Hommes et chiffres

Qui est Alexandra Bertron, nouvelle directrice de l’INSA de Toulouse ?

Nomination. Docteure en génie civil, professeure des universités, Alexandra Bertron est la nouvelle directrice de l’INSA de Toulouse, une école d’ingénieurs qui forme chaque année plus de 3 000 étudiants. Une première pour l’établissement en 62 ans d’existence. Alors que les femmes représentent seulement 29 % des diplômés des filières Sciences, technologie, ingénierie et mathématiques, la nouvelle dirigeante prône un modèle de diversité sociale et d’ingénieur humaniste.

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Alexandra Bertron est la nouvelle directrice de l’INSA de Toulouse. (©INSA de Toulouse)

Il faut bien une première à tout. Dommage toutefois qu’il ait fallu attendre 62 ans pour voir une femme nommée à la tête de l’Institut national des sciences appliquées (INSA) de Toulouse. Créée en 1963, l’école d’ingénieurs toulousaine forme chaque année plus de 3 000 étudiants, ingénieurs, masters et doctorants dans huit spécialités.

Agée de 49 ans, Alexandra Bertron, sa nouvelle directrice, est diplômée de l’École normale supérieure de Cachan (aujourd’hui ENS Paris-Saclay). Spécialisée en génie civil, elle a ensuite intégré l’INSA Toulouse, où elle a obtenu un doctorat (2004).

Une spécialiste du génie civil

Après avoir enseigné en tant que professeure agrégée à l’IUT de Toulouse III et poursuivi ses activités de recherche au Laboratoire matériaux et durabilité des constructions (LMDC), elle rejoint l’école d’ingénieurs en 2015 en qualité de maîtresse de conférences. Elle s’intéresse plus particulièrement au développement durable et à la durabilité des infrastructures stratégiques de génie civil, notamment les structures de production d’énergie renouvelable.

En 2015, elle devient professeure des universités. Six ans plus tard, elle est nommée directrice adjointe du LMDC ainsi que directrice adjointe du département de génie civil. Engagée dans la gouvernance de l’école, Alexandra Bertron siège depuis 2018 au conseil d’administration.

Lauréate de la médaille internationale Robert L’Hermite et du prix de l’Association française de génie civil (AFGC) en 2014, elle a été membre junior de l’Institut Universitaire de France (IUF) de 2016 à 2021. Très active à l’international, elle a aussi développé un réseau de collaborations à travers le monde, notamment via ses responsabilités au sein de l’association RILEM (pour Réunion internationale des laboratoires et experts des matériaux, systèmes de construction et ouvrages).

Le modèle public de l’enseignement supérieur

À la tête de l’INSA de Toulouse, la nouvelle dirigeante s’est donné plusieurs priorités. Elle veut notamment développer une « une recherche dynamique et rayonnante » afin d’accompagner le monde socio-économique et « relever les défis des transitions ». Elle entend également défendre le modèle INSA de diversité sociale et d’ingénieur humaniste, notamment à l’international et plus largement le modèle public de l’enseignement supérieur et de la recherche. Elle souhaite enfin placer le développement durable et la responsabilité sociétale et environnementale au cœur de sa vision.

La nomination d’Alexandra Bertron à la tête de l’INSA de Toulouse est d’autant plus notable que les femmes demeurent très minoritaires au sein des écoles d’ingénieurs : le taux d’inscription féminin stagne à 29% deuis plus d’une décennie en France. Pire, selon l’enquête Gender Scan 2023 réalisée par le cabinet Global Contact en partenariat avec la Conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieurs (CDEFI) publiée en février 2024, la proportion de femmes dans l’ensemble des diplômées des filières STIM (Sciences, technologie, ingénierie et mathématiques) a chuté de 6 % entre 2013 et 2020 tandis qu’elle a progressé de 19% en Europe.

Où sont les femmes ?

En cause : les stéréotypes de genre, le manque de modèles féminins, les failles dans l’orientation scolaire, un phénomène d’autocensure… Autre enseignement de l’étude : près de trois étudiantes sur 10 dans les STIM ou dans le numérique ont été confrontées à des comportements sexistes en école d’ingénieur.

Sur le site internet de l’ENS Paris-Saclay, amenée à s’exprimer sur son « vécu en tant que femme », Alexandra Bertron affirmait avant sa nomination à la tête de l’INSA de Toulouse : « J’ai vécu des remarques sexistes et des comportements ou paroles un peu blessantes par certains enseignants quand j’étais en prépa. Par la suite, dès mon arrivée à l’ENS, puis au cours de ma carrière, je n’ai plus eu à subir ce genre de comportement, et il ne me semble pas avoir rencontré des freins ou des obstacles liés à ma condition féminine. »

Se disant favorable aux mesures imposant des quotas et une diversité minimale dans les jurys et les instances de la recherche, elle ajoutait : « De manière générale, il faut encourager les jeunes femmes à s’engager sur des parcours classiquement plutôt à majorité masculine, car la mixité est réellement bénéfique. »