120e congrès des notaires de France : quelles solutions pour un urbanisme durable ?
Événement. Le 120e congrès des notaires de France, qui doit rassembler au Parc des expositions de Bordeaux du 25 au 27 septembre 2024 quelque 3 000 professionnels, aura pour thème : « Vers un urbanisme durable : accompagner les projets face aux défis environnementaux ». Mes Marie-Hélène Péro Augereau-Hue, présidente de ce 120e congrès et Hervé de Gaudemar, son rapporteur général, en détaillent les enjeux.
Pourquoi avoir choisi le thème « Pour un urbanisme durable » pour le 120e congrès ?
Marie-Hélène Péro Augereau-Hue : « Le thème de cette année nous parle à tous parce qu’il nous concerne tous. Avoir accès à un environnement propre, sain et durable participe à notre épanouissement et à celui de nos familles. Le droit de l’environnement imprègne tous les droits. Ainsi, les nouvelles règles de préservation de l’environnement, face au changement climatique, bouleversent le droit de la propriété : impossible, par exemple, d’acheter ou de louer un logement sans prendre en compte son diagnostic de performance énergétique ; impossible également d’ignorer la nature argileuse du sol d’une maison qui la soumet au risque de fissuration… Ces règles infusent dans tous les compartiments du droit, droits de la construction, de l’urbanisme et même de la famille. Des parents qui organisent une donation-partage ou un démembrement de propriété entre nue-propriété, au profit de leurs enfants, et usufruit pour eux, doivent anticiper la valeur future de ces biens qui peuvent perdre de la valeur s’ils sont exposés, par exemple, à l’érosion côtière ou à des inondations à répétition. »
Hervé de Gaudemar : « Dans notre quotidien, nous sommes tous confrontés au changement climatique et nous percevons, chez nos clients, citoyens, collectivités locales, promoteurs, une inquiétude naissante, ne serait-ce que pour la gestion de l’eau. Par exemple, les neuf maires de la communauté de communes du Pays de Fayence, dans le Var, ont, par manque d’eau, décidé, en janvier 2023, de refuser tout permis de construire, pendant cinq ans. Le plan local d’urbanisme bio-climatique, en cours d’adoption par la Ville de Paris, témoigne aussi de ces préoccupations. »
⏳ J-9 avant l’ouverture du 120e Congrès des notaires à Bordeaux !
📅Nous vous donnons rendez-vous les 25, 26 et 27 septembre 2024 pour participer à un événement incontournable.
Assister au Congrès, c’est investir sur le long terme dans l’avenir de la profession et du droit au… pic.twitter.com/MIJbz1YfAv— Association Congrès des Notaires de France (@CongresNotaires) September 16, 2024
Un corpus législatif et réglementaire florissant
Pas toujours harmonisé avec les règles existantes, notamment le code de l’urbanisme, le code de l’environnement porte des objectifs contradictoires, comme favoriser la réindustrialisation et le développement des énergies renouvelables sans, pour autant, artificialiser des sols. Complique-t-il la tâche des notaires ?
Hervé de Gaudemar : « Tous les juristes, dont les notaires, doivent s’emparer de ces nouvelles règles environnementales, jusqu’ici apanage de quelques spécialistes assez militants. Beaucoup d’entre elles proviennent de directives européennes inspirées de l’expérience des autres pays, avec des techniques auxquelles notre droit français n’est pas rompu : le législateur français raisonne en termes de permission-interdiction parfois assortie de sanctions, l’Européen utilise plus l’incitation et la réparation-compensation. Ce nouveau droit de l’environnement est encore tâtonnant, il n’est pas stabilisé et il percute celui de la propriété, constitutionnellement « inviolable et sacré », en ajoutant ses exigences aux contraintes d’urbanisme déjà lourdes. On peut d’ailleurs se demander jusqu’où iront ces atteintes au droit de la propriété. »
Marie-Hélène Péro Augereau-Hue : « Le 120e congrès des notaires de France fera des propositions de correctifs afin de concilier droit de l’urbanisme, droit de la propriété et droit de l’environnement. »
Des contraintes environnementales plus acceptables
Comment concilier liberté des propriétaires et respect de l’environnement ?
Marie-Hélène Péro Augereau-Hue : « La mission du notaire est d’assurer la paix des familles, d’éviter les conflits et de favoriser la qualité de vie. Nous pensons que l’initiative privée au nom d’un collectif - par exemple pour végétaliser un quartier, économiser l’eau, les énergies, les terrains mais aussi mutualiser des équipements et des biens, voitures, piscines, se protéger des inondations et des tempêtes, installer des ombrières sur les parkings, peut être dans certains cas plus efficace ou se cumuler avec l’action publique. À nous d’imaginer le cadre pour ces projets collectifs en valorisant ces externalités positives (ou valeur verte) ainsi crées au profit de ceux qui les entreprennent et les financent. »
Hervé de Gaudemar : « Pour y parvenir, nous avons, à notre disposition, de nombreux outils juridiques : la copropriété, les servitudes, les communs, le démembrement, les associations syndicales… Nous les explorerons à l’occasion de ce congrès dont l’un des objectifs est de clarifier, simplifier et surtout expliquer les finalités des nouvelles contraintes environnementales, afin qu’elles soient plus acceptables. Sécheresse, canicules, incendies, inondations, fissuration des bâtiments, érosion des côtes, pollution de l’air, de l’eau, du sol, pénuries d’eau, d’énergie et de terrains ou encore déclin de la biodiversité sont des fléaux désormais concrets et quotidiens. Ils bousculent l’aménagement du territoire, compliquent l’élaboration des documents d’urbanisme qui doivent dire où construire et quoi, et remettent en cause les choix résidentiels des ménages qui se demandent où habiter, où faire construire, avec quels matériaux, quel type de chauffage, quelles énergies… ? Les notaires, présents partout en France pour enregistrer et analyser toutes les transactions immobilières, privées comme publiques, ont non seulement le devoir d’informer et conseiller leurs clients sur ces nouveaux risques, ce qui élargit et alourdit leur responsabilité, mais aussi celui d’inventer des solutions juridiques. »
Marie-Hélène Péro Augereau-Hue : « Un objectif de ce 120e congrès est justement d’inventer ces nouvelles solutions juridiques pour répondre à la demande sociétale forte de "vivre autrement", tant dans nos logements que dans la ville. Cela implique de repenser notre rapport à la nature, à la ville, au travail, en tenant compte du changement climatique, de la raréfaction des ressources naturelles et de la pollution. Nos propositions, à l’issue de ce congrès, ont donc pour finalité de refondre l’urbanisme sur les bases du développement durable et de mettre en relation les droits de l’urbanisme, de l’environnement et de la propriété. Les trois commissions du congrès se sont attelées à ce travail. »
(Source : https://www.congresdesnotaires.fr/fr/)