Entreprises

Experts-comptables, « les essentiels de l’économie »

Expertise comptable. Le congrès national des experts-comptables, qui s’est tenu du 6 au 8 octobre à Bordeaux, a été l’occasion de réaffirmer, plus que jamais – et après un an et demi de crise – qu’ils sont des acteurs majeurs et vitaux pour l’économie française.

Lecture 10 min
4500 professionnels ont fait le déplacement à Bordeaux. DR

Placé sous le thème « essentiel » de la relance, le 76e congrès de la profession comptable, a été incontestablement une réussite tant au niveau de l’organisation imparable que de la qualité des intervenants. Des personnalités aussi emblématiques que le symbole de la distribution moins chère Michel-Édouard Leclerc, l’ancien ministre de l’Économie Michel Sapin, l’ancien président de la République Nicolas Sarkozy ou encore l’animateur télé ès immobilier Stéphane Plaza se sont succédé pour décliner leur vision de l’économie.

Plus de 4 500 professionnels avaient fait le déplacement à Bordeaux quand 1000 ont suivi le congrès en distanciel. « C’est le plus grand congrès que nous ayons organisé en province et celui qui a généré le plus gros chiffre d’affaires », a précisé le président du Conseil supérieur de l’Ordre des experts-comptables (CSOEC) Lionel Canesi.

Préparer positivement le monde d’après

Pour cause de crise sanitaire le congrès n’ayant pas eu lieu en 2020, le congrès 2021 était particulièrement attendu, aussi du fait d’une envie forte des professionnels de France de se retrouver physiquement, après un an et demi de pause forcée. Prévention des difficultés des entreprises, défi numérique, développement durable et sociétal… Durant trois jours, les professionnels, mais également des représentants du monde économique, se sont saisis de ces thématiques à l’occasion de plénières, d’ateliers et d’animations innovantes (Start zone, Cabinet de demain, Studio Fuz’experts…).

Faire remonter les dysfonctionnements au gouvernement

Pour Lionel Canesi, l’objectif de ce congrès a été largement atteint : les professionnels ont parlé haut et fort à leur environnement, au monde économique et ont réaffirmé leur rôle plus que jamais majeur dans l’économie française. « On nous croyait bientôt détruits par l’ubérisation, cette crise a au contraire démontré toute notre utilité », a déclaré le président du CSOEC.

Lionel Canesi : « On nous croyait bientôt détruits par l’ubérisation, cette crise a, au contraire, démontré toute notre utilité »

Quand on lui demande s’il n’est pas un peu triste qu’il ait fallu une crise pour démontrer leur utilité, Lionel Canesi répond lucide et fataliste : « C’est comme ça, les experts-comptables se sont révélés dans la tempête car il faut se souvenir que l’on était en pleine déflagration lors du premier confinement. Nous avons agi dans l’urgence pour sauver des entreprises, nous avons rassuré nombre d’hommes et de femmes ». Voyant le verre à moitié plein, le président a rappelé aussi le rôle qu’ont joué les experts-comptables pour faire remonter les dysfonctionnements au gouvernement de certaines mesures telles que le casse-tête des premiers fonds de solidarité.

« Ce qu’il faut retenir aussi, c’est que c’est le premier congrès où l’on n’a pas simplement parlé de nous mais où l’on a parlé aussi et surtout de nos clients, les entreprises », souligne le président Canesi pour mieux affirmer le rôle tant sociétal que psychologique joué par les experts-comptables. Le congrès a ainsi été marqué par un échange fructueux, cordial et franc entre le président du CSOEC et le président de la Compagnie nationale des commissaires aux comptes (CNCC), Yannick Ollivier.

Dialogue au CAC

« Avec les commissaires aux comptes (CAC), on ne se marche pas dessus. Notre objectif reste d’augmenter le chiffre d’affaires global des professions », explique Lionel Canesi, lui-même également commissaire aux comptes. « La loi Pacte a été un venin, le relèvement des seuils n’avait aucun sens et nous avons bien sûr perdu des mandats mais deux ans après l’adoption de la loi Pacte, je peux dire que les chiffres d’affaires sont en légère croissance », indique Yannick Ollivier. Pour mémoire, la profession de commissaire aux comptes a été mise à mal par le relèvement des seuils d’intervention, dont les effets sur l’activité commencent à se faire sentir.

Yannick Ollivier souhaite que les missions des CAC évoluent pour répondre de façon plus pertinente aux besoins des entreprises et en particulier de celles pour qui le commissariat aux comptes est devenu facultatif. Ces évolutions s’articulent autour de propositions de la Compagnie nationale pour « renforcer le positionnement particulier de l’auditeur à la frontière du droit et de l’économie, qui garantit la confiance dans les informations communiquées par les entreprises et alerte sur les risques. »

En somme, cette loi Pacte a contraint les professionnels à clarifier leurs missions dans les TPE-PME. « Les CAC ne sont pas là pour faire du conseil », a lancé le président de la CNCC quand le président du CSOEC a rétorqué : « Le conseil c’est nous ». Voilà qui est clair et qui éclaire sur les rôles distincts des experts-comptables et des CAC. Face à ces mutations irréversibles, les professionnels se projettent déjà dans l’économie de demain. Et l’économie d’aujourd’hui et de demain, c’est le plan de relance dans lequel les experts-comptables prennent toute leur part.

Pour une exonération des heures supplémentaires

Le congrès a été clôturé en présence d’Alain Griset, secrétaire d’État chargé des TPE-PME venu dérouler son plan pour les indépendants que le président Macron avait annoncé il y a quelques semaines. « Ce plan est un signe de reconnaissance que la Nation veut adresser aux entrepreneurs », a affirmé le ministre. À cet égard, Lionel Canesi a rappelé que plusieurs mesures de ce texte de loi ont été portées par le CSOEC, comme l’amortissement fiscal du fonds de commerce ou le statut unique de l’entrepreneur.

Les professionnels ont d’ailleurs enfoncé le clou en remettant au ministre un livre blanc énumérant de nouvelles propositions pour relancer l’économie française, des pistes déclinées en sept chapitres parmi lesquels : le financement des entreprises, la relance de la consommation, l’investissement, la liberté de choix du statut social et aussi l’exonération des heures supplémentaires…

Un souvenir des années Sarkozy qui avait fait ses preuves. « Les mesures qui marchent sont simples et l’exonération des heures supplémentaires avait fonctionné », souligne Lionel Canesi. Cette proposition sur les heures supplémentaires est aussi un moyen de pallier les difficultés structurelles de recrutement qui se posent plus que jamais dans divers secteurs de l’économie y compris chez les experts-comptables eux-mêmes. « Quand on travaille avec les économistes de Bercy, nous les économistes du quotidien, nous pouvons faire de grandes choses », s’est enthousiasmé le président du CSOEC considérant haut et fort les experts-comptables comme les « essentiels de l’économie ». Le prochain congrès aura lieu à Paris du 28 au 30 septembre 2022.