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Dans le Tarn, l’atelier Missègle franchit la barre des 10 M€ de chiffre d’affaires

Success story. Depuis 1983, Myriam Joly produit des vêtements et linge de maison à base de laine et fibres naturelles. Portée par l’engouement pour le made in France, l’entreprise connaît une croissance continue, à rebours des difficultés que traverse le secteur du textile depuis quelques années.

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Photo de l'atelier Misségle
L’atelier Misségle, fort de 55 salariés, produit 400 000 paires de chaussettes par an en plus de ses autres produits. La société a passé le cap des 10 M€ de chiffre d’affaires en 2023. (© Ester Joly)

Concurrencée par les importations à bas coûts des pays étrangers et notamment de la Chine, l’industrie française du textile subit une crise depuis maintenant plusieurs années. Selon l’Union des Industries Textiles, en 2021 la filière comptait 2 164 entreprises, dont 85 % de PME. Elle générait 14 Mds€ de chiffre d’affaires (75 % à l’export) et employait plus de 62 500 personnes. Pourtant, le « made in France » - qui ne représente que 3 % des achats de vêtements en France d’après la Fédération indépendante du made in France (FIMIF) - compte quelques pépites qui font mieux que résister.

Parmi elles, Missègle, une entreprise tarnaise qui a su tirer son épingle du jeu. Créé en 1983 par Myriam Joly alors ingénieur en agronome, l’atelier Missègle est l’une des rares entreprises de l’industrie textile française à perdurer et à voir son activité augmenter au fil des ans.

À l’époque, Myriam Joly produit du mohair grâce à un élevage de chèvres angora qu’elle a importées du Texas et fait fabriquer chaussettes et pulls par des ateliers aux alentours. Entre 2007 et 2013, l’auto entrepreneuse reprend deux ateliers de tricotage et emploie 30 personnes. En 2012, ses deux fils aînés Olivier et Gaëtan la rejoignent dans l’atelier situé à Burlas dans le Tarn. Quatre ans plus tard, l’atelier reçoit le label Entreprise du Patrimoine Vivant qui récompense « les fabricants attachés à la haute performance de leur métier et de leurs produits ».

Aujourd’hui l’entreprise a grandi et fabrique différents produits : des collants aux étoles en passant par des sous-vêtements, des chemises, des pantoufles, des tapis ou encore des matelas. Des produits vendus à 80 % sous sa marque, en direct via son site internet. 20 % de la production sont réalisés pour le compte des marques locales « avec lesquelles nous nous sentons en adéquation, telles que les Laines Paysannes », indique Marie Rueda, responsable communication de l’atelier Missègle.

Un boom d’activité grâce au covid

C’est en 2020 que l’activité de l’atelier explose et franchit le cap des 5 M€ de chiffre d’affaires. « À l’annonce du covid, je me suis dit qu’il fallait être utile. Nous avons donc commencé à confectionner des masques. Ça a créé un réel engouement aussi bien parmi les employés qu’au sein de la clientèle », explique la gérante.

Missègle, qui emploie aujourd’hui une cinquantaine de personnes, privilégie les matières nobles, toutes issues de fibres naturelles. Parmi elles, le duvet de yack que Myriam Joly achète à des producteurs d’Asie centrale. Les autres matières comme le lin ou le chanvre, sont en majorité produites en France et l’intégralité du coton et du fil d’Écosse est labellisée « GOT S », un label qui certifie des conditions de travail dignes, le respect de l’environnement et de la santé des consommateurs. Un choix de matières en accord avec l’engagement environnemental de l’entreprise qui n’utilise que des emballages recyclables.

L’autre préoccupation de Myriam Joly est l’emploi dans un département où, malgré les crises successives, la filière textile est encore bien présente. Selon l’Union des industries textiles Sud, on compte 219 entreprises textiles en Occitanie (3 900 salariés), dont 53 ont leur siège dans le Tarn (chiffres de 2022). Pour attirer et fidéliser ses salariés, Missègle distribue des primes de participation aux bénéfices. La transmission des savoir-faire est aussi une donnée importante pour l’entreprise qui a créé, en mars 2022, un centre de formations baptisé « M L’école » qui dispense des formations de tri du mohair, de couture et de tricot.

Un centre de formation pour faire perdurer le savoir faire

Alors que beaucoup d’entreprises textile n’ont pas su ou pu rebondir après la production de masque à très grande échelle pendant la crise sanitaire, Missègle a continué de surfer sur cette bonne dynamique. En 2023, la société a réalisé 10 M€ de chiffre d’affaires contre 4 M€ en 2018. Une évolution dont se réjouit Myriame Joly, même si elle « ne sais pas expliquer les raisons derrière cette croissance qui ne s’arrête pas. »

Pour faire face à la hausse des commandes, les gérants ont investi en 2021 près de 1 M€ pour agrandir leur atelier de 1 500 mètres carrés et prévoient de recruter de nouveaux collaborateurs. L’entreprise tarnaise investit également pour d’autres acteurs. En effet, la famille a créé un fond de dotation pour aider des producteurs de laine de yack basés en Mongolie avec qui l’atelier travaille.