Actes accomplis au nom d’une société en formation : la Cour de cassation précise sa position
Droit des affaires. Il est possible de démarrer l’activité d’une société avant son immatriculation. Dans ce cas, il est important d’indiquer sur tous les documents la mention « au nom » ou « pour le compte » de la société en formation. À défaut, que se passe-t-il ? Désormais, selon la Cour de cassation, il convient de rechercher la commune intention des parties.

Lors de la création d’une société, il y a un certain nombre d’étapes incontournables à réaliser. L’une d’entre elle est l’immatriculation. Il s’agit de la déclaration d’activité de la société auprès de l’administration. Elle s’effectue via le guichet des formalités des entreprises.
Avant l’inscription d’une société au Répertoire national des entreprises (RNE) et au Registre du commerce et des sociétés, il est toutefois courant qu’un des futurs associés doive conclure des actes « pour le compte » ou « au nom de » la future société (contrat de bail, prêt bancaire, promesse de vente…).
Après son immatriculation, la société peut reprendre les engagements souscrits au nom de la société. Cela nécessite une décision majoritaire des associés. Les actes ainsi repris sont alors réputés avoir été souscrits dès l’origine par la société.
À défaut de reprise, la responsabilité et les obligations de l’acte sont à la charge de la personne qui l’a conclu ou qui a donné mandat de le conclure (code de commerce, article L210-6).
Absence de mentions et validité des actes
La question de la validité des actes accomplis par une société en formation donne lieu à un abondant contentieux. La Cour de cassation a récemment assoupli sa jurisprudence sur cette question. Jusqu’à présent, elle subordonnait la reprise d’un acte à ce que l’acte mentionne expressément avoir été conclu « au nom » ou « pour le compte » de la société en formation.
Dans deux arrêts (Cass. com. 9 octobre 2024 n° 23-12.401 et Cass. 3e civ. 17 octobre 2024 n° 22-21.616, la Cour de cassation fait application d’une nouvelle jurisprudence datant du 29 novembre 2023 selon laquelle, en l’absence d’une de ces mentions, le juge doit rechercher quelle était la commune intention des parties.
La Cour de cassation a ainsi censuré deux cours d’appel pour avoir retenu que le fondateur de la société avait valablement conclu l’acte pour le compte de la société en formation (un contrat de prestations de conseil dans un cas, une vente dans l’autre) sans avoir caractérisé l’intention commune des parties de conclure l’acte pour le compte de la société.
« En présence d’un acte ne mentionnant pas qu’il a été souscrit au nom ou pour le compte de la société en formation, il appartient au juge d’apprécier souverainement, par un examen de l’ensemble des circonstances, tant intrinsèques à cet acte qu’extrinsèques, si la commune intention des parties n’était pas qu’il fût conclu au nom ou pour le compte de cette société, celle-ci pouvant, ensuite, après avoir acquis la personnalité juridique, décider de reprendre les engagements souscrits », précise la Haute juridiction.
Revirement confirmé et complété
En d’autres termes, en l’absence d’une des deux mentions, le juge doit apprécier souverainement en fonction des circonstances quelle était la commune intention des parties. Une position confirmée et complétée par deux nouveaux arrêts du 28 mai 2025 (Cass. com., 28 mai 2025, 24-13.370 et 24-13.435).
Il ressort de ces décisions d’une part que la solution retenue par la Cour de cassation est applicable à toutes les sociétés quelle que soit leur forme. Et d’autre part, la validité de l’acte accompli au bénéfice d’une société en formation n’implique pas que la société immatriculée présente une dénomination sociale identique à celle de la société projetée.