À Moissac, Aurore Trujillo confectionne savons et autres produits pour le corps de façon éco-friendly
Entrepreneuriat. Dans son atelier Fulmina, Aurore Trujillo fabrique des produits cosmétiques naturels, à base d’ingrédients locaux. Lauréate régionale du concours Talents des Citées 2025, la cheffe d’entreprise mise sur une démarche éco-responsable pour se démarquer et ainsi se faire une place dans un marché ultra-concurrentiel.
Toujours plus de marques, de crèmes et de produits pour la peau. En France, selon la Fédération des Entreprises de la Beauté (FEBEA), le marché de la cosmétique génère 68 Md€ de chiffre d’affaires, soit 0,8 % du PIB. Des résultats hors norme qui s’expliquent par l’engouement de la population pour les soins corporels, les routines beauté, ou encore le « grooming », une révolution portée ces dernières années par les réseaux sociaux.
Parmi toutes les offres du marché, Aurore Trujillo, jeune entrepreneuse dont l’atelier est installé dans le quartier prioritaire de Moissac, dans le Tarn-et-Garonne, fabrique depuis 2022 parfums, savons, et masques à partir de matières premières naturelles. Une façon pour elle de se démarquer en affirmant ses convictions personnelles. Une démarche éco-responsable pleinement assumée, alors qu’aujourd’hui la traçabilité de nombreux produits vendus n’est pas garantie.
Reconversion professionnelle
Dans son atelier Fulmina, tout est fait à la main en utilisant la technique de la saponification à froid qui consiste à mélanger des huiles végétales sans chaleur excessive et permet de conserver les propriétés bénéfiques des ingrédients pour la peau. Autre avantage de cette technique, son faible impact environnemental, car peu énergivore. Miel de Boudou, spiruline de Montauban, huile essentielle de thym du Gers, lait de chèvre local... la trentenaire a fait le choix fort de se fournir en matières premières auprès de producteurs locaux.
C’est à la sortie de la pandémie qu’Aurore Trujillo a choisi de se reconvertir et de se mettre à son compte. Après plusieurs années à travailler comme technico-commerciale au sein du groupe international Saint-Gobain, spécialisé dans la production, la transformation et distribution de matériaux, elle quitte le confort du salariat pour se lancer dans la création d’entreprise. C’est à Moissac qu’elle décide d’ouvrir son atelier. Mais pas n’importe où. Dans un quartier populaire profitant d’une volonté de la commune de redynamiser le centre-ville.
« Au début, on m’a dit "mais pourquoi tu vas t’installer ici ? Il n’y a plus rien, le quartier est mort" », se remémore la jeune femme. Un pari réussi à double titre avec d’abord un effet boule de neige dans le quartier où de nouveaux commerçants se sont installés dans la foulée. Et aussi, avec le prix de la Création remporté dans le cadre du concours régional Talents des Cités 2025 [1] , organisé par Bpifrance et soutenu par le ministère délégué chargé de la Ville ainsi que par la Banque des Territoires. Outre une mise en lumière de son atelier dans les médias, cette distinction s’accompagne d’un coup de pouce financier de 2 000 €.
Une actrice de la vie locale
Plus qu’une boutique de produits cosmétiques, l’atelier Fulmina, est un lieu de vie du quartier. « Dans ma clientèle, j’ai toutes les générations. Certaines personnes viennent pour créer du lien social, qu’il s’agisse de personnes âgées ou de jeunes filles, mes clientes poussent la porte parce qu’elles apprécient l’ambiance, ou simplement pour papoter », raconte-t-elle, humblement fière de ces rencontres.
L’artisane participe aussi à l’activité économique de Moissac en accueillant régulièrement en stage des jeunes du quartier. « J’aime la transmission dans la création. Ce n’est pas parce que vous habitez dans un QPV que vous ne pouvez pas créer de vos mains », défend la Tarn-et-Garonnaise. « L’important est de montrer à ces jeunes que tout est faisable à partir du moment où l’on veut s’en donner les moyens. » Elle propose aussi des ateliers de fabrication de savon, une manière de promouvoir la simplicité et la valeur zéro déchet de ses produits.
Aurore Trujillo propose d’ailleurs des emballages recyclables et a décidé de rejoindre le label EcoDéfi. « L’idée, c’est de faire bouger les choses en impliquant les gens. Pour ce faire, je fais participer ma communauté via Instagram et nous essayons de trouver des manières de valoriser les produits, leur production et leur distribution ensemble. »
Des défis toujours plus grands
Aujourd’hui, la cheffe d’entreprise distribue ses produits en direct, dans son atelier, et via sa boutique en ligne grâce à laquelle elle réalise l’essentiel de ses ventes. Son ambition ? Augmenter ses volumes de vente et donc son chiffre d’affaires. Pour cela, l’intéressée - qui travaille seule depuis le début de cette aventure entrepreneuriale - espère pouvoir embaucher pour l’aider à développer sa marque.
Une étape qu’Aurore Trujillo pourrait franchir plus vite si elle remporte, avec cinq autres lauréats régionaux, la finale nationale du concours Talent des Cités dont le jury doit se tenir en novembre prochain. À la clé, peut-être, pour elle, des dotations de 3 000 € à 7 000 €, ainsi qu’une campagne de visibilité dans les médias.
[1] Talents des Cités : organisé dans le cadre de la tournée "entrepreneuriat Quartiers 2030", ce concours récompense des créateurs d’entreprise ayant implanté leur activité dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV).