Réforme du financement de l’apprentissage : les contrats déjà en fort recul en Occitanie
Formation. Selon le Medef, les coups de rabot à la politique de soutien à l’apprentissage menacent gravement la pérennité d’un dispositif d’insertion dans l’emploi pourtant largement plébiscité. Pour Samuel Hervé, son président régional, ces mesures ont déjà des effets bien visibles en Occitanie avec un recul de 5,3 % du nombre de contrats signés au premier semestre. Au point qu’il en appelle au gouvernement à revoir sa copie. Et vite !

Au cours des cinq dernières années, l’apprentissage a connu un véritable boum, favorisé notamment par la réforme de 2018 et par l’aide exceptionnelle à l’apprentissage instaurée en 2020. Entre 2017 et 2024, le nombre d’entrées en apprentissage a dès lors triplé, passant de 300 000 à près de 915 000 au niveau national. En Occitanie, ce sont près de 80 000 contrats qui ont été signé l’an dernier, soit le double de 2019.
En parallèle, les dépenses publiques mobilisées pour l’apprentissage ont, elles aussi, nettement augmenté, du fait de la hausse du nombre d’apprentis et des nouvelles aides : 5,8 Mds€ en 2018 à 13,5 Mds€ en 2022. Une croissance quasi exponentielle, qui a conduit le gouvernement à adopter en 2025 de nouvelles mesures pour endiguer le phénomène.
De nouvelles règles de financement moins favorables
La loi de financement de la Sécurité sociale 2025 a, dans un premier temps, abaissé le seuil de dispense des cotisations sociales dont bénéficiaient les apprentis. Auparavant, ils étaient dispensés de la totalité des cotisations salariales dans la limite de 79 % du Smic. Depuis mars, ce seuil est abaissé à 50 %, ce qui a mécaniquement fait chuté les salaires nets versés aux apprentis. La loi a par ailleurs assujetti à la CSG/CRDS la partie de rémunération au-delà de 50 % du Smic.
Depuis le 1er juillet 2025, un plan de réforme du financement de l’apprentissage est également entré en vigueur. Pour le gouvernement, le principal enjeu est en effet de continuer à soutenir le développement d’un dispositif, « qui produit des effets très positifs sur l’insertion professionnelle des jeunes et l’économie tout en assurant la soutenabilité financière du système. » Pour ce faire, « il convient d’ajuster les niveaux de financement aux coûts et aux besoins réels des CFA. »
La détermination actuelle des niveaux de prise en charge a en effet conduit « à des niveaux de prix élevés, sans suffisamment d’incitation pour les CFA à optimiser leurs coûts ni pour les branches à prioriser les formations », ajoute le ministère du Travail.
La réforme vise donc à prioriser les financements en fonction des besoins du marché du travail mais aussi pour les premiers niveaux de qualification. L’une des principales mesures adoptées consiste ainsi en l’instauration d’une participation obligatoire des employeurs pour les niveaux BAC+3 et plus, participation aujourd’hui fixée à 750 €.
Autant de mesures qui ne passent pas du côté du Medef pour qui ce changement de règles va impacter durablement les entreprises et le nombre de contrats proposés aux jeunes. Au point que Samuel Hervé, président du Medef Occitanie (25 000 entreprises adhérentes), appelle l’État à revoir rapidement sa copie, car explique-t-il :
En plus de créer de l’emploi et de la confiance pour nos jeunes, un euro investi dans l’apprentissage rapporte 1,09 € aux finances publiques. »
Une remise en cause de la dynamique de l’apprentissage

L’effet de ces différentes mesures ne s’est pas fait attendre. « Les retours du terrain et les remontées des entreprises sur l’ensemble de la région montrent que cette réforme du financement de l’apprentissage va désorganiser durement cette filière, véritable gisement d’emplois pour les jeunes », constate en effet le directeur général chez Akté Services dans une tribune datée du 9 juillet 2025.
Lequel pointe au surplus « une incompréhensible différenciation des aides selon les effectifs de l’entreprise », à savoir 2 000 € pour les entreprises de plus de 250 salariés et 5 000 € pour les entreprises de moins de 250 salariés. Sur ce point, le Medef défend, pour sa part, le principe d’une prime à l’embauche d’un apprenti identique pour toutes les entreprises à hauteur de 4 500 € et quelque soit le niveau de diplôme.
Pour le président du Medef Occitanie, l’impact négatif de ces mesures se fait déjà durement sentir en région avec un recul de 5,3 % des contrats, soit 6 935 en moins, au premier semestre 2025 avec des baisses de 50 % attendues dans le domaine de la santé, de 15 à 20 % dans le secteur bancaire, de 10 % dans le bâtiment et jusqu’à 50 % pour l’Éducation nationale.
Selon Samuel Hervé ces « économies de bout de chandelle » vont à rebours de l’Histoire. De fait, depuis la mise en œuvre de la politique volontariste engagée en 2018, le taux d’activité des 15-24 ans a littéralement bondi dans l’Hexagone, progressant de 4,5 points entre 2019 et 2024 d’après l’Insee qui estime que les contrats en alternance ont généré un tiers des 1,2 million d’emplois supplémentaires créés entre 2019 et 2022.
Considéré par beaucoup comme la voie royale pour l’insertion professionnelle, l’apprentissage offre selon la Dares de réels débouchés avec 70 % des apprentis en emploi un an après leur diplôme, toutes formations confondues, mais aussi « une réelle égalité des chances avec deux fois plus de fils et de filles d’ouvriers en apprentissage que dans les autres cursus », ajoute le président du Medef Occitanie, pour qui, si le rétablissement des comptes publics est une nécessité, il ne doit pas se faire au détriment des mesures de soutien à l’apprentissage.