Crise sanitaire et rupture de CDD : la force majeure n’est pas systématique
Jurisprudence. Une crise sanitaire telle que la pandémie de Covid-19 ne constitue pas nécessairement un cas de force majeure permettant la rupture anticipée d’un contrat de travail à durée déterminée. C’est ce que vient de préciser la Cour de cassation dans un arrêt du 18 septembre 2024.
Il a pu être tentant, pour les entreprises, d’arguer du Covid-19 comme cas de force majeure pour se dédire de leurs obligations contractuelles notamment dans le domaine des baux commerciaux et du droit du travail. La question a fortement agité les forums juridiques. La jurisprudence a, elle-même, longtemps été divisée sur ce point.
En matière contractuelle, la force majeure est définie comme un évènement incontrôlable, imprévisible et irrésistible (code civil, article 1218). Si la crise a bien été reconnue comme un évènement incontrôlable et imprévisible, il en est autrement du caractère irrésistible. Selon le code civil, un évènement irrésistible est celui « dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées ». Le caractère irrésistible s’apprécie donc en fonction de chaque situation particulière.
Trois conditions cumulatives
La Cour de cassation a ainsi jugé que les mesures de confinement qui ont empêché l’exploitation de locaux commerciaux ne constituait pas un cas de force majeure justifiant le non-paiement des loyers. La force majeure ne peut être invoqué que par le débiteur d’une obligation (en occurrence le paiement loyer) et non par le créancier de la contrepartie (la jouissance du local commercial). Or, la haute juridiction a considéré qu’il n’y avait pas d’empêchement à payer le loyer même si l’exploitation du local était rendue impossible par le confinement.
Dans un nouvel arrêt (Cass. soc. 18 septembre 2024 no 23-12.772), la Cour de cassation se prononce sur la rupture anticipée d’un contrat de travail à durée déterminée (CDD), cas de rupture prévu par l’article L 1243-1 du code du travail.
Un pilote de ligne est engagé en CDD en janvier 2020 avec effet à compter du 17 mars 2020, soit au lendemain de la décision de confinement général du 16 mars 2020 et la fermeture des liaisons aériennes dans l’espace Schengen. Son employeur rompt donc le contrat le 17 mars 2020 pour force majeure.
Mesures appropriées
La Cour de cassation juge que, en raison de la mise en place de l’activité partielle (ou chômage partiel), la crise sanitaire ne constituait pas pour l’employeur un évènement irrésistible caractérisant la force majeure.
Les nouvelles règles d’indemnisation ont en effet été instituées à compter du 1er mars 2020 prévoyant une indemnité versée au salarié prise en charge à 100 % par l’État et un reste à charge nul pour l’employeur en dessous de 4,5 Smic. L’employeur pouvait donc éviter la rupture du contrat par « des mesures appropriées » consistant à demander le placement du salarié en activité partielle.