Un consortium 100 % français veut révolutionner le traitement des données satellitaires
Spatial. Le 3 juillet dernier, cinq entreprises et institut de recherche français, dont trois toulousains, ont annoncé leur collaboration pour un projet d’envergure. Objectif ? Allier leur savoir-faire afin de développer un système capable de traiter les données captées par les satellites d’observation, sans avoir à les faire redescendre sur Terre. Une première phase de test est prévue pour 2027, en vue d’un premier vol d’ici 2030.

« L’observation minutieuse est le commencement de la science », disait la physicienne et chimiste franco-polonaise Marie Curie. Qu’il s’agisse de préservation de l’environnement, de surveillance des forêts, de gestion des ressources en eau, de cartographie du territoire ou encore de défense lors de conflits, les satellites d’observation sont de véritables atouts pour les gouvernements ainsi que pour les organisations scientifiques ou les sociétés privées qui les exploitent.
Pourtant, leur fonctionnement reste aujourd’hui contraint par une architecture figée : l’absence de traitements performants à bord impose la plupart du temps de rapatrier au sol l’intégralité des données avant toute analyse. Ces opérations sont souvent chronophages et énergivores, ce qui impacte directement le travail des scientifiques. Une des solutions résiderait donc dans le fait d’embarquer les technologies de traitement des données directement dans les satellites.
C’est en tout cas ce que veut développer le consortium 100 % français piloté par Steel Électronique, une filiale d’Actia Aerospace et basée à Martres-Tolosane près de la Ville rose, qui porte le projet baptisé CEOS2030. Celui-ci regroupe plusieurs entreprises et donneurs d’ordre du secteur spatial, tels que Elsys Design (basée à Toulouse et filiale d’Advans Group), IP-Maker (Aix-en-Provence), Tarides (Paris), et Thales Alenia Space (Cannes et Toulouse), avec la participation de l’IRT Saint-Exupéry (Toulouse).
Des satellites plus intelligents
Annoncée dans un communiqué daté du 3 juillet dernier, cette alliance « propose une rupture avec le modèle existant », affirment les cinq partenaires. Et de préciser : « En intégrant des capacités de traitement embarquées à bord des satellites, ce nouveau modèle permettra de traiter et valoriser les données au plus près des capteurs. Il en résulte moins de données inutiles transférées, une meilleure réactivité face aux événements, et une optimisation des ressources spatiales. »
Dans le détail, la solution est majoritairement basée sur une combinaison de technologies avancées, dont des protocoles « NVMe », qui permettent une transmission des données plus rapide, les « FPGA », un outil spécifique capable d’analyser les données, et de l’intelligence artificielle embarquée qui utilise très peu d’énergie. « CEOS2030 constitue une avancée majeure pour l’intelligence embarquée dans l’espace. Grâce à notre expertise en électronique et IA embarquée, nous contribuons à constituer une solution fiable, évolutive et performante », affirme Jean-François Béraud, directeur de l’innovation chez Elsys Design.
Un marché estimé à 7 238 Mds$ en 2030
Labellisé par le pôle de compétitivité Aerospace Valley, le projet est soutenu par l’État français via Bpifrance dans le cadre de France 2030. Ses promoteurs prévoient une démonstration de la solution au second semestre 2027. Cette dernière « montrera la capacité de CEOS2030 à exécuter des traitements complexes à bord, mais également permettra de savoir si notre solution remplit les exigences des scénarios opérationnels pour un premier vol à l’horizon 2030 », détaillent les parties prenantes dans leur communiqué.
Si ces essais sont concluants, la solution pourrait révolutionner le marché des satellites d’observation terrestre. Un marché en forte croissance qui, selon le spécialiste américain des études de marché Grand View Research, représentait 5 101 Mds$ en 2024 et devrait atteindre les 7 238 Mds$ d’ici 2030, soit un bond de 6,2 % par an. « Ce projet s’inscrit dans notre vision du spatial de demain : modulaire, agile, et capable de s’adapter aux besoins évolutifs des utilisateurs », conclut Hervé Didtsch, chef de la R&D des systèmes d’observation chez Thales Alenia Space.