À Toulouse, Zelin développe un « Waze des mers » pour limiter la pollution du fret maritime

Moins souvent pointé du doigt que l’aérien, mais pourtant extrêmement polluant, le transport maritime est responsable de 3 % des émissions de gaz à effet de serre dans le monde. Et compte tenu de l’ampleur que le fret maritime ne cesse de prendre, ses émissions pourraient grimper à 17 % d’ici 2050 alertent les experts.

En France, d’après les statistiques du ministère du Développement durable datant de 2020, le secteur était le premier émetteur de gaz à effet de serre avec 28,7 % du total des émissions, devant l’agriculture (20,9 %), l’industrie manufacturière et la construction réunies (19,2 %).

Face à l’urgence climatique, l’Organisation maritime internationale a promis d’atteindre la neutralité carbone vers 2050. Pour y parvenir les 175 états membres ont notamment décidé d’imposer une taxe carbone à partir de 2028 pour les navires les plus polluants. Pour accompagner les professionnels du secteur engagés dans cette transition à marche forcée, de nombreux acteurs privés ont développé des solutions innovantes, comme celle proposée par la start-up toulousaine Zelin.

Installée dans le quartier de Basso-Combo et forte aujourd’hui de 15 salariés, l’entreprise fondée en 2018 par Julien Senter, docteur en mécanique des fluides et Julien Vitet, ingénieur, a mis au point une plateforme d’ingénierie en ligne dédiée à la navigation maritime.

Optimiser les trajectoires

Véritable « Waze des mers », cette plateforme baptisée Green Sea Routing est un jumeau numérique en 3D en temps réel spécifiquement conçu pour le routage maritime de la marine marchande à assistance vélique (assistée par voile). Une solution pour laquelle la jeune pousse a bénéficié cet été d’un prêt à taux zéro d’un montant de 30 K€ de la part de TotalEnergies en Occitanie.

Concrètement, cette plateforme permet « de fournir aux armateurs et opérateurs un outil d’aide à la décision à fort impact environnemental », explique son président Julien Senter. Comment ? La plateforme utilise des données météorologiques telles que le vent, les marées, les courants... ainsi que des données techniques comme la charge utile ou la configuration des voiles, disponibles sur internet ou captées directement par les bateaux en mer.

Une seconde plateforme de simulation

« Notre système se distingue des autres outils existants car nous enregistrons un plus grand volume de données, ce qui nous permet de fournir une analyse mathématique plus approfondie », précise l’intéressé qui promet « jusqu’à 30 % d’économies de carburant, une baisse de près de 20 % des émissions de CO₂ et un gain de temps important pour le reporting du trajet par les équipes ».

En parallèle du routage maritime, Zelin travaille également sur la simulation numérique assistée par l’intelligence artificielle. C’est dans ce cadre qu’elle propose à ses clients une plateforme pour optimiser le développement de leurs produits, outils et innovations. « Grâce à la simulation, nous effectuons des tests virtuels. Par exemple, pour un avion, cela permet de ne construire qu’un seul prototype au lieu d’une dizaine. Cela représente une économie de temps et de moyens considérable », affirme Julien Senter. Et d’ajouter :

Cet outil s’adresse aux secteurs du transport, de l’industrie mais aussi de l’aérospatial et de l’énergie. Nous travaillons d’ores et déjà avec de grands donneurs d’ordres comme Airbus, EDF, Safran mais aussi avec des start-up comme le Bordelais HynAero, constructeur de bombardiers d’eau. »

3 M€ de CA en 2030

Innovante, sa plateforme Green Sea Routing lui a permis de faire partie en juillet dernier des cinq lauréats retenus dans le cadre de l’appel à projets Soutien à la décarbonation de la filière maritime française financé par le groupe CMA CGM (55,5 Md$ de CA en 2024) via son fonds Pulse.

Sur une enveloppe totale de 7,5 M€, « nous allons bénéficier d’un soutien financier de 3 M€ », précise le PDG de Zelin, qui annonce par ailleurs de nouveaux recrutements dès la rentrée de septembre pour se pencher sur le développement de nouveaux projets, dont certains sont déjà en cours. « Nous avons notamment commencé à travailler sur un projet d’avion vert. L’idée est de repenser les différents composants de l’avion pour diminuer son impact carbone tout en maintenant ses niveaux de performance », annonce Julien Senter, qui vise un chiffre d’affaires de 3 M€ d’ici 2030.