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Latécoère annonce une nouvelle augmentation de capital de plus de 108 M€

Industrie. Alors qu’il enregistre une importante croissance de son chiffre d’affaires, le sous-traitant aéronautique toulousain, fortement endetté, veut se doter d’une base solide pour tirer parti de la reprise du secteur.

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Cette nouvelle augmentation de capital doit doter Latécoère d’une structure de capital solide lui permettant de continuer à servir ses clients face à la montée en cadence du secteur aéronautique (©Arnaud Spani).

La recapitalisation annoncée en mai dernier par Latécoère prend forme. L’équipementier aéronautique, partenaire de rang 1 des grands constructeurs (Airbus, BAE Systems, Boeing, Bombardier, Dassault Aviation, Embraer, Honda Aircraft Company, Lockheed Martin, Raytheon Technologies, Thales), a en effet dévoilé le 31 octobre les contours d’une nouvelle augmentation de capital de 108,2 M€ auprès de son actionnaire majoritaire, Searchlight Capital Partners, montant qui pourrait être porté à 124,4 M€.

Elle fait suite au protocole de conciliation conclu entre la société et la majorité de ses créanciers financiers le 9 juin dernier et homologué dans le cadre d’une procédure de conciliation par le tribunal de commerce de Toulouse le 16 juin dernier. Ce protocole de conciliation visait à garantir à Latécoère, endetté à hauteur de 370,3 M€ à fin juin 2023, « une structure de capital solide » pour faire face à la montée en cadence de l’industrie aéronautique.

Cet accord de recapitalisation d’un montant de 283 M€ incluait de fait l’effacement de 183 M€ de prêts garantis par l’État (PGE), cette réduction de la dette financière ayant été posée par l’actionnaire américain comme une condition préalable à la réalisation de cette nouvelle augmentation de capital, selon Les Echos.

Concentrer la production dans les pays à bas coûts

En juin, Thierry Mootz, président et directeur général du groupe Latécoère, réaffirmait sa vision industrielle, à savoir : « maintenir notre centre de décision à Toulouse, consolider nos activités à valeur ajoutée dans la région toulousaine, et continuer à investir dans notre présence opérationnelle mondiale. »

De fait, si le produit de cette augmentation de capital de 108,2 M€ doit permettre à Latécoère de rembourser un prêt-relais qui lui a été consenti pour près de 47 M€, il doit aussi et surtout lui permettre de financer la « reconfiguration » de ses activités industrielles, commencée en 2022, notamment aux États-Unis et en France, sur le site de Montredon à Toulouse, l’objectif étant de concentrer un peu plus la production « dans les pays où les coûts sont les plus bas et la réalisation d’économies d’échelle accrues », indique le groupe dans un communiqué. Lequel précise également :

Ces mesures amélioreront les coûts d’exploitation du groupe, ce qui permettra à Latécoère de mieux tirer parti de la reprise en cours de l’industrie aéronautique et de rétablir sa rentabilité au cours des prochaines années ».

Latécoère avait annoncé en début d’année 2023, sa volonté de délocaliser une partie au moins de ses activités d’usinage du site de Montredon (inauguré en 2018) vers le Mexique et la République tchèque, le groupe souhaitant se concentrer sur « les activités à forte valeur ajoutée » sur son site toulousain, converti en « centre de solutions et services, et de développement ».

En septembre, Latécoère a annoncé ainsi l’ouverture de son centre de développement composites (CDC), implanté dans le quartier de Montredon à Toulouse, à quelques kilomètres du siège du groupe qui abrite le bureau d’études Aérostructures. La vocation du CDC est à la fois de fabriquer des pièces composites dans le cadre des activités de Recherche et Technologie (pour les futurs programmes), tout en travaillant à leur industrialisation automatisée dans les usines du groupe.

Creusement des pertes

Cette augmentation de capital s’opère alors que l’équipementier a enregistré, au premier semestre 2023, une forte croissance de son chiffre d’affaires, de l’ordre de 42,9%, à 303,8 M€, reflétant à la fois les montées en cadence de production et les acquisitions récentes (dont Avcorp et Malaga Aerospace Defense et Electronics Systems en 2022).

L’équipementier a également signé d’importants contrats au cours du premier semestre : avec Boeing pour la fourniture de systèmes de câblage pour les programmes 737 MAX et 767, mais aussi Airbus pour la porte d’aile supérieure de l’A321 ou encore HondaJet pour la conception et la construction de ses portes d’accès pour passagers. Le groupe a, par ailleurs, annoncé le mois dernier la signature d’un accord avec Deutsche Aircraft pour la fourniture des portes de son avion régional à turbopropulseur de 40 places D328eco.

Malgré ses bons résultats commerciaux, le groupe toulousain voit cependant son résultat net se dégrader. Latécoère a en effet enregistré une perte de 58,2 M€ sur les six premiers mois de l’année 2023, contre -27,3 M€ un an auparavant. En septembre, au moment de la publication de ces résultats semestriels, Thierry Mootz expliquait :

Le premier semestre 2023 a été une période exigeante pour Latécoère. Un certain nombre de succès ont été enregistrés, l’intégration rapide des activités nouvellement acquises ayant produit des résultats positifs solides en termes de trésorerie et d’EBITDA et la signature d’un accord de recapitalisation contraignant avec nos actionnaires et nos prêteurs qui sera finalisé au quatrième trimestre 2023. Bien que les revenus augmentent, nous opérons dans un environnement difficile. D’importants vents contraires proviennent d’une performance défaillante de certains de nos fournisseurs, d’une inflation plus élevée sur les coûts de l’énergie, des matières premières et de la main-d’œuvre, ce qui a eu un impact sur la performance financière du groupe au premier semestre 2023. Nous nous attendons à ce que la situation s’améliore au second semestre et nous prenons les mesures nécessaires pour améliorer notre situation opérationnelle et financière ».

Depuis octobre, un directeur général a été nommé au sein de la gouvernance de Latécoère en la personne de Greg Huttner qui était depuis août 2021 directeur général délégué du groupe. Thierry Mootz, qui occupait les fonctions de président du conseil d’administration et de directeur général, continue d’exercer les fonctions de président non exécutif du conseil d’administration.
Le groupe employait au 31 décembre dernier, près de 6000 personnes dans 14 pays, pour un chiffre d’affaires annuel de 468,3 M€ en 2022.