Collectivités

A69 : la justice confirme la légalité du projet, sans clore le combat judiciaire

Annonce. En invalidant le jugement du tribunal administratif, la cour administrative d’appel de Toulouse confirme la poursuite du projet d’autoroute A69 entre Toulouse et Castres. Une décision saluée par le ministre des Transports et les promoteurs du projet, mais dénoncée par ses opposants qui annoncent déjà leur volonté de saisir le Conseil d’État en urgence.

Lecture 7 min
Le chantier de l’A69 entre Castres et Toulouse comprend notamment la construction d’un échangeur à Soual. (©Atosca)

Nouvel épisode dans un feuilleton judiciaire qui dure depuis plus de dix ans. La cour administrative d’appel de Toulouse a tranché, ce mardi 30 décembre, en faveur de la poursuite des travaux de l’autoroute A69 entre Toulouse et Castres, invalidant la décision rendue le 27 février 2025 par le tribunal administratif de Toulouse. Ce dernier avait annulé les autorisations environnementales délivrées en mars 2023 par les préfets de la Haute-Garonne et du Tarn, provoquant l’arrêt temporaire du chantier.

Le projet, évalué à près de 460 M€ (chiffrage 2015), se décompose en deux volets. Il prévoit d’abord la mise à 2x2 voies de l’A680 existante, sur près de 8 km, ainsi que la création d’un échangeur à Verfeil, une section déjà concédée à Vinci Autoroute. À partir de là, une section nouvelle de 53 km sous 2x2 voies doit relier Castres via Puylaurens et Soual, sous concession Atosca.

Un premier tournant était intervenu le 28 mai, lorsque la cour administrative d’appel avait prononcé le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif, estimant « sérieux l’argument en faveur de l’existence d’une raison impérative d’intérêt public majeur ». Une condition juridique permettant de déroger au principe de protection des espèces et des habitats menacés, et qui avait autorisé la reprise des travaux.

Pas d’alternative satisfaisante

Lors de l’audience du 11 décembre, le rapporteur public avait d’ailleurs rendu des conclusions favorables au projet, insistant sur son rôle structurant pour le développement local. Un désenclavement largement soutenu sur le terrain par les élus et une partie de la population, qui voient dans cette liaison autoroutière un moyen de renforcer l’attractivité du territoire et de le connecter plus efficacement à Toulouse, désormais troisième ville de France et moteur économique régional.

Les magistrats ont suivi son argumentaire. Dans sa décision du 30 décembre, la cour estime que le projet répond bien en effet à une raison impérative d’intérêt public majeur, car il doit permettre de relier « dans de meilleures conditions le bassin de vie de Castres-Mazamet, qui compte plus de 130 000 habitants, à la métropole toulousaine ». Elle considère également qu’« il n’existait pas de solution alternative satisfaisante » à la création d’un nouveau tronçon autoroutier, et précise qu’il n’est pas nécessaire que le territoire concerné soit en situation critique d’enclavement pour justifier un tel projet.

Sur le volet environnemental, au cœur du contentieux, la juridiction de second degré tranche également en faveur des porteurs du projet, jugeant que « le maintien des espèces protégées n’était pas menacé », grâce à des mesures compensatoires jugées efficaces, notamment pour la reconstitution des zones humides impactées.

Une mise en service prévue à l’automne 2026

La décision a été immédiatement saluée par Philippe Tabarot, ministre des Transports, qui a rappelé l’importance stratégique de cette infrastructure. Selon lui, l’A69 doit offrir « une accessibilité autoroutière répondant aux besoins de mobilité quotidienne de la population et de desserte de l’économie locale », tout en améliorant la sécurité routière et en réduisant certaines nuisances pour les riverains. Le jugement permettrait ainsi d’envisager une mise en service à l’horizon d’octobre 2026.

Du côté des opposants, si la décision était prévisible, elle n’en est pas moins « incompréhensible et décevante ». Tous continuent de dénoncer un projet « inutile, coûteux et néfaste pour l’environnement », pour un gain de temps limité - environ vingt minutes - et un péage estimé entre 6 et 8 € par trajet. « Une décision qui valide un projet fondé sur des principes économiques et sociaux des années 80 », fustige Gilles Garric, membre du collectif La Voie est libre, estimant que la cour d’appel n’a pas procédé à une analyse de fond comparable à celle menée par le tribunal administratif.

De nouveaux retards à prévoir ?

La bataille est d’autant plus loin d’être terminée que le chantier connaît de nouvelles turbulences. Le 18 décembre dernier, le parquet de Toulouse a en effet requis la suspension des travaux sur une quarantaine de sites tout au long du chantier, où des dépassements d’emprises par le concessionnaire Atosca ont été observés. Les opposants évoquent jusqu’à 50 hectares d’emprises illégales. La justice doit se prononcer sur ce point le 12 janvier prochain.

Déterminé, le collectif annonce vouloir saisir le Conseil d’État pour casser le jugement de la cour d’appel. Il réfléchit également à une procédure d’urgence pour obtenir la suspension totale du chantier en attendant un jugement définitif. Parallèlement, La Voie est libre appelle à un contrôle renforcé des services de l’État et envisage de solliciter l’Inspection générale de l’Environnement et du développement durable (IGEDD) pour auditer le suivi du chantier. Si la cour d’appel a relancé officiellement l’A69, le bras de fer juridique, lui, est donc loin d’être arrivé à son terme.