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Immobilier neuf : risque de pénurie

Immobilier. Faute d’offre renouvelée, le marché se contracte dans l’aire urbaine. Une menace pour l’emploi dans le secteur.

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À Toulouse, le prix du m2 s’établit désormais à 4280 € hors parking. DR

De moins en moins de produits à la vente et des prix qui commencent à flamber : la tension sur le marché des logements neufs dans l’aire urbaine toulousaine est chaque trimestre un peu plus exacerbée. « On frôle désormais la pénurie », indiquait ainsi le 6 septembre le président de l’Observer, Jean-Philippe Jarno, à l’occasion d’un point semestriel. Créé à l’initiative de la Fédération des promoteurs de l’immobilier (FPI), de l’Union sociale pour l’habitat (USH) et de l’Union nationale des aménageurs (Unam), soit une cinquantaine de membres, l’Observer a pour mission, à travers la collecte et l’analyse des données, de donner une vision globale du marché de l’immobilier neuf à Toulouse et son agglomération ainsi que dans le territoire du Sicoval.

« Nous sommes toujours dans une situation très déclinante »

Tandis que la demande reste toujours très soutenue, « animée essentiellement par les investisseurs », note Jean-Philippe Jarno, s’agissant du niveau de l’offre, des mises en vente et du stock, « nous sommes toujours dans une situation très déclinante ». Rien de nouveau cependant, puisque la FPI alerte depuis des mois les pouvoirs publics sur la dégradation de ces chiffres. Une situation qui s’explique principalement selon le président de l’Observer par « une pénurie foncière » et « le contexte électoral » qui, depuis 2019, a gelé les mécanismes de délivrance des autorisations de permis de construire.

La crise sanitaire, en provoquant une mise à l’arrêt des chantiers et le retrait du marché du détail d’un grand nombre de logements (2000 en 2020 et 500 au premier semestre 2021) en vue de ventes en blocs aux bail leurs sociaux dans le cadre des plans de relance, n’a fait qu’aggraver la situation.

Stocks en baisse

Dans le détail, dans l’aire urbaine, 2 357 logements neufs ont été mis en vente au cours du premier semestre 2021, c’est 11 % de moins qu’en 2020 et 37 % de moins qu’en 2019. C’est aussi « le niveau le plus bas depuis 2009 ». Les ventes à l’unité plafonnent à 2 732 logements cédés, soit 4 % de plus qu’au premier semestre 2020 mais 25 % de moins que durant le premier semestre 2019. Les investisseurs représentent désormais 64 % des ventes, c’est 10% de plus qu’en 2020 mais 24 % de moins qu’en 2019.

À noter que la crise a plus sévèrement impacté les ventes dites « aidées » (ventes à prix maîtrisé ou à TVA réduite) : leur nombre a chuté sur le semestre de 3% par rapport à 2020 mais de 45 % par rapport à 2019. Conséquence, le stock se réduit « comme peau de chagrin », pointe Jean-Philippe Jarno. À la fin du premier semestre, il se résume à 4199 logements neufs, soit 22% de moins qu’en 2020 et 28 % de moins qu’en 2019… Il faut remonter à 2013 pour retrouver un niveau aussi bas.

Prix en hausse

Dans la ville centre, les évolutions sont identiques. 1193 logements ont été mis en vente au premier semestre 2021, soit 7% de moins qu’en 2020 et 41 % de moins qu’en 2019. Le niveau des ventes au détail, soit 1289 ventes enregistrées sur le semestre, est marqué par une hausse de 6% par rapport à 2020 mais un recul de 38 % par rapport à l’année de référence qu’est 2019. L’offre commerciale, à 2 275 logements, affiche elle aussi une baisse : de 9 % par rapport à 2020 et de 20% par rapport à l’année précédente. Cette pénurie d’offre n’est pas sans conséquence.

La machine commence à montrer des signes d’essoufflement

En premier lieu, elle impacte les prix qui continuent de grimper dans l’aire urbaine de Toulouse. Le prix au m2 hors stationnement dans le secteur collectif libre flirte désormais avec la barre psychologique des 4 000 € (3 990 €/m2). La hausse des étiquettes atteint ainsi 2,7% en un an et +3,5% par rapport au premier semestre 2019. Dans la ville centre, les hausses sont plus fortes encore. Le prix moyen du m2 hors stationnement grimpe de 3,5% par rapport à 2020 et de 6,5% par rapport à l’année antérieure, à 4280 €.

Menace pour les entreprises

Face à ce marché « grippé durablement », les promoteurs immobiliers redoutent d’autres effets. « Le marché pourrait se réguler de lui-même, détaille Jean-Philippe Jarno. Parce que si la tendance actuelle se poursuit, et qu’il y ait bientôt deux fois moins de stock qu’auparavant, les ventes seraient forcément d’un niveau plus faible, et donc on peut considérer que l’ensemble de la filière de la construction serait fortement impactée. » Pour le professionnel, alors que la demande reste soutenue, le fameux « choc d’offres » se fait toujours attendre.

« Les ventes sont purement liées à l’offre, il n’y a pas de magie. Or aujourd’hui, la machine commence à montrer des signes d’essoufflement et la trésorerie des entreprises de construction, des bureau d’étude, des architectes, des promoteurs, a aussi ses limites. Et quant on a des équipes qui font bien leur travail, c’est toujours un crève-coeur de s’apercevoir qu’on a pas assez de travail à leur fournir. C’est donc aussi un cri d’alarme par rapport à l’emploi que je lance aujourd’hui pour l’Observer », a-t-il conclu.