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Musée des Augustins de Toulouse : réveiller le bel endormi

Culture. C’est un chantier d’envergure à plus de 10 M€. Après plus de quatre ans de fermeture, le musée des beaux-arts de Toulouse s’apprête à rouvrir ponctuellement au public pendant quelques semaines. Objectif : recréer du lien avec les habitants avant deux nouvelles phases de travaux.

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Photo du musée des Augustins
Deux nouvelles phases de travaux sont encore prévues au musée des Augustins. Sa réouverture officielle est programmée au premier semestre 2025. (Crédit : DANIEL MARTIN)

C’est un joyau endormi du patrimoine culturel toulousain qui s’apprête à rouvrir ponctuellement au public après quatre ans de fermeture. Du 24 juin au 16 octobre, les visiteurs pourront de nouveau franchir les portes du musée des Augustins, dans une configuration originale (voir encadré).

L’entrée se fera en effet pour la première fois, et de façon exceptionnelle, par la rue Mercié et non pas par la rue de Metz, où le pavillon d’entrée s’apprête enfin à être rénové après de nombreux impondérables qui ont retardé le lancement des travaux.

Un chantier estimé à 2 M€ qui aurait dû commencer en 2020 pour une durée de 18 mois ! Alors comment en est-on arrivé là ? Pour comprendre, il faut remonter dans le temps. Fondé en 1793, le musée des Augustins est l’un des plus anciens musées de France avec le Louvre.

Niché en plein coeur de Toulouse dans un superbe couvent des XIVe et XVe siècles sur 9000 m2 doté d’un cloître intact et complété d’une nouvelle aile au XIXe siècle, il héberge une collection de plus de 4 000 oeuvres, principalement des sculptures datant de l’époque romane jusqu’au milieu du XXe siècle, et des peintures d’artistes du XVe au XXe siècle. Mais comme tout patrimoine architectural, il n’échappe pas aux affres du temps.

Découverte d’une chapelle de la renaissance

Déjà dans les cartons sous la mandature de Dominique Baudis - pour un budget total estimé à l’époque à 70M€ - le projet de rénovation des Augustins a finalement été acté en 2017 « pas dans son entièreté, la conjoncture financière étant ce qu’elle est, mais pour une bonne part », se réjouit Pierre Esplugas-Labatut, ad joint au maire en charge des musées.

« La première phase de travaux a eu lieu alors que le musée était encore ouvert au public. D’un montant de 6 M€, elle a concerné la réfection des verrières des salons de peinture, la mise en accessibilité du bâtiment avec notamment l’installation de deux ascenseurs, la mise à niveau du système anti-incendie ou encore l’aménagement des bureaux et des réserves.

Photo de la nef de l'ancienne l'église du couvent
À l’occasion de sa réouverture ponctuelle pendant la saison estivale et la rentrée, les visiteurs du musée pourront découvrir dans la nef de l’ancienne l’église du couvent un nouvel accrochage d’une cinquantaine d’oeuvres, dont plusieurs inédites jamais exposées. (Crédit : LA GAZETTE DU MIDI)

Très vite, nous avons aussi décidé de réhabiliter l’accueil visiteur qui n’était clairement pas, ou plus, en adéquation avec les ambitions légitimes que l’on attend d’un établissement comme les Augustins. Pour parler franchement il était indigne en termes d’accessibilité, de confort d’usage, d’esthétisme… C’est cette décision de créer un pavillon d’accueil contemporain qui nous a conduits à devoir fermer le musée », explique l’élu.

Initialement programmé pour durer 18 mois, le chantier a été chamboulé par la découverte de vestiges d’une chapelle de la Renaissance.

« Comme la loi l’exige, nous avons entamé en amont des travaux des fouilles archéologiques. Et c’est bien connu, quand on cherche on trouve ! En creusant, les ouvriers ont en effet dé couvert les fondations d’une chapelle de la Renaissance : l’Ecce Homo édifiée au XVIe siècle. La direction régionale des affaires culturelles (Drac) nous a alors dit de stopper les travaux. Il a fallu trouver une solution ce qui a engendré de très longues discussions et ce, jusqu’au plus haut niveau. Cette phase de fouilles puis de blocage, certes légitime, a entraîné des retards bien supérieurs à ce que nous avions imaginé », reconnaît Pierre Esplugas-Labatut.

Dans la foulée, la Drac a aussi demandé de procéder à la restauration du cloître ce qui a automatiquement conduit la Ville de Toulouse à devoir ouvrir une nouvelle phase d’étude et à lancer un appel d’offres. Le démarrage de ce troisième chantier commencera en janvier 2024. Pour le mener à bien, la collectivité a investi 3M€ supplémentaires.

« Tout ceci explique pourquoi le musée des Augustins est fermé au public depuis 2019 et qu’il le restera encore jusqu’au premier semestre 2025 - à l’exception de cette réouverture ponctuelle estivale - puisque des aménagements supplémentaires vont aussi être entrepris pour un montant qui reste encore à définir », révèle Pierre Esplugas-Labatut qui le sait : « Ce n’est jamais une bonne nouvelle qu’un lieu soit fermé pendant une aussi longue période. Personne ne peut s’en réjouir. Mais parfois c’est nécessaire. Dernièrement, le Centre Pompidou a annoncé qu’il allait fermer ses portes pendant cinq ans pour travaux. À Toulouse, le Museum a été fermé en son temps pendant dix ans et cela n’a pas altéré son succès et sa renommée. »

Photo de Laure Dalon
Laure Dalon est le nouveau visage des Augustins. Nommée en octobre 2022, la directrice et conservatrice était auparavant en poste à Amiens, où elle a piloté l’important chantier de rénovation du musée de Picardie puis sa réouverture. (Crédit : MAIRIE DE TOULOUSE F.MALIGNE)

Encore faut-il pour cela réussir sa réouverture, et ce travail incombe en grande partie à la nouvelle directrice et conservatrice des lieux : Laure Dalon. Nommée en octobre dernier, elle succède à Axel Hémery qui occupait cette fonction depuis 2008. Un défi de taille mais largement dans les cordes de la nouvelle venue et pour cause.

Auparavant en poste à Amiens, elle a piloté l’important chantier de rénovation du musée de Picardie puis la réouverture de cet établissement du XIXe siècle. Diplômée de l’École nationale des Chartes en 2006, elle a été élève en classe préparatoire au lycée Pierre-de-Fermat de Toulouse.

Développer une nouvelle identité forte

Et si Laure Dalon ne veut pas « révolutionner  » le musée des Augustins, elle souhaite lui impulser une nouvelle dynamique. Sur le court terme, son objectif est de recréer un lien entre l’établissement et les Toulousains. Voilà, pourquoi depuis son arrivée elle a travaillé d’arrache-pied avec ses équipes pour pouvoir rouvrir ponctuellement de juin à octobre mais pas seulement.

« L’idée est de se remettre dans une dynamique d’échanges, de partage et de discussions. De par mon expérience à Amiens, je sais que les initiatives que nous avions prises pour retisser du lien tout au long des travaux avaient été très fructueuses et c’est ce que j’ai à coeur de faire ici à Toulouse. C’est-à-dire, à partir du moment où le chantier va redémarrer, il faudra communiquer dessus et partager davantage d’informations que cela n’a été le cas jusqu’à présent. C’est essentiel d’impliquer les habitants dans ce processus pour leur permettre de se réapproprier les lieux. Et puis là, contrairement aux phases de travaux précédentes, la prochaine, qui concerne le pavillon d’entrée, sera très visible puisqu’elle se trouve sur la rue de Metz », détaille la nouvelle directrice des Augustins.

Photo du chantier du nouveau pavillon d'accueil
Après une nouvelle phase de fouille, le chantier du nouveau pavillon d’accueil, visible depuis la rue de Metz, devrait commencer dans quelques semaines. La Ville de Toulouse a investi plus de 2 M€ dans ce projet de réhabilitation. (Crédit : MUSÉE DES AUGUSTINS)

Et cela commence par le déploiement dans les prochains jours d’une nouvelle signalétique installée aux abords et dans le musée. Volontairement originale pour piquer la curiosité des passants, « elle a été réalisée en collaboration avec un scénariste et dessinateur de bande dessiné. Cela doit nous permettre de conduire les visiteurs potentiels vers la rue Antonin Mercié, à l’arrière du musée, vers une nouvelle entrée temporaire pour cet été.

Ce médium de la bande dessinée sera aussi présent à l’intérieur en accompagnement des textes et des médiations pour une découverte plus ludique et plus légère ». Consciente des enjeux et des sommes investies dans ce projet de rénovation, Laure Dalon le sait : le renouveau des Augustins passe aussi, et avant tout, par une identité culturelle forte.

« Après avoir pris la mesure de l’établissement : découverte des équipes, des collections, des projets en cours ou en standby, de l’ampleur des travaux… je me suis aussi beaucoup interrogée sur l’image du musée. Très vite nous avons réfléchi de manière collégiale pour savoir quelle est sa place dans Toulouse ? Dans le monde des musées ? Qu’est-ce qui fait sa singularité et donc son originalité ? Et son attractivité ? Cette remise à plat là doit nous permettre de manière très concrète de développer une nouvelle identité visuelle (logo, scénographie, offres de services…) en cohérence avec l’histoire que nous souhaitons raconter aux visiteurs. C’est un travail essentiel pour redonner au musée des Augustins toute l’attention et le rayonnement qu’il mérite. »