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Le groupe Senioriales accélère son développement

Logement. Le marché de la silver économie est en plein boum. Illustration avec le groupe toulousain Les Seniorales qui réalise et exploite des résidences pour les seniors autonomes dotées d’une palette de services. En 20 ans, l’enseigne a vu la demande exploser.

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La réalisation d’une résidence Senioriales représente un investissement de 12 M€ en moyenne, et la création de quatre emplois. Une résidence comprend de l’ordre de 80 logements, pour l’essentiel des T2. Ici, la résidence du boulevard de l’Embouchure à Toulouse. DR

« La décennie 2020-2030 sera celle de l’explosion des 75-84 ans. Au nombre de 4,1 millions en 2020, les « 75-84 ans » seront 6,1millions en 2030, soit une hausse vertigineuse de 2 millions de personnes : soit une croissance de +49% en à peine une décennie. Du jamais vu. Jamais. Nulle part », écrivait en mai 2021 Luc Broussy dans un rapport interministériel sur l’adaptation des logements, des villes, des mobilités et des territoires au vieillissement de la population. Le document rappelle que selon un sondage Ifop de 2019, 85 % des Français veulent vieillir chez eux.

Encore faut-il que ce « chez soi » soit adapté. « Et là, écrit encore Luc Broussy, réside probablement le grand changement des années à venir – “vivre chez soi” peut tout à fait signifier “partir de chez soi”. Partir de son “chez soi historique” pour un “nouveau chez soi”, plus adapté, plus sécurisé et somme toute plus pratique et agréable. » De quoi donner du grain à moudre à Benjamin Misery, le président directeur général de l’entreprise toulousaine Senioriales (filiale du groupe Pierre et Vacances Center Parcs depuis 2007), spécialisée dans la réalisation et la gestion de résidences seniors dotées de services.

100 résidences d’ici trois ans

L’entreprise, qui emploie 269 salariés et a réalisé 57 M€ de chiffre d’affaires sur le dernier exercice 2020-2021 (contre 65,3 M€ sur la période 2019-2020), fête cette année ses 20 ans d’existence. Et si la crise de la Covid a mis un frein à son développement, elle entend bien renouer avec la croissance dès l’an prochain, tablant sur un chiffre d’affaires de 85 M€. Pour y parvenir, elle multiplie les projets d’ouverture de nouvelles résidences. Elle compte aujourd’hui 85 résidences ouvertes dans l’Hexagone et une à La Réunion auxquelles s’ajoutent « 17 projets en cours de commercialisation et de construction pour dans trois ans passer la barre des 100 résidences », précise Benjamin Misery.

« Nous voulons reprendre les études que nous avons été obligés d’arrêter en mars 2020 »

Soit pour l’heure près de 5 400 logement s qui accueillent quelque 7000 résidents, dont 75% de personnes seules dont 90% de femmes. Alors que le secteur est devenu très concurrentiel, Senioriales entend consolider ses parts de marché sur le territoire français. « Notre ambition est de maintenir un rythme d’ouverture de six à 10 nouvelles résidences par an dont deux ou trois chaque année en Occitanie », précise le PDG qui ajoute : « Nous avons la volonté de continuer à conquérir l’ensemble des territoires où il y a des besoins et ils sont nombreux. Nous sommes assez peu présents dans le Nord-Est mais nous menons un développement très important en Île-de-France, par exemple ».

En Occitanie, Senioriales qui compte déjà 23 résidences, soit un peu moins de 2000 logements, a des projets dans les métropoles de Toulouse et Montpellier mais lorgne aussi « les capitales départementales, les agglomérations de plus de 40 000 habitants. » L’enseigne, qui a déjà une résidence à Adge, va débuter la commercialisation d’une seconde résidence dans la région agathoise. « Nous réfléchissons également à la création d’une deuxième résidence à Nîmes. Nous regardons également les opportunités à Sète, où nous ne sommes pas implantés ainsi qu’à Mèze. » Dans l’ouest de l’Occitanie, le dirigeant dit avoir six dossiers à l’étude dans la métropole toulousaine, et d’autres à Albi. « Nous sommes en veille permanente. Nos équipes de développement sont quotidiennement sur le terrain à l’affût des opportunités foncières », reconnaît Benjamin Misery.

Des développements à l’international

La croissance du groupe devrait également passer par l’international. « Nous voulons reprendre les études que nous avons été obligés d’arrêter en mars 2020, notamment en Italie du Nord autour de Milan et Turin, en Espagne et au Portugal. De fait, ce type d’offre n’existe pas en Europe du Sud et de l’Est », détaille-t-il avant de pointer « un parti pris très assumé de réaliser ces développements à destination des seniors du pays dans lequel on s’implante. Nous avons décidé de ne pas aller sur le marché du senior français qui va passer six mois au Maroc ou au Portugal. Nous ne sommes pas convaincus de la pérennité de ce modèle. »

« Désormais, nous développons une offre en milieu plus urbain, pour répondre là aussi à une véritable demande »

Dans le nord de l’Italie, Seniorales projette de gros développements « avec l’appui d’un investisseur qui se porterait acquéreur de l’ensemble », à savoir la réalisation de huit résidences sur quatre ans. « Mais on ne s’interdira pas de regarder les opportunités dans d’autres territoires. » L’entreprise poursuit en parallèle ses projets de développement dans l’océan Indien. Il prévoit le démarrage en début 2022 des travaux de construction d’une deuxième résidence à La réunion, et compte aussi un projet sur l’Île Maurice.

De nombreux changements en 20 ans

En deux décennies, l’entreprise, pionnière dans son secteur, a vu le marché fortement évoluer, se transformer. « Nous avons constaté un vrai changement il y a 10 ans. Auparavant, nous ne nous occupions que de la réalisation de ces résidences seniors et pas de la gestion directe. En 2010, nous avons créé des sociétés de gestion et d’exploitation pour devenir l’exploitant direct de nos résidences ». Une spécificité qui constitue, selon le groupe, un gage de sécurité et d’engagement. Les lieux d’implantation des résidences ont également fortement évolué pour s’adapter à la demande du marché.

Benjamin Misery, PDG des Senioriales dont le siège est installé dans le quartier de la Côte pavée. DR

« Auparavant, la clientèle favorisait l’héliotropisme, c’est-à-dire qu’elle venait globalement passer la retraite là où elle avait l’habitude de passer ses vacances. Nos résidences étaient réalisées majoritairement dans les régions du littoral et le sud. D’où une forte implantation en Occitanie ce qui fait de nous le leader dans la région en termes d’implantations. Désormais, nous développons une offre en milieu plus urbain, pour répondre là aussi à une véritable demande : des résidences près des services et des commerces pour à la fois assurer cette proximité et favoriser une inclusion dans la vie du quartier, de la cité. Nous considérons aujourd’hui que Senioriales est une solution de maintien à domicile adaptée à laquelle on a associé à la fois la vie en collectivité et une offre de services qui peut accompagner l’évolution de l’autonomie. »

Le profil des acquéreurs a connu lui aussi une évolution majeure. « Auparavant, ces résidences étaient destinées à des seniors de 65 ans de moyenne d’âge qui achetaient pour devenir propriétaires occupants. Depuis, nous avons développé d’une part l’investissement locatif en proposant nos logements à des investisseurs individuels mais aussi institutionnels ; et d’autre part une offre locative beaucoup plus importante car nous étions très fréquemment contactés par des seniors qui, ne pouvant pas acheter, souhaitaient louer et pour lesquels nous n’avions pas d’offre adéquate ».

Des projets à l’étude

Ainsi, s’il y a 10 ans, 80% des ventes étaient réalisées au profit de propriétaires occupants, la proportion aujourd’hui est inversée avec dans les projections de Senioriales 15 % de ventes à des propriétaires occupants. En 2021, ce taux est même tombé à 2 %. Les ventes à investisseurs qui représentent donc désormais l’essentiel du marché se répartissent à parts égales entre institutionnels (banques, OPCI, etc.) et particuliers « dont la moyenne d’âge est de 57 ans. Ils achètent souvent pour eux plus tard après l’avoir loué, ou pour leurs parents », précise Benjamin Misery. Le prix moyen d’un logement varie de 170 K€ en Pinel à 180 K€ en location meublée non professionnel (LMNP), mais « quel que soit le dispositif fiscal retenu, le rendement locatif est de l’ordre de 4% par an », ajoute-t-il.

Alors que la moyenne d’âge d’entrée dans les lieux a augmenté de 10 ans, passant de 65 ans en 2001 à 77 ans désormais, un autre phénomène est apparu : la revente des logements des premiers programmes commercialisés par Senioriales. « Il s’agit souvent de résidences en maison, des T3, dont la demande s’est accrue depuis la fin du confinement. Leur prix moyen varie de 230000 à 240000 €. Ce que nous constatons surtout c’est qu’il n’y a pas de perte de valeur du bien. La plus-value moyenne est de l’ordre de 1,5% sur l’ensemble des reventes par rapport au prix initial, mais évidemment il y a de fortes variations selon la période d’acquisition et la localisation. »

Une centaine de reventes sont enregistrées chaque année. Le groupe réfléchit d’ailleurs à « l’opportunité de relancer une gamme de résidence en maisons différente de la première génération. La demande du produit maison est revenue mais nous prévoyons une commercialisation majoritairement en investissement locatif. » Des projets sont à l’étude dans le secteur de Vendres-Valras. Acteur de la filière Silver économie lancée par le gouvernement en 2013 en vue du développement de solutions en faveur du bien vieillir, Senioriales a aussi depuis sept ans créé en son sein un laboratoire d’innovation, le Lab Senioriales qui a notamment développé une solution domotique et une application déployées au profit de ses résidents.