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Employeurs, attention ! Un décret renforce vos obligations en cas de forte chaleur

Droit du travail. Alors que Météo France prévoit en ce début de semaine un nouvel épisode de canicule sur la région toulousaine, de nombreux salariés sont exposés à la chaleur, qu’ils travaillent en extérieur ou dans des locaux mal isolés. Dès lors, quelles sont les obligations qui pèsent sur l’employeur ? Le salarié peut-il exercer son droit de retrait ? Le télétravail est-il une solution ? Le point avec Axel Wantz, juriste aux Editions Tissot, spécialistes du droit du travail.

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Un décret du 27 mai 2025 impose aux employeurs de nouvelles obligations vis-à-vis de leurs salariés en cas de risque chaleur. (©Pixabay)

Les canicules sont de plus en plus nombreuses, et Météo France prévoit, pour les années à venir, des épisodes de plus en plus intenses et longs. Or, en période de fortes chaleurs, les risques pour la santé des salariés sont réels : depuis la déshydratation, en passant par les crampes et les malaises qui peuvent engendrer des accidents du travail, jusqu’aux coups de chaleur. Face à ces dangers, les employeurs ont l’obligation de prévenir, adapter et protéger leurs équipes.

Prévenir plutôt que guérir

De fait, « le code du travail ne fixe pas de température maximale au-delà de laquelle il est interdit de travailler, rappelle l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS). Aussi, l’évaluation des risques professionnels liés à la chaleur doit s’inscrire dans la démarche globale de prévention ».

Conformément à l’obligation de sécurité qui pèse sur lui, l’employeur doit assurer la sécurité et protéger la santé de ses salariés. Et pour cela, identifier les risques et lister les mesures et actions nécessaires qu’il faudra mettre en œuvre lorsque les températures s’élèvent. Il s’agit, de façon générale, de :

  • mettre à disposition des salariés de l’eau potable et fraîche ;
  • s’assurer que l’air soit renouvelé et ventilé dans les locaux fermés pour éviter les élévations exagérées de température ;
  • rappeler à tous les signes et symptômes des coups de chaleurs (maux de tête, fatigue, peau sèche et chaude, etc.).

De nouvelles dispositions

Le décret n° 2025-482 du 27 mai 2025 qui entrera en vigueur le 1er juillet renforce les obligations des employeurs en cas de fortes chaleur. Surtout, il définit précisément l’épisode de chaleur intense comme l’atteinte d’un des trois seuils fixés par Météo France : jaune (pic de chaleur), orange (canicule) ou rouge (canicule extrême).

En vertu de ce nouveau décret, l’employeur, doit, si nécessaire :

  • adapter les horaires de travail (par exemple en commençant plus tôt le matin) ;
  • prévoir des pauses supplémentaires ou suspendre les tâches pénibles aux heures les plus chaudes, mieux ajuster les périodes de repos ;
  • aménager les postes de travail avec des dispositifs filtrants ou occultants, de la ventilation ou de la brumisation ;
  • augmenter la mise à disposition d’eau potable fraîche pour les salariés ;
  • fournir des équipements adaptés (vêtements respirants ou rafraîchissants, couvre-chefs, lunettes...) ;
  • informer les salariés sur la conduite à tenir en cas de forte chaleur, accorder une attention particulière aux travailleurs vulnérables, comme les femmes enceintes.

Suspension d’activité et droit de retrait

Si les mesures prises sont insuffisantes pour garantir la santé et la sécurité des salariés, l’activité peut être suspendue et l’employeur peut recourir au dispositif d’activité partielle, de récupération des heures perdues ou, dans le secteur du BTP, du “chômage intempéries" en cas de vigilance orange ou rouge.

Pour autant, en cas de forte chaleur, le salarié peut-il exercer son droit de retrait ? Oui, s’il dispose d’un motif raisonnable de penser que sa situation de travail présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé. Pour rappel, le droit de retrait (code du travail : articles L4131-1 à L4131-4) permet au salarié de refuser de prendre son poste de travail ou de le quitter, sans avoir l’accord préalable de son employeur.

Le salarié doit cependant alerter ce dernier de la situation, avant ou au moment où il décide de quitter son poste et s’assurer que sa décision ne crée pas, pour toute autre personne à proximité, une nouvelle situation de danger grave et imminent. Dans ce cas, l’employeur doit maintenir sa rémunération et ne peut pas exiger qu’il reprenne son activité tant que la situation de danger n’est pas écarté.

Quid du télétravail ?

Lorsqu’il est possible, le télétravail peut constituer une bonne solution car elle évite au salarié d’être exposé à la chaleur pendant son temps de trajet en transports en commun ou à vélo. L’employeur et le salarié peuvent à tout moment convenir de recourir au télétravail d’un commun accord. À l’opposé, celui qui est habituellement en télétravail peut également demander à revenir dans l’entreprise lorsque celle-ci est « climatisée ».