Payote, la marque d’espadrilles made in Perpignan qui veut conquérir le monde
Success story. La marque perpignanaise créée en 2016 par Olivier Gelly ne connaît pas la crise. Alors que sa capacité annuelle de production n’est d’aujourd’hui que de 80 000 paires, elle croule littéralement sous les commandes qui se comptent par millions. Pour répondre à la demande, la PME - qui a réalisé en 2024 plus de 1,6 M€ de chiffre d’affaires - va ouvrir d’ici janvier 2027 une usine capable de produire un million d’espadrilles par an.
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Intemporelle et donc indémodable, l’espadrille se veut à la fois chic et décontractée. Accessoire incontournable des gardes robes d’été et d’hiver aussi bien pour les femmes que pour les hommes, elle se décline à l’infini : unie, colorée, en denim, à imprimé et même en version chausson. Et si Mauléon au Pays Basque (Pyrénées-Atlantiques) est sans contexte la capitale historique de cette chaussure, son futur, lui, se trouve peut-être à Perpignan avec Payote.
Créée par Olivier Gelly en 2016, la marque connaît depuis un succès fulgurant grâce notamment à des collections capsules inspirées de la pop culture telles que Harry Potter, Game of Thrones ou encore Friends en collaboration avec Warner Bros. La PME a même fait partie des 75 entreprises françaises ayant reçu le label officiel des Jeux Olympiques de Paris 2024. Évènement pour lequel elle a imaginé une gamme d’espadrilles à l’effigie de la Phryge, de la flamme olympique ainsi qu’aux couleurs du drapeau tricolore.
Une concurrence asiatique féroce
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Véritable succès commercial avec 16 000 paires vendues, sur les 62 000 en 2024, cette labellisation est surtout une vraie reconnaissance pour la marque qui a fait du made in France un de ses principaux arguments de vente dans un contexte de concurrence féroce avec la Chine et le Bangladesh qui inondent le marché de leurs produits. Sur les quatre millions d’espadrilles vendues en France chaque année, moins de 800 000 sont en effet fabriquées dans l’Hexagone.
« Aujourd’hui, nous recevons entre deux et trois millions de commandes par an mais nous sommes en capacité de fabriquer “seulement” entre 60 000 et 80 000 paires. Environ 30 000 sortent de notre atelier pilote perpignanais ouvert il y a maintenant deux ans et dans lequel l’entreprise a investi 200 K€ rien que pour les machines. Le reste de nos modèles est entièrement réalisé par notre sous-traitant historique situé à Mauléon-Licharre, les ateliers Megam », indique Olivier Gelly qui se souvient du déclic qui l’a amené à créer Payote. Alors vendeur dans une boutique de prêt-à-porter de Perpignan :
Je suis parti un matin avec aux pieds une paire d’espadrilles dépareillée, une en 41 et une en 43. Le soir même, pour éviter que cette mésaventure se reproduise, j’ai customisé à coup de peintures et de feutres mes différentes paires pour les repérer plus facilement. Elles ont fait sensation auprès des clients de la boutique. J’ai alors commencé à en personnaliser pour certains d’entre eux. Ça m’a donné envie d’en savoir plus sur le processus de fabrication et de fil en aiguille j’ai décidé de lancer ma propre marque. »
Améliorer les processus de production
Pour poursuivre l’internalisation de sa production et changer de dimension, l’entreprise catalane compte s’appuyer sur une toute nouvelle usine qui devrait être opérationnelle en janvier 2027. Un projet dans lequel Payote va investir plus de 2 M€, dont 500 K€ récoltés via une campagne de financement participatif, ainsi que 160 K€ auprès de Bpifrance et de la Région Occitanie.
Objectif ? Produire à terme un million d’espadrilles par an et créer 80 emplois. D’une surface de 2 000 m2, la manufacture sera construite sur un terrain de 5 000 m² acheté à la mairie. « Les travaux de démolition du bâtiment existant devraient commencer d’ici quelques semaines », annonce Olivier Gelly qui revient sur l’importance de moderniser le procédé de fabrication de cette chaussure atypique qui ne comprend pas moins de 14 d’étapes : de la découpe, à l’encollage de la semelle, en passant par la couture, la pose de la toile et de l’étiquette.
« Par exemple, l’encollage est encore réalisé à la main grâce à un biberon alors que des machines peuvent le faire automatiquement. L’idée est donc de conserver le savoir-faire et le côté artisanal mais d’automatiser certaines étapes pour accélérer la cadence et répondre à la très forte demande. Le but étant aussi, et c’est très important, d’améliorer le confort des salariés », insiste l’intéressé.
Valorisation des matières des espadrilles usées
Cette future usine doit aussi permettre à Payote de récolter en grande quantité de vieilles espadrilles pour leur donner une seconde vie (isolant pour maisons, tapis de sol, etc.) et ainsi réduire son impact environnemental. Les matériaux utilisés pouvant être séparés et recyclés. « Les matières premières proviennent essentiellement d’Europe : la France pour le polyester, l’Espagne pour le coton biologique ainsi que le caoutchouc naturel recyclé et l’Italie pour le simili cuir de raisin, alternative végétale au cuir animal », détaille le quadragénaire qui ambitionne de fabriquer de nouvelles paires d’espadrilles à partir de paires usagées.
Je souhaite également développer le tourisme industriel en proposant des visites des ateliers. En parallèle, nous proposerons aux visiteurs un escape game et une salle de cinéma pour qu’ils puissent en apprendre davantage sur l’histoire de Payote et sur nos procédés de fabrication. Le futur bâtiment comprendra par ailleurs un tunnel, véritable musée, où seront exposées tous les modèles de la marque depuis sa création ainsi qu’un showroom. »
Forte aujourd’hui d’un chiffre d’affaires de 1,6 M€ (vs 1,4 M€ en 2023) et d’une équipe de bientôt 45 salariés, Payote s’appuie sur un réseau de distribution multicanal : site internet (80 % des ventes), magasins physiques (Perpignan et Toulouse) et quelques revendeurs. En multipliant par 12 sa production d’espadrilles, Olivier Gelly souhaite se donner les moyens de son ambition, à savoir : faire de Payotte une marque référence en France et à travers le monde.
« À court, moyen et très long terme, l’objectif est de développer de nouveaux modèles comme l’espadrille compensée, de multiplier les collaborations avec différents acteurs, d’ouvrir de nouvelles boutiques, d’honorer les commandes en provenance de l’étranger et d’étoffer notre réseau de distributeurs. Et pourquoi pas, de conquérir le marché américain ! »