Pour séduire les bailleurs sociaux avec ses constructions modulaires, ModuleM muscle son outil industriel
Construction. Spécialiste de la construction modulaire hors site pour le tertiaire, le haut-garonnais ModuleM a rejoint le pool industriel constitué autour de la start-up Zen Modular, qui, avec ses modules standardisés, vise le marché des résidences gérées. L’occasion pour ModuleM d’accélérer son développement dans le secteur du logement social. En prévision, la PME va investir 2 M€ dans l’agrandissement de ses locaux de La Magdelaine-sur-Tarn.
Longtemps pénalisé par une image de produits de piètre qualité, le marché de la construction modulaire hors site est en pleine renaissance. Alternative aux modes de construction traditionnels, le hors site consiste, rappelons-le, à réaliser tout ou partie des éléments composant le bâti en usine (murs porteurs, panneaux de plancher, etc.) avant de les acheminer et de les assembler sur le chantier. Ce procédé constructif a d’ailleurs été identifié en juin 2023 par le Conseil national de la refondation du logement comme une des mesures structurelles pour lutter contre la crise du logement tout en participant à la transition écologique et à la réindustrialisation de l’Hexagone.
La construction modulaire est une catégorie de construction hors-site. Elle vise la préfabrication de locaux prêts à être aménagés pour les installer en l’état sur site. Un process qui, pour ses promoteurs, cumule plusieurs avantages : rapidité de fabrication et de mise en œuvre, respect de l’environnement, performances conformes aux normes les plus récentes, le tout pour un coût maîtrisé.
Une réponse à la crise du logement
Dans ce contexte, la filière, qui a enregistré 4 % de croissance en 2023, se restructure. C’est le cas du savoyard TH, acteur historique spécialiste de la construction hors site d’habitats modulaires bas-carbone qui vient d’annoncer une levée de fonds de 8 M€ en vue d’ouvrir un deuxième site d’assemblage. De leur côté, les grands groupes du BTP se dotent de structures dédiées à l’image d’Eiffage. Enfin, de nouveaux entrants veulent surfer sur la dynamique, telle la start-up Zen Modular, une pépite créée en 2022 et basée dans le Puy-de-Dôme.
Son ambition ? Exploiter le potentiel de la construction modulaire pour concevoir et construire des bâtiments « durables, innovants et plus respectueux de l’environnement ». Pour ce faire, elle a développé une plateforme digitale à destination des maîtres d’ouvrage et des architectes pour leur permettre de réaliser des projets de bâtiment sur la base de modules préconçus et interopérables, fabriqués par un réseau de partenaires répartis sur tout le territoire national.
Après avoir bouclé un premier tour de table d’1 M€, Zen Modular a annoncé en novembre dernier la constitution d’un pool industriel. Elle a en effet signé des partenariats stratégiques avec quatre acteurs de la construction modulaire : le savoyard AlphaM.3D (groupe Pelletier), l’amienois Habitat 3D, le Ligérien Ossabois (groupe GA) et le haut-garonnais ModuleM. Objectif : fabriquer en série des chambres pour résidences gérées (étudiants ou seniors), les établissements de santé et l’hôtellerie. « Des produits industriels performants en terme de qualité, d’émission de carbone et de rapidité de construction, pour un rapport qualité/prix qui n’existe pas sur le marché », résume Pascal Chazal, le PDG de Zen Modular.
Une diversification d’activité pour ModuleM
Pour le fondateur et dirigeant de ModuleM, Cyril Moussard, ce partenariat va lui permettre d’accélérer son développement sur le marché du logement où il était jusque-là peu présent. Spécialisée dans la fabrication modulaire hors site depuis sa création en 2012, l’entreprise, qui emploie 30 salariés et compagnons pour un chiffre d’affaires de 10 M€, s’est essentiellement développée sur le marché tertiaire, avec pour principaux clients des collectivités d’Occitanie et de Nouvelle-Aquitaine.
Très performants sur le plan thermique et acoustique grâce à l’utilisation notamment du béton de chanvre, du pisé ou de la paille, les modules fabriqués en circuit court dans son usine de La Magdelaine-sur-Tarn permettent à ModuleM de construire « des équipements sportifs, des écoles, des maisons médicales, des crèches, des bureaux, des Ehpad et même des crématoriums », détaille le chef d’entreprise. Des bâtiments de 2 000 à 3000 m2 de surface et d’une hauteur jusqu’à R+3. Et d’ajouter : « Même si nous sommes régulièrement sollicités, nous étions jusqu’à présent moins actifs sur le logement. Et pour cause : en Occitanie, les prix du bâtiment étant parmi les plus bas, il était difficile pour nous de rester compétitifs, compte tenu des coûts de transport et de grutage ».
Avec la forte hausse des coûts de construction dans le traditionnel, le patron de ModuleM pense qu’il a désormais « une carte à jouer ». Du reste, assure-t-il « le hors site, qui, à une époque, pouvait faire peur, est aujourd’hui considéré comme très qualitatif ». Alors que les premiers bâtiments construits à l’aide de ses modules ont 10 ans, il estime que le recul est suffisant pour « lever les freins ».
Un agrandissement de ses locaux
Depuis 2024, ModuleM a donc décidé de se positionner sur le marché du logement social, avec « une offre pertinente ». Et même s’il ne va pas se passer grand chose sur ce terrain cette année en raison des prochaines élections municipales, le dirigeant veut mettre à profit les mois qui viennent pour « préparer et valider des prototypes, et être prêt quand le marché va repartir ».
Le partenariat avec Zen Modular permet donc au Haut-Garonnais d’élargir sa gamme de produits : depuis le bâtiment tertiaire, en passant par le logement social avec des pièces sur mesure adaptées à chaque projet jusqu’aux modules standardisés issus du catalogue de Zen Modular.
Pour faire face à cette demande croissante, l’entreprise, qui s’attend pour 2025 à une activité très soutenue sur le marché des collectivités, prévoit d’investir 2 M€ pour doubler la surface de ses locaux à La Magdelaine-sur-Tarn qui s’étendent aujourd’hui sur 5 000 m2. Régulièrement sollicitée par des maîtres d’ouvrage de la région parisienne, elle envisage également la création d’une deuxième usine sur place. Elle attend pour cela la concrétisation d’un gros projet d’Ehpad aujourd’hui en stand-by.