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Comblement de passif : le dirigeant peut être condamné sans considération de sa situation financière

Jurisprudence. Le comblement de passif est une sanction facultative qui peut, ou non, tenir compte de la situation financière du dirigeant qui y est condamné. C’est ce point que vient d’éclaircir la Cour de cassation dans un arrêt très important du 1er octobre 2025.

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Un arrêt de la Cour de cassation du 1er octobre 2025 clarifie les choses en matière de condamnation d’un dirigeant au comblement du passif de son entreprise. Ainsi, si le tribunal doit apprécier le montant de sa contribution en fonction du nombre et de la gravité des fautes de gestion commises, il n’est pas tenu de prendre en considération le patrimoine et les revenus du dirigeant fautif. (©Pixhere)

L’action en comblement de passif peut être engagée dans le cadre des procédures collectives (redressement ou liquidation judiciaires) lorsqu’une faute de gestion du dirigeant a contribué à l’insuffisance d’actif. Elle permet de protéger les créanciers de l’entreprise en condamnant le dirigeant responsable de la faute de gestion à financer sur ses biens personnels le passif de la société (code de commerce, articles L651-2 et suivants).

Cette sanction pécuniaire est facultative et elle est déterminée par le tribunal en fonction de la gravité de la faute. Le tribunal peut choisir de la prononcer ou de ne pas la prononcer même si le dirigeant a commis une faute de gestion. Le juge en détermine librement l’étendue. Il décide si le dirigeant doit être condamné à supporter la totalité de l’insuffisance d’actif ou seulement une partie.

Une logique de protection des créanciers

La situation personnelle du dirigeant et ses facultés financières peuvent également être prises en compte pour limiter le montant de la condamnation. Là encore, il s’agit d’une simple faculté. Dans un arrêt du 1er octobre dernier, la Cour de cassation vient en effet de rappeler que rien n’oblige le tribunal à prendre en compte le patrimoine ou les revenus du dirigeant (Cass. com. 1er octobre 2025 n° 23-12.234).

En l’espèce, le dirigeant d’une société en liquidation judiciaire a été condamné à payer 182 K€ pour combler l’insuffisance d’actif de sa société. Il faisait valoir que la condamnation devait être proportionnée à son patrimoine et à ses revenus. Selon lui, le liquidateur devait produire une étude sur son patrimoine et ses revenus afin de justifier que le montant de la condamnation était proportionné.

Une responsabilisation des dirigeants

En l’occurrence, la cour d’appel avait bien analysé les revenus du dirigeant mais avait conclu qu’ils permettaient de s’acquitter de la condamnation. Quoi qu’il en soit, le tribunal n’aurait pas été obligé de tenir compte d’une situation financière insuffisante.

«  Si le tribunal, faisant application de ce texte, doit apprécier le montant de la contribution du dirigeant à l’insuffisance d’actif de la société en fonction du nombre et de la gravité des fautes de gestion ayant contribué à cette insuffisance d’actif, il n’est pas tenu de prendre en considération le patrimoine et les revenus du dirigeant fautif », affirme ainsi la Haute Juridiction. « Une clarification bienvenue dont on ne peut que se féliciter », estime sur son fil Linkedin Thierry Favario, maître de conférences à l’université Lyon 3.