SurgiMab révolutionne la chirurgie oncologique avec ses molécules fluorescentes
Santé. Depuis 2011, le montpelliérain SurgiMab développe des molécules fluorescentes pour aider les chirurgiens oncologues à visualiser les tumeurs cancéreuses lors des interventions. La medtech lance une levée de fonds de 30 M€ pour réaliser des essais cliniques à plus grande échelle. Objectif : lancer la commercialisation de sa technologie dès 2029.

En 2023, l’INCa [1] dénombrait plus de 433 000 nouveaux cas de cancer en France, dont parmi les personnes diagnostiquées 245 610 hommes et 187 526 femmes. Selon l’organisme, le nombre de patients a doublé en 30 ans, une hausse qui s’explique par le vieillissement de la population mais aussi par l’amélioration des méthodes de détection, faisant du cancer la première cause de mortalité prématurée en France.
Problème : malgré les avancées réalisées en matière de diagnostic, la chirurgie curative, qui reste la première approche thérapeutique en oncologie, reste insuffisamment précise. En effet, certaines des lésions dues à des cellules cancéreuses sont invisibles à l’œil nu, même pour les chirurgiens les plus aguerris. C’est pourquoi, parfois, les professionnels ne retirent pas l’entièreté des tissus atteints ou au contraire touchent à des tissus sains. Pour leur permettre de mieux cibler les tumeurs, la medtech SurgiMab, basée au sein de la MedVallée de Montpellier, développe depuis 2011 des conjugués fluorescents injectables.
Une molécule révolutionnaire
« Nos composés fluorescents couplés aux anticorps permettent aux chirurgiens oncologues de visualiser clairement les contours de la tumeur ainsi que les nodules et les métastases de petites tailles. Ils peuvent ainsi distinguer le tissu sain du tissu tumoral et le préserver lors de l’intervention chirurgicale, laquelle nécessite du matériel de pointe adapté (endoscopes, caméras chirurgicales) », détaille Françoise Cailler, co-fondatrice de la pépite et docteure en biochimie et biologie cellulaire.
Pour développer des systèmes de vision adaptés à sa technologie, la jeune pousse, installée au BIC de Montpellier, a d’ailleurs signé des partenariats avec plusieurs grands noms du secteur dont les sociétés françaises Olympus, spécialisée dans les technologies médicales et Arthrex, un des leaders du marché du dispositif médical.
Une levée de fonds de 30 M€
Encore en phase d’essai clinique, la technologie développée par SurgiMab est le fruit de plusieurs années de recherche que Françoise Cailler a effectuées en collaboration avec André Pèlegrin, directeur de recherche à l’Inserm, et Marian Gutowski, chirurgien oncologue à l’Institut du cancer de Montpellier.
Alors qu’une commercialisation est annoncée pour 2029, l’équipe montpelliéraine doit tester sa molécule sur une plus grande cohorte de patients en Europe et aux États-Unis. Pour cela, elle lance une nouvelle levée de fonds de 30 M€ (dont 10 M€ cette année), après avoir déjà clôturé en 2018 un tour de table en deux temps d’un montant total de 14,9 M€.
Au global, la medtech, qui compte aujourd’hui cinq salariés, a réussi à sécuriser depuis sa création plus de 22 M€ grâce au soutien de Bpifrance et l’arrivée au capital de fonds d’investissement privés dont le hongkongais Cathey World Investment Ltd., actif dans le secteur de la biotechnologie et le suisse Abalis Finance AG, spécialisé dans le licencing de produits pharmaceutiques.
500 M€ de CA en 2036
Grâce à son produit phare, breveté en 2015, SurgiMab compte d’abord adresser les cancers colorectaux responsables chaque année de plus de 17 100 décès en France et de 112 000 morts aux États-Unis. À l’échelle mondiale, l’OMS estime à près de deux millions le nombre de nouveaux cas, faisant de lui le troisième type de cancer le plus répandu et le deuxième en nombre de décès.
Sur sa lancée, la medtech montpelliéraine entend bien élargir le champ d’application de sa solution. « Notre technologie étant duplicable, nous pourrons aussi la développer pour cibler d’autres types de cancer comme celui du pancréas. Nous travaillons d’ailleurs sur ce sujet avec l’hôpital de Leiden aux Pays-Bas », confirme Françoise Cailler.
Parmi les marchés porteurs sur lesquels elle souhaite s’implanter, les USA. Pourquoi ? « Parce que le gouvernement a abaissé, en 2021, à 45 ans l’âge recommandé pour le dépistage du cancer colorectal. Les États-Unis pourraient alors devenir notre marché numéro un », projette la dirigeante. Rien qu’en 2023, plus de 153 020 nouveaux cas ont été diagnostiqués outre-Atlantique, dont 106 970 tumeurs du côlon et 46 050 du rectum.
Alors que la chirurgie guidée par fluorescence prend de plus en plus d’ampleur, l’entreprise table sur « un chiffre d’affaires de 500 M€ en 2036, dont le marché nord-américain pourrait représenter les deux tiers », conclut Françoise Cailler qui devrait d’ailleurs être présente en janvier 2026 au Spie Photonics West de San Francisco, un événement dédié aux technologies optiques et photoniques. L’opportunité pour elle de présenter sa technologie et surtout de séduire de nouveaux partenaires et investisseurs.
[1] Institut national du cancer