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Financement de la défense : Carole Delga annonce une enveloppe de 200 M€

Défense. Alors que la France est entrée en « économie de guerre », Carole Delga a annoncé que l’Occitanie prendrait sa part aux côtés du gouvernement. Objectif ? Faire de la région un acteur clé du réarmement et de la souveraineté française et européenne. Parmi les mesures avancées, la création d’un Fonds dédié de 100 M€ qui sera soumis aux votes lors de l’Assemblée plénière du 13 juin 2025.

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La présidente de la Région Occitanie a annoncé la mobilisation d’une enveloppe de 200 M€ pour maintenir la compétitivité de l’industrie de la défense dans les territoires et renforcer notre capacité de défense. (©Sébastien Pouchard/Région Occitanie)

Le 24 février 2022, la Russie envahissait l’Ukraine. Trois ans plus tard, alors que le nombre de morts et de blessés ne cessent de croître, une question demeure : comment financer la défense européenne et le soutien militaire à l’Ukraine ? D’autant plus après la suspension unilatérale de l’aide américaine à Kiev décidée par Donald Trump.

C’est dans ce contexte que la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a annoncé le 4 mars dernier les contours du plan « Réarmer l’Europe » destiné à mobiliser 800 Mds€ « en dépenses d’armement », dont 150 Mds€ de prêts. Autre levier pour favoriser les investissements en faveur de la défense : l’assouplissant des règles budgétaires régissant les déficits des 27 États membres. Objectif affiché ? Créer une marge de manœuvre budgétaire de près de 650 Mds€ sur quatre ans.

Financement des PME et ETI de la BITD

En France aussi la nécessité de mettre en place une véritable « économie de guerre » se fait entendre du côté de l’Élysée. Lors d’une conférence à Bercy réunissant investisseurs et entreprises de défense, le ministre de l’Économie Éric Lombard et le ministre des Armées Sébastien Lecornu, ont d’ailleurs rappelé l’urgence de « développer et d’entretenir une Base industrielle et technologique de défense (BITD) souveraine et résiliente ».

À cet effet, ils ont détaillé leur plan d’action pour soutenir l’industrie de la défense qui compte 4 500 entreprises, dont 800 identifiées comme stratégiques et critiques, et mobilise environ 220 000 emplois directs et indirects. Des entreprises qui ont un besoin de fonds propres supplémentaires estimés selon Bercy « entre 1 Md€ et 3 Mds€ sur les cinq prochaines années ».

Parmi les leviers activés par le gouvernement : le déploiement par la Banque européenne d’investissement d’une facilité de trésorerie à destination des PME et ETI du secteur de la défense à hauteur de 1 Md€ ou encore le réabondement du Fonds Innovation Défense (FID) par des investisseurs privés et Bpifrance qui passera de 200 à 175 M€. Mais l’annonce qui a été la plus commentée ces derniers jours c’est bien le lancement prochain par Bpifrance d’un nouveau produit d’épargne ouvert aux particuliers, avec un ticket d’entrée minimum de 500 € bloqué pendant au moins cinq ans. Au total, ce fonds devrait rapporter jusqu’à 450 M€.

« Nous prendrons notre part aux côtés du Gouvernement »

C’est dans ce contexte que la présidente de la Région Occitanie, Carole Delga, a annoncé dans un communiqué daté du 25 mars son intention de débloquer avec le soutien de ses partenaires une enveloppe de 200 M€ sur la période 2025-2030 pour permettre aux entreprises de défense présente sur le territoire de monter en puissance :

En Occitanie, ce sont 430 entreprises et 25 000 salariés qui œuvrent dans l’industrie de défense. Aux côtés de grands groupes comme Airbus Defense and Space, Cegelec Defense, Thales et Safran, des pépites industrielles comme Les Forges de Tarbes (munitions), Delair (drones), Lacroix Défense (contre-mesures) et des chercheurs participent à cette dynamique. L’innovation, portée par les secteurs aéronautique et spatial, est un atout stratégique majeur au service des technologies militaires. »

Ce plan de défense, qui sera soumis aux votes lors de la prochaine Assemblée plénière prévue 13 juin 2025, compte plusieurs mesures phares toujours en cours d’élaboration. Parmi elles :

  • Un nouveau Fonds Défense et Industrie doté de 100 M€, rattaché au Fonds Souverain Régional, pour aider les entreprises de la défense mais aussi celles du civil à se positionner de façon duale en captant les nouveaux marchés et en réalisant de la R&D ou des investissements productifs ;
  • Le lancement d’un Appel à Manifestation d’Intérêt « défense, souveraineté, innovation et réindustrialisation des territoires » doté de 50 M€ pour proposer une offre d’accompagnement complète aux PME d’Occitanie se positionnant pour répondre à des besoins exprimés par la filière défense et devenir duales ;
  • Un programme spécifique en matière d’IA et de cybersécurité sur le volet défense doté de 2 M€ avec pour objectif d’accompagner 40 à 50 PME d’ici deux ans ;
  • Un Fonds de 20 M€ pour développer les compétences adaptées aux métiers de l’industrie de la défense.

Des contestations à venir ?

Pour Carole Delga, l’enjeu est clair : faire de l’Occitanie un acteur clé du réarmement et de la souveraineté au niveau français mais aussi européen. « Face aux tensions géopolitiques croissantes et à l’incertitude du soutien américain, l’Europe doit prendre en main sa souveraineté et assurer seule sa sécurité […] La France a un rôle central à jouer. Seule puissance à disposer de la dissuasion nucléaire dans l’UE et deuxième exportateur mondial d’armements, elle s’appuie sur une Base Industrielle et Technologique de Défense robuste, qu’il est impératif de soutenir et de renforcer. Il est temps d’agir ! »

Initié en février dernier par la Région Occitanie, un travail partenarial est d’ailleurs en cours avec le ministère des armées, l’Agence de l’innovation de défense, le coordinateur de la BITD en région, le cluster défense des acteurs occitans Primus (composé de 56 sociétés) et les groupements d’entreprises et pôles de compétitivité (Aerospace Valley, Galaxie, Digital 113, Aktantis, etc.).

Une prise de position et surtout un engagement financier qui interviennent quelques semaines seulement après le vote d’un budget régional pour l’exercice 2025 à 3,55 Mds€, un montant peu ou prou équivalent à celui de 2024. Et surtout l’annonce d’un vaste plan d’économie de 140 M€ pour faire face aux baisses conséquentes de ses recettes dans le cadre du projet de loi de finances (PLF) version Bayrou. Des coupes budgétaires qui se matérialisent par le report d’acquisition de matériel roulant (47,7 M€), la réduction de subventions (7,5 M€) de l’ordre de 5 % à 15 % pour les organismes extérieurs percevant des aides supérieures à 5 000 € ou encore le gel de ses recrutements pour maîtriser sa masse salariale (3,1 M€) et ce, en dépit de l’ouverture à la rentrée prochaine d’un tout nouveau lycée à Auterive.

Alors que ces premiers arbitrages avaient suscité de vives réactions, notamment du côté des acteurs culturels, reste maintenant à savoir comment sera accueilli, et plus prosaïquement financé, ce plan de défense chiffré à 200 M€.