PLF 2026 : le patron du Medef 31 dit « stop » à la taxe-mania
Tribune. Alors que les débats se poursuivent à l’Assemblée nationale sur le projet de loi de finances 2026, le président du Medef Haute-Garonne prend la parole pour dénoncer les effets de la schizophrénie budgétaire qui s’est emparée de l’hémicycle. Il alerte sur ses conséquences pour l’économie française et les entreprises du département.
Impôt sur la fortune improductive, taxe sur les bénéfices des multinationales, hausse de la taxation du rachat d’actions (de 8 à 33 %)… à chaque jour sa nouvelle taxe ! C’est un peu le sentiment que l’on a en écoutant les débats au sein de la commission des finances de l’Assemblée nationale et aujourd’hui dans l’hémicycle. Chaque groupe parlementaire y allant de sa proposition de nouvel impôt. De quoi ulcérer de nombreux acteurs économiques à commencer par le Medef.
De fait, l’organisation patronale ronge son frein depuis plusieurs semaines. Le 13 octobre dernier à l’appel de son président Patrick Martin, un grand meeting devait se tenir à l’Accor Arena Paris Bercy. Inédit depuis 1982, ce rassemblement des patrons français devait être une démonstration de force destinée à faire entendre leur colère et leurs inquiétudes dans un contexte économique dégradé. Un rendez-vous finalement ajourné pour « ne pas jeter de l’huile sur le feu » suite à la nomination-démission express du gouvernement Lecornu I.
Où sont les pistes d’économies ?
Pour autant la colère n’est pas retombée, bien au contraire, comme en témoigne cette nouvelle tribune de Pierre-Olivier Nau, le patron du Medef Haute-Garonne. Dans ce texte au vitriol publié le 3 novembre 2025, celui qui est aussi PDG de Manatour, leader français du tourisme industriel, s’insurge contre ce qu’il nomme la « taxe-mania ».
« Il y a des moments où le ras-le-bol dépasse les chiffres. À écouter les débats parlementaires sur le Budget 2026, une évidence s’impose : la France ne sait plus parler d’économie autrement qu’en inventant de nouvelles taxes. On ne réforme plus, on ponctionne. On ne structure plus, on colmate. Et toujours sur les mêmes : les entreprises, celles qui investissent, innovent et embauchent », s’agace l’intéressé. Déplorant que les débats sur le PLF 2026 se focalisent sur les moyens de taxer encore d’avantage les Français et les sociétés plutôt que sur les pistes d’économies.
« Depuis des semaines, les amendements s’enchaînent comme un catalogue de pénalités : sur le capital, sur les transmissions, sur les actifs, sur les retraités, sur l’énergie, sur le transport. À croire que la croissance est devenue suspecte. Cette obsession fiscale finit par étouffer tout ce qui respire encore dans notre tissu productif. » Et d’ajouter :
Pendant que le Parlement cherche de nouvelles recettes, enfin de nouvelles taxes, personne ne parle des dépenses. L’État se refuse à faire ce que toutes les entreprises font chaque jour : se remettre en cause, traquer l’inutile, rationaliser ses coûts. »
Absence de visibilité
Or, pour Pierre-Olivier Nau, il y a urgence. Il faut dire qu’entre l’explosion de la dette publique, la dégradation de la note française qui conduit l’État à emprunter plus cher sur les marchés ou encore la hausse du nombre des défaillances d’entreprises (70 000 attendues cette année, un record !), tous les voyants (ou presque) sont au rouge. En Haute-Garonne, les conséquences de cette « schizophrénie budgétaire » se font déjà sentir, affirme le président du Medef 31.
Entre investissements repoussés, recrutements suspendus, projets gelés faute de visibilité, « comment demander à une TPE, une PME, une ETI ou un grand groupe d’embaucher quand, chaque automne, ils doivent deviner quelle nouvelle taxe viendra rogner leur marge ? Comment parler de souveraineté économique si, à chaque budget, on fragilise ceux qui la construisent ? », interroge-t-il ironiquement avant d’enjoindre les décideurs politiques et plus particulièrement l’État à montrer l’exemple :
Les chefs d’entreprise de Haute-Garonne, comme partout en France, n’attendent pas des discours : ils attendent qu’on arrête de leur lier les mains. Tant que l’État ne fera pas d’économies sur lui-même, il n’aura plus de légitimité à en exiger des autres. »
Outre cette avalanche de nouvelles taxes, le chef d’entreprise toulousain fustige comme l’ensemble des présidents de différentes branches du BTP, de la restauration, l’industrie… une politique du stop-and-go néfaste pour les affaires.
« Les entreprises ne demandent ni privilège ni faveur. Elles demandent de la stabilité, de la cohérence, du courage politique. Qu’on arrête de gérer le pays à la semaine et qu’on fixe enfin un cap : moins de dépenses publiques, moins de complexité, plus de confiance dans ceux qui produisent la richesse. La compétitivité n’est pas un slogan, c’est une condition de survie. »
Fixer un cap
Alors que la production industrielle française repart avec une progression de 3,8 % en juin 2025 et que le PIB a accéléré au troisième trimestre 2025 (+0,5 % après +0,3 %) selon les chiffres de l’Insee, cette incertitude normative doublée d’une logorrhée fiscale est d’autant plus dommageable.
« À force de tout taxer, on finit par tarir la source. Si le gouvernement et le Parlement persistent dans cette fuite en avant fiscale, ils prendront la responsabilité d’un décrochage industriel durable. L’économie française n’a pas besoin d’un énième ajustement comptable, elle a besoin d’un choc de lucidité. »
Si tout n’est à jeter dans le PLF 2026 avec la suppression du plafond de 7 500 € pour la défiscalisation des heures supplémentaires, la fin d’un avantage fiscal accordé aux géants de la fast-fashion ou encore le rejet de la taxe Zucman fortement décriée par les organisations patronales, Pierre-Olivier Nau en appelle à un retour du bon sens.
Il exhorte les élus à engager un véritable examen des dépenses publiques avant de toucher une fois de plus aux entreprises. « Donnez-leur l’oxygène nécessaire pour investir, innover et créer des emplois. La France ne se redressera pas en punissant ceux qui la font vivre et la dette ne diminuera pas en stoppant la croissance », conclut-il.