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A69 : le tribunal administratif de Toulouse vient-il d’enterrer définitivement le projet ?

Aménagement. Est-ce une sortie de route définitive ? Alors que les travaux de la liaison autoroutière entre Toulouse et Castres sont bien avancés, le juge administratif a annulé hier, le 27 février, les autorisations environnementales du projet, le mettant à l’arrêt. Un coup de massue pour l’entreprise concessionnaire, les collectivités locales et l’État qui a annoncé faire appel de la décision. De leurs cotés, les opposants à ce chantier ont exprimé leur soulagement.

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L’A69 dans le secteur de Castres. (©Atosca)

Nouvel épisode dans le feuilleton “politico-écologico-juridique” du chantier de l’autoroute A69 reliant Castres à la Ville rose. Réalisé en concession et financé principalement par le péage, ce projet est mené en partenariat entre l’État, la région Occitanie, le département de la Haute‑Garonne, le département du Tarn, la communauté d’agglomération de Castres‑Mazamet et la communauté de communes Sor‑et‑Agout.

Par décision du 27 février 2025, le tribunal administratif de Toulouse a en effet annulé les autorisations environnementales (A69 et A680) de ce projet qui suscite depuis 2018 une forte opposition des mouvements écologistes. Une annonce qui n’a pas manqué de faire réagir les différents parties prenantes, à commencer par l’État et l’entreprise Atosca qui s’est vu confier la construction et l’exploitation de cette liaison autoroutière.

Un camouflet pour l’État ?

Dans un communiqué, le gouvernement, par la voix de ses ministres de l’aménagement du territoire et de la transition écologique, a indiqué « prendre acte de cette décision » et a annoncé « faire appel en demandant un sursis à exécution de la décision du tribunal administratif ». Dans l’attente, le projet est suspendu à l’exception des seules opérations de mises en sécurité du chantier, conformément aux dispositions du code de l’environnement.

De son côté Martial Gerlinger, directeur général d’Atosca, déplore lui aussi cette décision qui met un coup d’arrêt à un projet dont l’utilité publique a pourtant été reconnue par décret en 2018, confirmée par le Conseil d’État ainsi que par la représentation nationale en 2019 dans la loi d’orientation des mobilités. Pour rappel, les travaux ont démarré en mars 2023 à la suite de l’obtention de l’ensemble des autorisations prescrites par la réglementation et, jusqu’à ce jour, confirmées par toutes les décisions de justice, soit six décisions favorables. « C’est globalement 300 M€, soit les deux tiers du coût de la construction, qui ont été engagés sur le chantier jusqu’à présent », rappelle aussi l’État.

L’attractivité du territoire est-elle menacée ?

Preuve de l’importance de ce projet pour le tissu économique régional, le président de la CCI Occitanie Jean-François Rezeau, a lui aussi pris la parole pour exprimer son inquiétude quant aux répercussions d’une telle décision sur l’attractivité du territoire. « Il ne s’agit pas simplement d’un projet d’infrastructure mis en pause : cette suspension envoie un signal préoccupant sur notre capacité à mener à bien les projets structurants nécessaires à l’aménagement du territoire et au développement économique », alerte-t-il d’autant plus que selon lui, elle « s’inscrit dans une tendance préoccupante où chaque grand projet d’infrastructure en France devient un champ de bataille juridique et politique ».

Jean-François Rezeau craint dès lors de voir la ligne à grande vitesse Bordeaux-Toulouse subir le même sort. « Comment dans ces conditions », interroge-t-il, « attirer investisseurs et entrepreneurs sur nos territoires ? » Une inquiétude partagée par les élus locaux tarnais qui ont vivement réagi sur leurs réseaux sociaux. Petit florilège :

Une victoire historique ?

À l’opposé, les associations de défense de l’environnement, le parti écologiste ou encore les Insoumis de Jean-Luc Mélenchon n’ont pas tardé à célébrer cette décision la qualifiant de « victoire historique  ». En première ligne dans le combat l’association La Voie est libre qui dénonce depuis longtemps un « projet inutile, destructeur et irresponsable » salue ce jugement qui reprend selon elle sa conviction, à savoir que cette autoroute « ne répond à aucune raison impérative d’intérêt public majeur ».

[A69] En tant que #députée, en tant que rapporteure de la commission d’enquête #A69 mais aussi en tant que #citoyenne et habitante de #hautegaronne, je salue la décision du Tribunal administratif de #Toulouse qui remet l’Environnement à sa place : dans la loi, pour l’intérêt général. #stopa69

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— Christine Arrighi (@christinearrighi.bsky.social) 27 février 2025 à 22:03

L’association demande à l’État de ne pas faire appel pour je cite « éviter de plonger le territoire dans l’immobilisme ». Elle réclame par ailleurs la mise en place d’une instance de dialogue afin « d’identifier les besoins réels de mobilité, de modèle agricole, social et économique souhaités par les habitants et permettant de construire un projet de territoire global respectant l’intérêt général et en phase avec les enjeux d’aujourd’hui ».

Si certains crient déjà victoire, dans les faits le dossier n’est pas clos puisque l’État a affirmé son intention d’exercer toutes les voies de recours à sa disposition pour une reprise du projet « dans les meilleurs délais possibles et dans le respect de la réglementation ». Affaire à suivre...