Le corpoworking, pour qui ?
Télétravail. À l’occasion de sa convention régionale annuelle, Action Logement Occitanie a annoncé la création d’un réseau d’espaces de corpoworking. Explications de Michaël Pinault, membre du comité régional d’Action Logement Occitanie.
Qu’est-ce qui distingue le corpoworking d’un espace de coworking ?
Ce sont deux concepts différents même si le corpoworking est une forme d’espace de travail partagé. C’est un tiers lieu qui va regrouper le salarié et son entreprise, dans le sens où celle-ci est réellement partie prenante du projet. Le concept a été développé en région par Action Logement, organisme géré par les partenaires sociaux, ce qui permet d’envisager la question du télétravail dans le cadre du dialogue social, avec d’un côté les attentes et les contraintes des entreprises et de l’autre celles des salariés.
Nous avons une démarche disruptive, l’idée étant de rapprocher le lieu de travail du lieu d’habitation du salarié et non l’inverse. Sur cette base, nous avons imaginé ces lieux de corpoworking : des espaces de télétravail coconstruits avec les entreprises concernées et leurs salariés, des lieux positionnés en périphérie, aux quatre points cardinaux de la métropole. Aujourd’hui, Toulouse nous sert de laboratoire mais nous espérons essaimer le concept sur l’ensemble du territoire.
Comment se fait le choix des lieux d’implantation ?
Nous nous sommes entourés de partenaires, notamment de grandes entreprises intéressées par la démarche et nous étudions les flux, à savoir 57 000 trajets domicile-travail. Cela va nous permettre de positionner les futurs espaces de télétravail, l’objectif étant que le collaborateur puisse y travailler deux ou trois jours par semaine.
À quels enjeux entendez-vous ainsi répondre ?
Au-delà de l’enjeu environnemental – puisque cela permet de limiter les déplacements pendulaires et de diminuer l’empreinte carbone des salariés, nous souhaitons désengorger les flux des métropoles. Alors que le concept est né un an avant la Covid, nous constatons par ailleurs, qu’il répond à un réel besoin. Face au développement massif du télétravail, on se rend en effet bien compte qu’il n’est pas socialement juste de faire reposer le cadre de travail sur les épaules des télétravailleurs.
Le concept répond ainsi à une demande des entreprises qui, même si elles constatent que les salariés apprécient de ne pas avoir à se déplacer sur leur lieu de travail, se posent la question du maintien du lien social ainsi que du lien avec l’entreprise, qui pendant la crise s’est également distendu.
Comment avez-vous procédé ?
Pendant un an, nous avons réfléchi et mené des groupes de travail avec des salariés et des directions d’entreprise afin d’imaginer le meilleur cahier des charges en vue de labelliser ces espaces de corpoworking. Les entreprises formulent en effet un certain nombre d’exigences : en matière de cadre de travail, de sécurité informatique, d’offre de services, etc. Sur la base de ce cahier des charges, nous allons ainsi pouvoir labelliser des espaces dans lesquels les entreprises pourront réserver des postes de travail.
Ensuite, tout dépendra des négociations entre salariés et entreprises, l’idée étant d’intégrer cette offre de corpoworking dans les accords de télétravail. Ce réseau de lieux de corpoworking va ainsi mobiliser, au-delà d’Action Logement, les collectivités, notamment la Région, qui réfléchit à la manière dont peuvent être redéployés les flux autour de la métropole, mais aussi d’autres partenaires, notamment les structures qui vont animer ces espaces. Nous n’avons pas en effet vocation à les gérer nous-mêmes.
De fait, comment va s’articuler l’offre ?
Il faut imaginer un espace d’au moins 1 000 à 1 500 m2 offrant une centaine de postes de travail, ainsi que des services, sachant que 30% des postes pourront être réservés à des indépendants, des professionnels libéraux, etc. afin de garantir l’équilibre économique de l’affaire Ensuite, c’est au marché de réagir, qu’il s’agisse d’entreprises spécialisées dans la gestion de ce type d’espaces, de promoteurs, d’investisseurs ou de collectivités qui y voient également la possibilité de redynamiser leur territoire. Nous réfléchissons également à l’opportunité de fonder une foncière pour assurer le portage de projets de création d’espace de corpoworking.
Quand prévoyez-vous d’ouvrir un premier démonstrateur ?
En amont, nous sommes en train de réaliser un travail d’observation avec deux partenaires, Milan Presse et Continental. Nous étudions la manière dont s’effectue le télétravail dans ces entreprises ainsi que les besoins des salariés pour ensuite modéliser ces pratiques et les calquer sur les futurs espaces de corpoworking. Nous avons ainsi un premier projet à Gimont qui va permettre de redynamiser le tissu local. Il devrait être opérationnel en 2022. En tout, nous prévoyons de créer quatre à cinq espaces sur la métropole.