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Changement climatique : Cactile invente la toiture qui récupère l’eau de pluie

Bâtiment. La start-up castraise développe une solution qui permet de récupérer et de réutiliser l’eau de pluie sans consommer d’énergie. Elle lui a valu de remporter en 2023 le concours les Inn’Ovations organisé par la Région Occitanie.

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Photo de Jean-Baptiste Landes à droite
A droite sur la photo, le fondateur de Cactile, Jean-Baptiste Landes (© Cactile).

Les importantes inondations qui ont émaillé l’actualité ces dernières années montrent la fragilité de nos réseaux d’eaux pluviales. L’imperméabilisation généralisée des sols ayant fortement réduit leur capacité d’absorption, les collectivités sont de plus en plus nombreuses à s’orienter vers une renaturation notamment des zones urbaines pour favoriser l’infiltration.

C’est le cas de Toulouse Métropole qui, dans son plan en faveur de la préservation de la ressource en eau dévoilé le 3 avril 2024, prône, à l’occasion du réaménagement des rues, de créer des tranchées de Stockholm pour stocker les eaux pluviales sur le domaine public pour l’arrosage des espaces verts, ou encore de privilégier les revêtements perméables et la végétation afin de favoriser l’infiltration des eaux de pluie.

De bonnes solutions, mais insuffisantes selon Jean-Baptiste Landes, le fondateur de Cactile. La start-up albigeoise a été lauréate en 2023 du concours les Inn’Ovations organisé par Ad’Occ, l’agence de développement économique de la Région Occitanie. Elle développe un nouveau système de tuiles qui permet de collecter et de stocker de l’eau de pluie en toiture (ou en façade) et de la réutiliser. Alors que la commercialisation démarre, l’entreprise a déjà plusieurs projets d’installation dans ses cartons, soit au total plus de 700 m2 de toiture à installer dès l’an prochain pour des collectivités et des entreprises. En attendant, en fin d’année, l’entreprise devrait réaliser son premier chantier : équiper les locaux d’une société castraise d’une façade stockante.

Donner aux toitures une nouvelle fonction

Jean-Baptiste Landes, qui a travaillé 20 ans chez EDF, notamment dans le domaine de l’hydroélectricité, est particulièrement sensible à la problématique du changement climatique. C’est en observant une maison en construction que l’idée a germé. « Pour imperméabiliser 70 m2 de surface au sol, on pose une toiture plus grande encore dont la seule fonction est d’évacuer l’eau de pluie le plus vite possible. Je me suis dit qu’il était aberrant qu’on n’arrive pas à faire autre chose de ces surfaces de toitures en pente », se souvient-il.

Pour assurer cette fonction de mise hors d’eau, on utilise généralement des matériaux très lourds comme la terre cuite. Construites en conséquence, les charpentes peuvent porter des charges importantes mais ne servent au final qu’à stocker ces matériaux lourds. Et Jean-Baptiste Landes de poursuivre :

L’idée est d’assurer cette fonction de mise hors d’eau de l’habitation avec des matériaux plus légers, ce qui est tout à fait réalisable aujourd’hui puisqu’on le fait déjà avec du bac acier (NDLR : de la tôle de couverture). L’acier est 10 fois plus léger que la terre cuite et cela dure aussi longtemps. On peut dès lors confier à cette toiture d’autres fonctions, à savoir stocker les excès d’eau pour ensuite la réutiliser et ainsi diminuer notre consommation d’eau potable. »

Comment ça marche ?

Photo du système de récupération d'eau
Le système se compose de trois couches de matériaux : le réceptacle - fixé sur la charpente à la place des tuiles - il assure un premier niveau de mise hors d’eau de l’habitation, des réservoirs d’eau très fins qui vont permettre de stocker 40 litres d’eau par m2, et enfin, des panneaux de couverture, à savoir de la tuile métallique emboutie (© Cactile).

Le système se compose de trois couches de matériaux : une première, que l’on appelle le réceptacle, qui se fixe sur la charpente à la place des tuiles. Elle assure un premier niveau de mise hors d’eau de l’habitation. Dans ce réceptacle, sont positionnés des réservoirs d’eau très fins qui vont permettre de stocker 40 litres d’eau par m2. Enfin, on vient masquer cet ensemble avec des panneaux de couverture, en l’occurrence de la tuile métallique emboutie.

L’un des enjeux pour le néo-entrepreneur est de rendre la pose de ces panneaux innovants la plus simple possible. « C’est aussi facile que de changer les tuiles à l’occasion d’une rénovation. On ne touche donc pas à la charpente », observe-t-il.

Une fois en place, lorsque les réservoirs sont pleins, la toiture retrouve sa fonction initiale : l’excédent d’eau s’évacue dans la gouttière. « Nos simulations montrent que le système permet de diminuer de moitié l’intensité d’un orage », ajoute Jean-Baptiste Landes, et ainsi de soulager les réseaux d’eau pluviales qui sont mis à rude épreuve lors des épisodes de fortes pluies.

La certification l’année prochaine

Alors que l’entreprise est en phase d’industrialisation de son concept, le fondateur de Cactile prévoit de déposer son dossier de demande de certification auprès du Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) l’année prochaine. Il projette également une levée de fonds pour financer la fabrication de l’outillage industriel et la structuration de l’entreprise. Une levée dont le montant est encore en discussion, ajoute Jean-Baptiste Landes. Soutenu par l’Ademe, l’Office français de la biodiversité ainsi qu’EDF, il a bénéficié de prêts d’honneur de Créalia et d’Initiative Tarn.

Le chef d’entreprise qui reçoit de nombreuses marques d’intérêt de la part de collectivités et d’entreprises – il vient de faire un devis pour une grosse entreprise de Rouen pour des ombrières de parking – réfléchit déjà à l’étape suivante : l’international. Il lorgne les pays frontaliers dont certains sont plus avancés que la France sur la question, notamment la Belgique qui a déjà rendu obligatoire la récupération et la réutilisation de l’eau de pluie dans les constructions neuves.

Dernier enjeu : le coût. « Il faut comparer avec le prix de la toiture et du récupérateur d’eau de pluie enterré et équipé d’une pompe pour réutiliser l’eau. Nous sommes certes aujourd’hui plus cher mais les volumes se développant, nous serons sur un coût équivalent sauf qu’on ne consommera pas de place et pas d’électricité  », conclut Jean-Baptiste Landes, sûr de son concept.