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Le harcèlement sexuel environnemental ou d’ambiance reconnu par la Cour de cassation

Jurisprudence. Des propos à connotation sexuelle ou sexiste adressés « à la cantonade » constituent le délit de harcèlement sexuel même s’il ne sont pas dirigés contre une personne en particulier. C’est ce qu’a décidé la Cour de cassation dans un arrêt récent.

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Un maître de conférences a été poursuivi pour harcèlement sexuel au préjudice d’une quinzaine d’étudiants. (©Pixabay)

Le code pénal définit le harcèlement sexuel comme étant « le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste » qui « portent atteinte à sa dignité » ou « créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante » (code pénal, article 222-33).

Qu’en est-il lorsque de tels propos ou comportements ne sont pas imposés à une victime déterminée mais sont énoncés en public sans viser directement une personne en particulier ? C’est ce point qu’a récemment tranché la Cour de cassation (Cass. crim. 12 mars 2025 n°24-81.644).

Des victimes indéterminées

L’affaire concernait un universitaire, maître de conférences en droit public, dont les propos pendant ses cours et travaux dirigés avaient justifié sa suspension et un signalement au procureur de la République de la part du président de l’université. La connotation sexuelle et sexiste des propos était sans équivoque comme dans ce seul exemple : « Pendant un viol, la meilleure chose à faire, c’est de se détendre et profiter ».

Le professeur est poursuivi pour harcèlement sexuel au préjudice de quinze étudiants, avec la circonstance aggravante d’abus de l’autorité que lui confèrent ses fonctions. Le tribunal correctionnel le condamne à douze mois d’emprisonnement avec sursis et trois ans d’interdiction d’exercer l’activité d’enseignant.

La cour d’appel de Colmar cependant, ne retient que les faits concernant un seul étudiant en particulier et relaxe le professeur pour les quatorze autres victimes, estimant qu’elles n’ont pas été directement visées par des propos adressés « à la cantonade ».

Harcèlement sexuel environnemental ou d’ambiance

L’arrêt est cassé partiellement. Pour la Cour de cassation, même s’ils ne sont pas dirigés spécifiquement contre une personne, « des propos à connotation sexuelle ou sexiste adressés à plusieurs personnes, ou de tels comportements adoptés devant plusieurs personnes, sont susceptibles d’être imposés à chacune d’entre elles ».

La Cour de cassation reconnaît ainsi le harcèlement sexuel « environnemental ou d’ambiance  » que les victimes faisaient valoir : un comportement toxique créant dans un environnement collectif une situation intimidante, hostile ou offensante pour chaque personne qui y est exposée, même s’il n’est pas spécifiquement dirigé contre une victime déterminée.

Une solution déjà adoptée par la cour d’appel d’Orléans dans une décision du 7 février 2017 qui relevait que « le harcèlement sexuel peut consister en un harcèlement environnemental ou d’ambiance, où, sans être directement visée, la victime subit les provocations et blagues obscènes ou vulgaires qui lui deviennent insupportables ».

Le maître de conférences de 51 ans, qui a été, depuis, suspendu puis radié de la fonction publique, décision dont il a fait appel, devrait comparaitre à nouveau devant la cour d’appel de Metz.