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ATR veut faire voler le premier avion régional hybride-électrique d’ici 2030

Aéronautique. Spécialisé dans la construction d’avions régionaux de moins de 90 places à turbopropulseurs, l’industriel toulousain ATR vient d’être sélectionné par l’initiative européenne Clean Aviation pour mener à bien deux importants projets de recherche. Objectif ? Accélérer la décarbonation du secteur.

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Soutenu par l’initiative européenne Clean Aviation, ATR planchera sur la conception d’un avion régional ultra-efficace intégrant une propulsion hybride-électrique, des batteries haute performance et un moteur thermique compatible avec 100 % de carburant d’aviation durable (SAF). (©ATR/Chunlaud Melody)

Face au défi que représente la décarbonation du transport aérien, responsable de 2 à 3 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, en 2022, à l’occasion du sommet européen de l’aviation qui s’est tenu à Toulouse, les acteurs de la filière se sont engagés à atteindre la neutralité carbone en 2050. Pour parvenir à cet objectif ambitieux, plusieurs solutions sont à l’étude : depuis l’amélioration des opérations au sol et en vol jusqu’à la production de carburants d’aviation durables (SAF) en passant par le développement d’une nouvelle génération d’aéronefs.

Plusieurs industriels dont de grands donneurs d’ordre se sont déjà engouffrés dans cette voie. C’est le cas d’Airbus avec son projet ZEROe d’avion à hydrogène ou d’autres comme le toulousain Aura Aero qui, avec ses 650 précommandes pour ERA, son avion hybride électrique de 19 places dont la commercialisation est attendue pour la fin de la décennie, est devenu un acteur incontournable du transport aérien régional décarboné.

Un statut que brigue également le constructeur d’avions régionaux, ATR qui vient d’annoncer, dans un communiqué daté du 9 septembre 2025, avoir été sélectionné par Clean Aviation Joint Undertaking (Clean Aviation) pour piloter deux importants projets de recherche dans le cadre du programme Ultra-Efficient Regional Aircraft (Avion régional ultra efficace - UERA).

Objectif ? Rien de moins que de « redéfinir l’avenir de l’aviation régionale à faibles émissions », indique l’avionneur basé à Toulouse. Coentreprise d’Airbus et de l’italien Leonardo, ATR, qui emploie 1100 salariés dans le monde pour un chiffre d’affaires de 1,2 Md€, est spécialisé dans la construction d’avions régionaux de moins de 90 places à turbopropulseurs (système à hélices), avec deux principales gammes : les ATR 42-600 et ATR 72-600.

Pour ATR, intégrer cette initiative européenne revêt un enjeu majeur. Clean Aviation est en effet le principal programme de recherche et d’innovation de l’Union européenne dédié à la transition écologique du secteur aérien. Succédant au programme Clean Sky, déployé entre 2008 et 2024, il s’agit d’un partenariat public-privé entre la Commission européenne, via Horizon Europe, le programme de recherche et d’innovation de l’UE, et l’industrie aéronautique européenne.

Doté d’un budget de 4,1 Md€, dont 1,7 Md€ de financement public européen et pas moins de 2,4 Md€ de financement privé, Clean Aviation vise à développer des technologies de rupture pour réduire l’empreinte carbone des avions régionaux et court-moyen courrier d’au moins 30 % par rapport aux appareils de 2020.

Une première mondiale

Dans le détail, ATR mènera deux projets de développement ambitieux visant à démontrer la faisabilité de l’intégration d’une propulsion hybride-électrique, de systèmes d’hélices avancés et de systèmes avioniques électrifiés sur un avion régional. Avec cette ambition : faire voler un avion régional hybride-électrique en utilisant un ATR 72-600 d’essais, « une première mondiale », selon le constructeur.

La coentreprise, par la voix de sa présidente exécutive Nathalie Tarnaud Laude, se dit honorer de « piloter cette initiative dimensionnante pour notre industrie. » Et d’ajouter :

Il ne s’agit pas seulement d’une démonstration technologique, mais d’un engagement fort envers l’avenir de l’aviation régionale. En faisant voler le premier avion régional hybride-électrique au monde d’ici 2030, nous voulons prouver que développement durable et connectivité peuvent aller de pair. Ces projets s’appuient sur notre héritage unique en matière d’efficacité énergétique et placent ATR à l’avant-garde de la nouvelle génération d’avions. »

ATR ne mènera pas seul ces travaux de recherche. Le constructeur pourra en effet s’appuyer sur la collaboration de plusieurs partenaires industriels et de recherche internationaux, dont Safran et deux entreprises du groupe américain RTX, basé à Arlington en Virginie, Collins Aerospace et Pratt & Whitney Canada.

Concrètement, le projet principal d’ATR, dénommé HERACLES (Hybrid-Electric Regional Aircraft Concept for Low EmissionS), définira un concept d’avion régional ultra-efficace intégrant une propulsion hybride-électrique, des batteries haute performance et un moteur thermique compatible avec 100 % de carburant d’aviation durable (SAF).

Ces technologies seront testées en vol dans le cadre du projet DEMETRA (Demonstrator of an Electrified Modern Efficient Transport Regional Aircraft), à l’aide d’un ATR 72-600 d’essais. Clean Aviation vise une mise en service de ces avions régionaux de nouvelle génération à l’horizon 2035.