Immobilier neuf à Toulouse : vers une annus horribilis
Logement. L’ObserveR, observatoire de l’immobilier neuf à Toulouse, vient de dévoiler le bilan d’activité pour les trois premiers trimestres de 2025. Et sans surprise, les chiffres sont catastrophiques aussi bien dans l’aire urbaine que dans la ville-centre. Malheureusement, les raisons d’espérer un rebond se font attendre.
Qu’est-ce qui pourra sauver le marché de l’immobilier neuf ? Depuis 2022, les indicateurs pour Toulouse et son aire urbaine virent inexorablement au rouge. Avec un nombre de mises en ventes qui est passé de 4 276 logements il y a trois ans à 1 598 sur les trois premiers trimestres de l’année en cours.
Du côté des ventes au détail, là aussi les chiffres sont catastrophiques avec une chute des transactions de près de 60 %, soit 1 515 actes versus 3 728 à la sortie du Covid. Quant à l’offre commerciale, qui correspond au stock disponible, elle ne cesse de se contracter pour atteindre aujourd’hui les 2 383 logements contre 4 254 sur la période 1-3T 2022.
Une crise multifactorielle
Dans la ville-centre, l’activité est aussi en très grande difficulté avec un ralentissement global et un stock qui s’effondre. Sur le 1-3T 2025, Toulouse comptabilise 800 mises en vente, c’est 28 % de moins qu’un an auparavant. Les ventes nettes ont plongé avec seulement 740 transactions en recul de 43 %, la Ville rose restant malgré tout la plus dynamique avec près de la moitié des actes. De fait, l’offre commerciale ne se reconstitue pas et passe sous le seuil alarmant des 1200 logements pour une commune qui compte plus de 510 000 habitants faisant d’elle la future 3e ville la plus peuplée de France avec environ 6 000 nouveaux habitants chaque année.
Ces résultats viennent confirmer la mauvaise passe que traverse le marché depuis maintenant cinq ans faisant même de 2025 « l’année la plus noire pour l’activité de la promotion immobilière depuis près de 25 ans », a alerté Michaël Merz, président de l’ObserveR de l’immobilier neuf à Toulouse lors du traditionnel bilan trimestriel qui s’est tenu le 25 novembre à la Résidence Baragnon.
Une crise qui s’explique par de multiples facteurs. Au premier rang desquels des taux d’intérêt, qui malgré une baisse restent autour des 3,5 % sur 25 ans, mais aussi et surtout la fin du Pinel. Ce dispositif de défiscalisation a pris fin le 31 décembre 2024 « dans un contexte de marché de la promotion qui n’a pu encore se réajuster », précise le président de Sporting Groupe, entreprise familiale de promotion immobilière.
Dans son viseur : l’instabilité politique, les contraintes réglementaires ainsi que le prix et la rareté du foncier, sans oublier les permis de construire délivrés au compte-goutte par les mairies. Une difficulté qui risque de s’aggraver compte tenu des élections municipales qui se profilent, souvent synonymes d’immobilisme.
Un rapport investisseurs et occupants désormais inversé
Conséquence de cette conjoncture défavorable : le renversement du modèle sur lequel s’est construit le marché du logement neuf à Toulouse comme ailleurs. Avec une répartition des ventes entre investisseurs et occupants qui s’est totalement inversée ces cinq dernières années le rapport passant de 60/40 à 24/76. Un changement de paradigme qui fait des ventes à occupants « la nouvelle cible principale du marché du neuf vers laquelle l’activité doit aujourd’hui se tourner », insiste Michaël Merz.
Ces ventes à occupants ont progressé de 14 % sur les trois premiers trimestres de 2025, représentant un volume de 1 150 transactions sur l’aire urbaine, principalement portées par les ventes aidées qui concentrent 56 % des actes. La moitié est réalisée via le Prêt social location accession (PSLA) et 23 % d’entre elles via le bail réel solidaire (BRS). Les ventes en BRS sont passées en cinq ans de 11 à 145.
Institué par les pouvoirs publics en 2004, le PSLA est un dispositif d’accession à la propriété qui permet à des ménages sous plafonds de ressources de devenir propriétaire de leur résidence principale, à prix maîtrisé avec un statut de locataire accédant. Plus récent (2017), le BRS permet, lui, à des ménages modestes de devenir propriétaire d’un logement neuf situé en zone tendue, et ce, à un prix abordable. Alors que plus de 7,4 millions de contribuables sont sous la menace d’une nouvelle hausse de leur taxe foncière, l’autre avantage de ces deux aides est un gel ou un abattement de cet impôt qui pèse lourd sur les finances des ménages.
Un modèle à bout de souffle
Si elles permettent à un plus grand nombre de devenir propriétaire de leur logement, comme c’est le cas à Toulouse et dans son aire urbaine, elles sont surtout symptomatiques d’une difficulté croissante à acheter un bien au prix du marché. Preuve d’un modèle à bout de souffle qui cherche désespérément de l’oxygène.
Présenté par les professionnels de l’immobilier comme un des leviers pour sortir de cette crise, le régime du logement locatif intermédiaire (LLI) peine encore à trouver son public. Étendu aux particuliers par la loi de finances 2024, le dispositif offre pourtant à ces derniers, à la condition d’acquérir le bien via une personne morale de type SCI, la possibilité de bénéficier d’une TVA réduite à 10 % au lieu de 20 % ainsi que d’un crédit d’impôt pour compenser, pendant une durée allant jusqu’à 20 ans, le montant de la taxe foncière.
Loin de remplacer le Pinel, le dispositif trouve malgré tout « progressivement ses marques », assure Michaël Merz. Dans l’aire urbaine, les ventes en LLI à particulier investisseur ont représenté 14 % des ventes nettes sur le 1-3T2025. Pas de quoi cependant changer la donne.
Si aucun des acteurs du secteur ne table sur une reprise de l’activité en 2026, en raison notamment des municipales, quid de 2027 marquée elle aussi par une échéance électorale majeure, à savoir la présidentielle ? Pas sûr que ce contexte politique puisse inverser la tendance, bien au contraire…