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Swan-H : la deeptech qui révolutionne l’ammoniac et l’hydrogène vert

Innovation. La start-up toulousaine Swan-H a bouclé un tour de table de 1,5 M€ et poursuit son développement. Elle a déposé un brevet en mai 2021 qui a pour objectif de verdir la production d’ammoniac.

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L'équipe de chercheurs de Swan-H et les cofondateurs, Nicolas Mézailles et Augustin de Bettignies
L’équipe de chercheurs de Swan-H et les cofondateurs, Nicolas Mézailles (au centre) et Augustin de Bettignies (à droite). (Crédit : Swan-H)

Révolutionner la production d’ammoniac (NH3), soit plus de 200 millions de tonnes produites chaque année pour le secteur agricole, telle est l’ambition de la pépite toulousaine Swan-H, créée fin 2021, – avec le soutien de Toulouse Tech Transfert (TTT) –, avec à sa tête le Dr Nicolas Mézailles issu du CNRS. Il s’est adjoint les compétences de Steve Van Zutphen, directeur général et entrepreneur dans le domaine de la chimie, Willem Schipper , expert des procédés chimiques industriels, qui planche sur l’industrialisation et Augustin de Bettignies, entrepreneur dans les sciences de la vie, en charge du business développement et des partenariats. La jeune pousse a obtenu le soutien du fonds Deeptech de la Banque publique d’investissement (BPI), à hauteur de 90 K€ et également un prêt d’amorçage de 150 K€.

LES ÉNERGIES RENOUVELABLES VISÉES

La spin-off du CNRS vient ainsi d’annoncer la publication de Ammonia Synthesis at Room Temperature and Atmospheric Pressure from N2 : A Boron- Radical Approach dans Angewandte Chemie, une revue de chimie de premier plan. De fait, le Dr Nicolas Mézailles, qui dirige l’équipe franco-néerlandaise, a breveté, en mai 2021, un procédé disruptif pour produire de l’ammoniac (NH3). « C’est Nicolas Mézailles et l’auteur de la publication, son ancienne élève aujourd’hui salariée de la société, qui ont découvert ce procédé au printemps 2021. La question était de savoir comment activer l’azote présent dans l’air et à le faire réagir avec l’eau. La molécule d’azote, une des plus stables de notre environnement, est activée et rendue réactive en utilisant seulement une fraction de l’énergie requise par la méthode industrielle actuelle. Depuis cette découverte, le procédé fonctionne désormais avec l’électricité comme source d’énergie. Actuellement, la production de l’ammoniac nécessite beaucoup de chaleur et de pression. Son industrialisation est actuellement très énergivore », pointe Augustin de Bettignies, cofondateur de la start-up.


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De fait, le nouveau procédé, qui utilise des radicaux de bore pour faire réagir l’azote, entend verdir la production d’ammoniac, ce qui permettra de nouvelles applications notamment dans le milieu maritime ainsi que le stockage des énergies renouvelables. « Notre procédé permet un stockage modulaire pour qu’une ferme, par exemple, puisse avoir un générateur d’ammoniac en vue de réutiliser l’énergie. L’ammoniac lui-même peut aussi servir de combustible à des moteurs à bas régime dans le milieu maritime. Son utilisation pourrait atteindre 600 millions de tonnes pour remplacer le carburant utilisé pour le transport maritime », souligne le cofondateur. Et Nicolas Mézailles d’ajouter : « Notre procédé à faible consommation d’énergie a le potentiel de positionner l’ammoniac au coeur d’un nouveau système énergétique décarboné, permettant de stocker efficacement les énergies renouvelables telles que l’éolien et le solaire. »

RÉPONDRE AUX PROBLÉMATIQUES DE TRANSPORT ET DE STOCKAGE DE L’HYDROGÈNE

En marge, cette innovation permet de répondre aux problématiques de transport et de stockage de l’hydrogène, comme le rappelle Augustin de Bettignies. « Le stockage de l’ammoniac nécessite moins d’énergie que celui de l’hydrogène, notamment une pression de 10 bars contre 700 pour l’hydrogène. De plus, l’ammoniac peut être transporté dans les infrastructures de gaz naturel existantes, au lieu de nouveaux systèmes coûteux pour l’hydrogène. »

La start-up, qui a clôturé son premier tour de table de 1,5 M€ en février dernier auprès de business angels étrangers afin de soutenir sa R & D à Toulouse, basée à la Mai son de la Recherche et de la Valorisation (MRV) et de porter son équipe à une dizaine de collaborateurs d’ici la fin de l’année (dont le recrutement récent de deux post-docteurs et d’une nouvelle ingénieure), anticipe déjà une nouvelle levée de fonds de 5 M€ à l’horizon 2024. Cette seconde opération financière aura pour objectif de permettre la création d’un démonstrateur industriel. La start-up cible en effet des groupes industriels mondiaux qui entendent produire un ammoniac plus vertueux. « Nous souhaitons devenir un bureau d’ingénierie afin de leur vendre notre savoir-faire », conclut Augustin de Bettignies. Pour ce faire, Swan-H ambitionne de doubler sa taille d’ici 2024.