Imprimante 3D : l’Isae-Supaero et l’Institut Clément Ader entendent révolutionner les process industriels
Recherche. L’Isae-Supaero et l’Institut Clément Ader viennent d’investir avec l’appui de l’État, de la Région et de la Métropole, 700 K€ dans une nouvelle machine d’impression 3D. Dotée d’une technologie particulièrement prometteuse, elle doit permettre de produire plus rapidement certaines pièces destinées au secteur aéronautique et spatial tout en diminuant l’impact environnemental de leur fabrication.

Alors que se tient jusqu’à ce soir au MEETT, la troisième édition de l’Aerospace Additive Manufacturing Summit (AAMS), le rendez-vous international de l’impression 3D dans l’aérospatial et la défense, un événement co-organisé par Aerospace Valley qui ressemble près de 400 participants, 150 entreprises et sert de cadre à quelque 2 000 rendez-vous BtoB, l’Isae-Supaero et l’Institut Clément Ader(ICA) annoncent l’acquisition d’une nouvelle machine de fabrication additive très innovante.
Cette technologie de rupture, qui consiste à fabriquer des objets par addition de matière en couches successives (polymères, métaux, céramiques, composites ou matières organiques), est en passe de révolutionner les process industriels où elle permet de réaliser aussi bien des prototypes que de l’outillage ou des pièces finies. Elle permet aussi de réparer des éléments de structure.
Des travaux de recherche amorcés dès 2011
La fabrication additive recouvre toutefois plusieurs technologies différentes en fonction des applications visées, ce qui explique que les recherches se poursuivent pour optimiser les process, notamment dans des secteurs tels que l’aéronautique et le spatial soumis à des contraintes normatives particulièrement strictes. « Les applications visées dans ces secteurs imposent une parfaite maîtrise du procédé afin de permettre son déploiement chez les fabricants d’aérostructures et de pièces de moteurs », précisent en effet l’Isae-Supaero et l’Institut Clément Ader dans un communiqué commun daté du 23 septembre 2025.
Leur nouvelle acquisition représente un investissement de 700 K€ financé par la Région Occitanie à hauteur de 300 K€, l’État pour 295 K€ et Toulouse Métropole 105 K€, auxquels s’ajoutent 100 K€ apportés par l’Isae-Supaéro pour couvrir les frais d’infrastructure et d’installation. Elle vient compléter le parc machine de fabrication additive métallique que possède déjà l’ICA.
Installée dans le quartier Montaudran, l’unité mixte de recherche spécialisée dans l’étude des structures et des matériaux travaille en effet sur ces procédés d’impression 3D depuis 2011. Elle veut grâce à ce nouvel outil étendre ses recherches à une technologie couvrant une plus large gamme de pièces aéronautiques.
Transition environnementale et énergétique
La nouvelle machine utilise de fait une technologie innovante de dépôt de fil métallique fusionné à l’aide d’un arc électrique (en anglais : Wire-Arc Additive Manufacturing, WAAM). « Grâce à son taux de dépôt (supérieur à 2 Kg/heure), cette technologie figure comme la plus prometteuse pour fabriquer des préformes et des pièces de structure semi-finies en titane, en aluminium ou en multi-matériaux pour l’industrie aéronautique », ajoutent l’école d’ingénieurs toulousaine et l’ICA.
Alors que les pièces telles que les mats des réacteurs, les longerons et autres pièces de grande taille (jusqu’à plusieurs mètres) sont aujourd’hui usinées dans la masse, générant une grande quantité de déchets sous forme de copeaux, le nouveau procédé, basé sur l’utilisation de « la juste matière à la juste place », doit permettre aux industriels de réaliser de substantielles économies, à la fois en termes de temps de fabrication et de consommation d’énergie et de métaux rares. Autre enjeu majeur : ces imprimantes 3D permettront également la fabrication de produits nouveaux et personnalisés.
Utilisée par les élèves-ingénieurs, les doctorants et les chercheurs, la machine de dépôt de fil métallique permet déjà de concevoir et de fabriquer de nouvelles pièces avec de nouveaux matériaux. Des travaux qui vont permettre « de modéliser et de caractériser les pièces fabriquées par ce procédé et de définir de nouvelles méthodes de conception et d’optimisation des pièces aéronautiques », précise Jean-François Ferrero, directeur de l’Institut Clément Ader. Et Anis Hor, chercheur à l’Isae-Supaero, d’ajouter :
Le développement de l’instrumentation et du monitoring du procédé WAAM est une étape cruciale pour la qualification de ces nouvelles pièces en aéronautique et la progression de jumeaux numériques. »
Des projets de collaboration en cours et à venir
Trois sujets seront particulièrement abordés par les équipes de recherche :
- la conception et la fabrication hybride intégrant l’utilisation de plusieurs procédés de fabrication additive pour concevoir et fabriquer des pièces aéronautiques complexes de taille industrielle (allant jusqu’à 1 m3) ;
- la fabrication des pièces en multi-matériaux permettant ainsi d’économiser les matériaux rares ou très énergivores ;
- la réparation des pièces à haute valeur ajoutée.
Des projets de collaboration avec des industriels sont en cours notamment avec Segula Technologies pour fabriquer des réservoirs de stockage d’énergie en multi-matériaux et en discussion avec Airbus et Safran, les deux industriels se montrant particulièrement intéressés par les propriétés du procédé WAAM.
De fait, la fabrication additive permet de s’affranchir de la plupart des contraintes qui s’appliquent aux procédés conventionnels tels que l’usinage, la fonderie ou encore l’injection plastique. Elle présente ainsi de nombreux avantages : économie de matière, gain de masse, raccourcissement des délais de mise sur le marché, réduction des coûts de fabrication…
Ces atouts indéniables expliquent l’essor que connaît depuis quelques années ce procédé dans l’industrie. Pour accompagner son développement, Ad’Occ, l’agence régionale de développement économique, a mis en ligne un annuaire des acteurs de la fabrication additive qui liste à ce jour 57 entreprises ou structures.