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Agissements sexistes : l’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour protéger les victimes

Jurisprudence. Tenir des propos sexistes envers ses collègues constitue une faute même si l’employeur les a longtemps tolérés par le passé. C’est en ce sens que vient de se prononcer la Cour de cassation dans un arrêt du 12 juin 2024.

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Il résulte des article L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail que l’employeur, tenu d’une obligation de sécurité envers les salariés, doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs et faire cesser notamment les agissements sexistes définis par l’article L. 1142-2-1 du même code comme tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant. (©Pixabay)

Les textes de loi ont progressivement élargi la notion de harcèlement sexuel et modifié pour partie sa finalité : il ne s’agit plus seulement de sanctionner un comportement fautif mais de protéger ses victimes en y mettant un terme et en prévenant sa récidive.

Le code du travail prohibe en effet les agissements sexistes portant atteinte à la dignité ou créant un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant (code du travail, article L 1142-2-1). Or, des propos sexistes peuvent constituer une faute justifiant le licenciement. C’est ce que rappelle la Cour de cassation dans un arrêt du 12 juin 2024.

Dans l’affaire soumise à la Cour de cassation, un salarié, technicien supérieur, employé au sein du Commissariat à l’Énergie Atomique et aux énergies alternatives (CEA) depuis plus de trente ans, est licencié pour avoir tenu des propos graveleux et salaces à l’encontre de plusieurs salariées.

Sanctionner le « sexisme ordinaire »

Devant la Cour d’appel de Grenoble, le salarié se défend en invoquant la tolérance de l’employeur qui s’était abstenu de la sanctionner alors qu’il avait déjà tenu ce type de propos par le passé. La juridiction du second degré constate que le salarié a bien commis une faute mais juge le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Elle estime en effet en premier lieu que la sanction est disproportionnée, l’employeur ayant d’abord envisagé une simple mise à pied disciplinaire. Elle prend aussi en considération la tolérance de l’employeur qui n’avait pas sanctionné le salarié pour des propos similaires tenus dans le passé. La Cour d’appel condamne en conséquence l’employeur à verser des dommages et intérêts au salarié licencié.

Saisie d’un pourvoi formé par l’employeur, la Cour de cassation rappelle que « nul ne doit subir d’agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant. »

Elle rappelle également que l’employeur est tenu d’une obligation de sécurité envers les salariés, et « doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs et faire cesser notamment les agissements sexistes. »

Elle estime dès lors qu’en matière d’agissements sexistes, l’abstention de l’employeur ne doit pas permettre de sanctionner moins sévèrement l’auteur des faits. Le salarié ayant tenu, de manière répétée, des propos à connotation sexuelle, insultants et dégradants envers ses collègues, a commis une faute justifiant son licenciement, « quelle qu’ait pu être l’attitude antérieure de l’employeur tenu à une obligation de sécurité. »