doute des habitants des métropoles disposant de solutions alternatives à la voiture.
Elément inquiétant pour l’industrie automobile nationale, contrainte et forcée à l’électrification massive : par rapport à une étude de 2019, réalisée par l’Observatoire de l’automobile Cetelem, l’opinion des Français sur la voiture électrique a évolué négativement en cinq ans. Cela se traduit par des chiffres d’immatriculations qui marquent le pas malgré une offre de plus en plus abondante qui aurait dû entraîner mécaniquement une poussée des ventes au lieu d’une part de marché stagnante.
En 2030, les normes européennes CAFE (Corporate Average Fuel Economy) de limitations des émissions de CO2 ne pourront être respectées qu’à la seule condition d’immatriculer au moins 50% de voitures neuves exclusivement électriques sur le marché français. En 2024, le seuil des 17% n’a pas été atteint et le ralentissement de la progression rend cet objectif irréaliste. D’autant que dans le même temps, l’Etat ne cesse de réduire les incitations fiscales pour accompagner la transition énergétique. Dès que ce soutien artificiel mais indispensable fléchit ou s’arrête, la courbe des ventes plonge. On l’a vu en Allemagne notamment où le marché électrique s’est effondré. On commence à le constater en France. Confirmation : 77% des sondés affirment que sans aides, ils renonceront à opter pour un modèle électrique.
Comment convaincre la masse des « électro-sceptiques » et les « électro-prudents » ? Impossible de contraindre les français à acheter des voitures trop chères ne répondant pas à leurs besoins. On en est là avec plus de questions que de réponses.