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Economie : le retour de la croissance

Relance. Les branches professionnelles sont résolument prêtes à relever des défis malgré les effets de la crise sanitaire qui persistent.

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Pierre-Olivier Nau (au centre), président du Medef 31 entouré des représentants des branches professionnelles lors du lancement du Top
Éco Occitanie.
Jennifer Legeron

Le lancement de la 33e édition du Top Éco Occitanie le 9 septembre à la cité de l’Espace a été l’occasion de dresser le bilan économique régional au sortir de la crise. Après l’afflux des aides de l’État et de la Région pour soutenir les secteurs durement affectés, quels sont encore les freins à une relance efficiente ? La crise a-t-elle bouleversé le classement des 1500 entreprises recensées dans l’annuaire ?

Selon le syndicat patronal, les chiffres d’affaires des entreprises ont globalement diminué de 10 % en 2020, mais « ce chiffre cache de fortes disparités. Si certains secteurs ont été très touchés comme l’aéronautique ou encore le tourisme et la restauration qui continuent de souffrir, d’autres ont su tirer leur épingle du jeu. Et malgré « la fin du quoi qu’il en coûte », il faut continuer à accompagner ces secteurs qui restent à la peine », commente en ouverture Pierre-Olivier Nau à la tête du Medef 31.

Le défi de la main d’oeuvre

Le président du réseau d’entrepreneurs et les représentants des branches professionnelles disent désormais entrevoir un horizon plus dégagé. Un optimisme appuyé par les indicateurs de l’Insee qui annonce une croissance de 6 % en 2021. Cependant, des difficultés viennent entraver une reprise sur les chapeaux de roue comme le rappelle Pierre-Olivier Nau. « Des difficultés persistent encore avec des pénuries de composants dans le secteur industriel et des interrogations qui subsistent avec la Chine, lesquelles pointent la question de la souveraineté et de l’attractivité du territoire. Il y a aussi des pénuries de matières premières conjuguées à la hausse de leur coût notamment dans le secteur du bâtiment. »

« Dans l’aéronautique, les carnets de commandes se remplissent à nouveau pour les sept prochaines années »

Autre point noir partagé par l’ensemble des branches professionnelles : le manque de main-d’oeuvre et, par conséquent, l’attractivité des métiers. « 500 00 emplois ont été créés en France au premier semestre. D’ailleurs, Pole emploi affichait récemment 1,2 million d’offres dont 60% de CDI ce qui en soi est encourageant car les entreprises ont besoin de main-d’oeuvre pour redémarrer. Cependant se pose clairement la question de l’attachement des salariés à reprendre une activité et donc, par voie de conséquence, la question de la culture de l’entreprise et de l’innovation managériale, avec le télétravail qui s’est renforcé. Ces difficultés de recrutement questionnent sur la nécessité d’une réforme de l’assurance chômage qui doit être une priorité avec le dossier des retraites. Le chômage doit devenir une solution moins attractive que l’emploi et les salariés doivent retrouver l’envie de reprendre le chemin du travail. Sans oublier le refus du pass sanitaire qui concerne entre 5 et 10% des salariés », poursuit-il.

Une reprise en douceur

Un retour à la normale amorcé donc mais pas encore gagné. Ainsi, sans surprise, le secteur industriel a payé un lourd tribut à la crise avec un CA en baisse de 16 %. En tête de liste, l’aéronautique, comprenant la chaîne d’approvisionnement et les métiers de conseil associés, fer de lance de l’Occitanie, connaît la plus forte dégradation avec un recul de 34 %, tandis que la branche automobile semble avoir été épargnée avec 5 % de perte d’activité. Cependant les prévisions 2021 pour l’ensemble du secteur industriel font état d’une progression de 7 % d’activité. D’ailleurs, Bruno Bergoend, chef d’orchestre de l’UIMM MPOccitanie, se dit « raisonnablement optimiste » face à l’avenir économique régional et pointe les signes positifs.

« Dans l’aéronautique, les carnets de commandes se remplissent à nouveau pour les sept prochaines années. La transition énergétique va générer, notamment grâce à l’hydrogène, de nouveaux concepts d’avions d’ici 2025 qui seront mis sur le marché d’ici 2035. » De son côté, l’ingénierie représentée par la Fédération Syntec, qui regroupe 6000 entreprises soit 83000 salariés en Occitanie et qui a accusé une perte de CA de 11% en 2020, reprend doucement des couleurs. En effet, le premier trimestre voit l’activité augmenter de plus de 25% et les marchés publics sont en hausse de 17 % par rapport au dernier trimestre 2020. Une augmentation qui confirme une tendance bien enclenchée en fin d’année 2020.

L’ingénierie aux avant-postes

La relance de l’ingénierie, qui se positionne ainsi aux avant-postes de nombreuses activités, devrait bénéficier aux secteurs industriels, notamment à la construction qui a connu une hausse de 49% des appels d’offres au premier trimestre. « Tous les secteurs tendent à la hausse vers le niveau de référence de 2019. Nous notons des prises de commandes en progression dans tous les secteurs hormis l’automobile et l’aéronautique. Si les perspectives s’améliorent, l’activité de l’industrie tourne toutefois encore au ralenti. Seulement un quart des ingénieries ont des équipes occupées à 100% », relève Philippe Frey.

« Durant la crise, sans le numérique, on n’aurait pas pu travailler. La croissance se fait là-dessus »

De fait, les entreprises d’ingénierie occitanes listent huit propositions en vue de dynamiser l’activité économique. Parmi ces axes stratégiques figurent la formation, l’innovation et l’attractivité du territoire, le développement du principe « région off-shore », la modélisation de nouveaux bassins d’emploi ou encore le développement de dispositifs de reconversion et d’accompagnement aux mutations. Car nombre de défis attendent les entreprises d’ingénierie à l’horizon 2030, qui devront travailler de concert avec les donneurs d’ordres : décarboner la production d’énergie, mettre la transition au coeur des politiques de mobilité, préserver les capacités d’innovation ou encore accélérer la rénovation énergétique des bâtiments. Et la liste n’est pas exhaustive.

Un optimisme nuancé pour le BTP

Le BTP qui, lui, regroupe 35000 salariés en région, soit 14000 entreprises, reste dynamique mais affiche aussi un optimisme nuancé. Comme le détaille Émile Noyer, le président de la Fédération du BTP de Haute-Garonne, « les surfaces démarrées en hors logements soit 561 000 m2 en Haute- Garonne, contre 880 790 en Gironde, sont notamment portées par les bâtiments agricoles (117 000 m2) et les bureaux (131 000 m2). Et puis, si la construction de maisons individuelles est la seule à connaître un boom avec une augmentation de 43%, ce chiffre s’apprête à diminuer en 2022 à cause de l’annulation du plan local d’urbanisme intercommunal de l’habitat de Toulouse Métropole. »

Le marché de la rénovation, quant à lui, est aussi pour beaucoup dans la relance du secteur avec +10 % de croissance, notamment accéléré par le dispositif Ma Prim Rénov (à savoir 4 000 dossiers retenus en Haute-Garonne sur les six derniers mois) et le plan de relance qui totalise 318 projets de travaux pour un montant de 242,2 M€ à l’échelle départementale.
Quant aux travaux publics, si les appels d’offres TP de janvier à juin 2021 ont bondi de 91% par rapport à 2020, le niveau reste toutefois en deçà des années précédentes, sans oublier le prix des matières premières qui flambe avec une nouvelle hausse de 15% pour les produits manufacturés en cette rentrée. Les salariés sont également une denrée rare alors que le secteur a plus que jamais besoin de recruter avec 4 500 postes à pourvoir.

Le secteur du numérique, lui, est finalement le plus serein face aux défis de l’après crise. Malgré une reprise à deux vitesses, les prévisions sont encourageantes pour les ESN, les éditeurs et les sociétés de conseil, avec 4,5 % de croissance pour 2021, un secteur qui a su résolument rebondir. « Durant la crise, sans le numérique, on n’aurait pas pu travailler. La croissance se fait là-dessus », conclut Frédéric Honnorat du Syntec numérique. Son ambition est d’aller chercher des marchés à l’international mais aussi que le secteur devienne l’équivalent de la « Silicon Valley » française.