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Immobilier d’entreprise : le marché se tend

Immobilier. Les professionnels du secteur ont fait un point le 20 juillet sur les chiffres du premier semestre dans l’agglomération.

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Airbus Protect
Airbus Protect a pris en location 5500 m2 dans un immeuble à construire à Blagnac, dans la Zone du Grand Noble. (Crédit : DR)

« Pas d’euphorie mais pas de pessimisme non plus », ce pourrait être le leitmotiv des professionnels de l’immobilier d’entreprise de l’agglomération toulousaine. Alors qu’ils étaient réunis le 20 juillet à l’initiative de Jean Bergougnan, président de l’Observatoire toulousain de l’immobilier d’entreprise (OTIE) dans les locaux de la CCI, rue Alsace Lorraine à Toulouse, ce dernier a dressé un bilan d’activité pour les trois mois qui viennent de s’écouler.

Bonne performance du marché de bureaux

La demande placée de bureaux atteint 28670m2 ce trimestre, « ce qui nous place en retrait par rapport au 2e trimestre 2022 (36 540 m2), mais en progression par rapport à la moyenne quinquennale. Le neuf représente plus du tiers des surfaces commercialisées, soit 10 390 m2, avec un retour des ventes en l’état futur d’achèvement (VEFA), à l’image de l’importante transaction signée par Airbus Protect, qui a pris en location 5 500 m2 dans un immeuble à construire à Blagnac, dans la Zone du Grand Noble ».

Sur les 46 transactions opérées durant ce trimestre, sept ont porté sur des bureaux neufs. « La part du neuf remonte par rapport au trimestre précédent, mais nous devons faire un travail sur ce point », précise Jean Bergougnan, également à la tête de l’agence toulousaine de Cushman & Wakefield.

Le marché des bureaux est porté par les grandes transactions : 66% portent sur des surfaces supérieures à 1 000 m2, la surface moyenne des transactions s’établissant à 623 m2 ce trimestre contre près de 400 m2 habituellement. « C’est une excellente nouvelle. Dans le même temps, on constate une baisse significative des transactions entre 500 et 1 000m2, qui traditionnellement illustrent, par la prise à bail, le dynamisme du tissu des PME/TPE. De fait, le marché des petites entreprises marque le pas : entre le deuxième trimestre 2022 et le deuxième trimestre 2023, le volume de transaction, dans cette typologie de bien a été quasiment divisé par trois. » Labège concentre une bonne part des surfaces transactées, soit 6 100 m2, devant le Grand Noble à Blagnac (5 500 m2) et Balma Gramont (4 100 m2).

Il faut y voir, selon Jean Bergougnan, l’effet de « la vitalité du secteur aéronautique. Elle s’est confirmée pour l’avionneur européen lors du salon du Bourget, et a d’ores et déjà des retombées sur la demande en immobilier d’entreprise. Mais le marché a également profité de la dynamique des autres filières industrielles : mobilités du futur, santé, innovation recherche ou encore la formation. »

Au deuxième trimestre 2023, le stock de bureaux progresse légèrement à 179 500 m2 (+2%), avec un taux de vacance de 3,7% « sans doute l’un des plus bas de France », commente le président de l’OTIE. À noter la légère progression du stock neuf à 21 500m2. « Hors neuf, le stock de bureaux atteint 158 000 m2, soit peu ou prou l’équivalent d’un an de transactions. C’est un indicateur : l’absence de biens disponibles ne nous permet pas de répondre aux demandes d’entreprises qui ont des besoins immédiats ni de les projeter sur des opérations en VEFA, qui dans le contexte actuel de hausse des coûts de construction, de hausse des loyers et de hausse des taux, sont très difficiles à boucler, sachant que par ailleurs, beaucoup d’entreprises ont du mal à se projeter par manque de visibilité. »

Parmi les grandes transactions réalisées ce trimestre on peut citer, outre Airbus Protect, les 2 455 m2 transactés au profit de Toulouse Métropole sur l’immeuble Brigdeview à Basso Cambo, les 1 616 m2 pris par Fortil à La Plaine, dans une opération de rénovation, les 2000 m2 d’Eurecia au Copernic à Labège. L’essentiel du stock de bureaux disponibles se situe dans le nord-ouest de l’agglomération (88 000 m2), laissant craindre des risques de tensions dans les secteurs sud-ouest, est et sud-est pour satisfaire les besoins compte tenu de stocks « faméliques ».

Locaux d’activité et entrepôts, les tensions empirent

Les deux segments de marché se sont « bien comportés » durant le dernier trimestre, selon Jean Bergougnan : la demande placée globale atteint 46 490 m2, soit le niveau de la moyenne quinquennale. Si la logistique reste active, elle ne représente que trois transactions sur le trimestre dont deux supérieures à 50 000 m2.

De fait, le marché est essentiellement porté par les locaux d’activité (29 transactions dont quatre supérieures à 2 000 m2) au profit d’entreprises de l’aéronautique, la construction, la santé, l’énergie et l’environnement. Le second main représente la majeure partie des opérations (31 530m2), les grandes surfaces concentrant l’essentiel du marché. On peut citer parmi celles-ci, les 9 000 m2 occupés par Cargo à Tournefeuille, les 5 800 m2 d’Hémodia dans la Zone de Thibaud, les 3 500 m2 de Cegelec sur le parc aéronautique et les 3 300 m2 pris par Cellulopack à Campsas en Tarn-et- Garonne. Conséquence de la bonne dynamique du marché, et faute de renouvellement de l’offre, le stock de locaux d’activité et d’entrepôts diminue.

Il atteint 147 500 m2, « soit un niveau historiquement bas ». L’offre disponible se focalise dans le nord ouest de l’agglomération, le manque criant d’offres dans l’est et le sud-est ne permettant pas de répondre à la demande de certains clients. « On se heurte parfois à des collectivités qui ne sont pas toujours enclines à accueillir ce type de projet, pointe le président de l’OTIE, en complète contradiction avec la volonté affichée de réindustrialiser le territoire. » Le professionnel met en garde contre une tension de plus en plus prégnante. « Avec un taux de vacance de seulement 2,2%, la situation tendue que l’on évoque depuis des années continue de s’accentuer. Nous sommes largement à moins d’un an de stock. »

Sonner l’alarme

Plus globalement, le professionnel constate que si les grandes transactions tirent le marché, « les prises de décision des grands comptes s’allongent face au contexte économique et à l’évolution des organisations du travail. Notamment le calibrage des besoins est plus complexe avec la donne du télétravail qui n’est pas encore complément stabilisée ».

Si l’attractivité toulousaine et ses fondamentaux doivent permettre de maintenir le cap pour l’année 2023, « le marché de l’investissement est grippé ici comme sur les autres marchés, ce qui a pour effet de ralentir voir de stopper la production de nouveaux programmes en particulier en VEFA. Or depuis plusieurs trimestres consécutifs, le marché souffre d’un manque d’offres, d’une construction atone et les gisements potentiels liés à des rénovations restructurations lourdes sont encore insuffisants pour créer de nouvelles opportunités ce qui devrait pénaliser certains segments de marché : les bureaux en centre-ville comme toute la chaîne logistique. En fin, la question foncière devient prégnante pour répondre au développement des activités productives à court et moyen terme. » En clair, le professionnel évoque un risque pour la métropole de voir certaines activités productives partir s’installer ailleurs où les disponibilités sont plus importantes.