Quels sont les nouveaux projets soutenus à hauteur de 400 K€ par la Fondation Toulouse Cancer Santé ?
Santé. Pour son 14e appel à projets lancé depuis sa création, l’organisme de mécénat soutient quatre nouveaux projets, fruits d’une collaboration entre des équipes du Centre de recherches en cancérologie de Toulouse (CRCT) et des laboratoires toulousains. À la tête de ces travaux de recherche en oncologie se trouvent quatre femmes scientifiques : Célia Delahaye, Estelle Espinos, Roxana Khazen et Anne Monfort.
« Des projets collaboratifs innovants pour mieux comprendre, diagnostiquer et traiter le cancer ». Telle était la thématique du nouvel l’appel à projets lancé en janvier 2025 par la Fondation Toulouse Cancer Santé.
Créé en 2005 sous l’impulsion de l’ancien ministre de la Santé Philippe Douste-Blazy et reconnu d’utilité publique un an plus tard, l’organisme de mécénat s’est donné pour mission de soutenir l’excellence de la recherche en cancérologie de la Ville rose afin d’atteindre le but ultime qu’est la guérison des patients. Installé dans les locaux de l’IUCT-Oncopole, qui regroupe aujourd’hui une communauté de près de 1 000 scientifiques, il a financé depuis 2007 plus de 52 projets de recherche pour un montant qui dépasse les 12 M€.
Des projets audacieux, à risque et à fort potentiel
Une manne financière indispensable alors qu’en France la recherche biomédicale et en santé souffre d’un manque chronique de moyens, faisant de la philanthropie un acteur déterminant pour aider à faire émerger les innovations thérapeutiques de demain. Et il y a urgence. En 2023, plus de 430 000 nouveaux cas de cancers ont été diagnostiqués dans l’Hexagone, estime la Ligue contre le cancer, soit 100 000 de plus qu’en 2003.
Dans un communiqué daté du 13 novembre, le conseil d’administration de la Fondation a dévoilé le nom des quatre lauréats de ce 14e appel à projets. À la clé pour elles, car oui, cette année, le palmarès est 100 % féminin ? Le financement de leur recherche à hauteur de 100 K€ chacune. À noter qu’au total, ce sont huit projets, deux chaires et quatre allocations doctorales qui bénéficient du soutien de la Fondation Toulouse Cancer Santé pour cette seule année 2025.
Entendues par un conseil scientifique externe, composé de chercheurs français et étrangers sans lien avec la Région Occitanie, les candidates chercheuses ont comme autre point commun de porter des projets innovants. Un choix assumé par Gilles Favre, le directeur de la Fondation, et ancien directeur du Centre de recherches en cancérologie de Toulouse (CRCT), nommé en janvier 2024 :
Qu’il s’agisse de recherche fondamentale, de recherche clinique ou de science dure, la décision de supporter tels ou tels projets est guidée par une stratégie qui nous est propre, à savoir privilégier ceux qui s’inscrivent dans des thématiques originales, souvent de rupture et qui sont peu ou mal financés par ailleurs. L’idée est vraiment de soutenir des projets qui sont entre guillemets à risque mais à fort bénéfice en termes d’avancées scientifiques et technologiques. »
La force du collectif
Alors que le cancer du poumon est la première cause de décès liés au cancer, notamment à cause de l’émergence de résistances après traitement, le projet Meca Lung pourrait bien changer la donne. En associant biologie, physique et intelligence artificielle la chercheuse post-doctorante au CRCT Célia Delahaye espère aboutir à une meilleure détection des cellules cancéreuses impliquées dans cette résistance en utilisant des approches innovantes. Un travail qu’elle mène en partenariat avec une équipe du laboratoire d’analyse et d’architecture des systèmes du CNRS et du laboratoire Restore. Tous deux basés à Toulouse, ils apportent une expertise multidisciplinaire qui « va permettre de collecter les mesures mécano-biologiques de ces cellules du cancer du poumon afin de mieux les identifier et d’explorer les propriétés mécaniques expliquant leur résistance », détaille le communiqué.
Autre projet lauréat : Pionner, initié par Estelle Espinos, professeure à l’Université Paul Sabatier, en collaboration avec une équipe du laboratoire toulousain Infinity de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Son ambition ? Explorer le rôle crucial du point de contrôle immunitaire « PD-L1 », un groupe de protéines inhibiteur des lymphocytes dans la réponse et la résistance des cellules cancéreuses aux traitements d’immunothérapie. Concrètement, ces travaux de recherche « visent à apporter une preuve de concept capable d’ouvrir une nouvelle voie permettant d’améliorer l’efficacité des traitements et de faire progresser la survie de patients atteints de cancers solides ».
Directrice de recherche Inserm, Roxana Khazen est à la tête du projet Mask S. Elle aussi est épaulée par des membres du laboratoire Infinity. Son but ? Développer un concept scientifique original pour améliorer les performances de l’immunothérapie pour le traitement du cancer. Les lymphocytes T cytotoxiques (CTL), qui jouent un rôle clé dans l’immunité anti-tumorale grâce à leur capacité à éliminer des cellules cancéreuses, se sont révélées après études hétérogènes. Certaines montrent en effet « une cytotoxicité réduite alors que d’autres se comportent en “super tueurs” ». Avec Mask S, la scientifique entend différencier l’organisation moléculaire des faibles et des super tueurs afin « de développer de nouvelles stratégies d’optimisation des immunothérapies cellulaires ».
Les entreprises : piliers de la philanthropie
En coopération avec une équipe de l’IPBS, l’unité mixte de recherche du CNRS et de l’Université de Toulouse, la chargée de recherche à l’Inserm Anne Montfort développe le projet B Tactic. Celui-ci s’appuie sur des résultats prometteurs obtenus dans le cadre de deux essais cliniques et d’analyse in vivo. Résultats qui montraient que dans le mélanome (cancer de la peau ou des muqueuses), « l’ajout d’anticorps anti-TNF [1] améliore l’efficacité clinique des inhibiteurs des points de contrôle immunitaires, groupe de protéines présentes à la surface des lymphocytes T qui empêchent le système immunitaire de détruire les cellules cancéreuses ». L’enjeu pour les chercheurs impliqués étant maintenant de mieux comprendre et surtout de démontrer l’efficacité du mécanisme d’action de ces anticorps TNF.
Débloqués entre trois et six mois, contre un an en règle générale, les fonds alloués pour financer ces quatre projets proviennent exclusivement de dons d’entreprises et de particuliers, de petits et de grands donateurs. Plus de 200 sociétés soutiennent ainsi la Fondation Toulouse Cancer Santé, dont Total Energies, Euryale, Newrest, Stella Groupe ou encore Pierre Fabre.
Une générosité et un engagement, parfois de longue date, salués par Gilles Favre qui « remercie chaleureusement les donateurs, toujours plus nombreux à soutenir ces équipes de chercheurs totalement engagés dans cette course vers la guérison ».
[1] Le terme « anti-TNF » désigne un ensemble de médicaments biologiques conçus pour cibler spécifiquement le facteur de nécrose tumorale de type alpha (TNF-α), une cytokine clé dans l’orchestration de la réponse inflammatoire de l’organisme (source Futura Sciences).