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Les précaires et les seniors sacrifiés dans la nouvelle réforme de l’assurance chômage ?

Emploi. Le Premier ministre Gabriel Attal a dévoilé fin mai les nouveaux contours de l’assurance chômage. Alors qu’un décret doit paraître en juillet pour une entrée en vigueur en décembre, les syndicats sont vent debout contre cette réforme qu’ils estiment « d’une violence sans précédent ».

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Photo d'un document de France Travail
Une nouvelle réforme de l’assurance chômage pourrait entrer en vigueur au 1er décembre 2024. (©France Travail)

Les nouvelles modalités de l’assurance chômage présentées par le Premier ministre le 26 mai dernier dans les colonnes de La Tribune ne soulèvent pas l’enthousiasme des partenaires sociaux. C’est le moins que l’on puisse dire. De fait, ces nouvelles dispositions qui feront l’objet d’un décret en juillet pour s’appliquer à compter du 1er décembre 2024, viennent considérablement durcir les conditions d’affiliation.

Pour être indemnisés par Pôle emploi, les salariés devront en effet avoir travaillé huit mois au cours des 20 derniers mois (contre six mois au cours des 24 derniers mois, actuellement). La durée maximale d’indemnisation passera, elle, à 15 mois (contre 18 mois actuellement). Une mesure jugée par la CGT « particulièrement dure pour les jeunes de moins de 25 ans, surreprésentés parmi les précaires. » Même son de cloche du côté de la CFDT, qui considère que « le gouvernement s’en prend aux demandeurs d’emploi les plus vulnérables, en réduisant leurs droits : les jeunes (moins de 25 ans), les fins de CDD (dont saisonniers) et intérim, les salaires les plus faibles ». Ils ne sont cependant pas les seuls à pâtir de cette énième réforme de l’assurance chômage. Les seniors voient aussi leurs droits réduits.

Une réforme moins favorable aux seniors

La « filière seniors » permet actuellement aux demandeurs d’emploi de 53 et 54 ans d’être indemnisés jusqu’à 22 mois et demi. Ceux âgés de 55 ans et plus peuvent être indemnisés jusqu’à 27 mois. Le décret à paraître entend supprimer le premier niveau de la filière, à 53 et 54 ans. En conséquence les salariés de cette tranche d’âge relèveront du régime de droit commun (durée maximale d’indemnisation de 15 mois, soit sept mois et demi de moins). L’entrée dans la « filière seniors » sera reculée de 55 à 57 ans et la durée maximale d’indemnisation passera à 22 mois et demi (contre 27 actuellement).

Pour favoriser l’emploi des seniors, le chef du gouvernement Gabriel Attal a annoncé la création d’un « bonus », une prime versée par l’Unédic aux seniors acceptant un emploi moins bien rémunéré que le précédent emploi. Ce complément sera versé pendant un an et devrait permettre de compenser la baisse de rémunération. Une proposition jugée « scandaleuse » par Michel Beaugas, secrétaire confédéral de FO en charge de l’emploi et des retraites, qui y voit « une subvention salariale déguisée ».

Le gouvernement étudie également la création d’un « CDI senior » pour favoriser l’embauche des salariés de 60 ans ou plus. Une telle mesure avait été votée par le Sénat dans le cadre de la réforme des retraites de 2023 mais le Conseil constitutionnel avait censuré cette disposition. Le CDI senior tel qu’imaginé par l’exécutif pourrait être rompu dès que le salarié a acquis le nombre de trimestres nécessaire pour bénéficier d’une retraite à taux plein. Il pourrait s’accompagner d’exonérations de cotisations patronales.

Une nouvelle modulation des droits

Le décret devrait introduire une nouvelle modulation des droits en fonction de l’évolution du taux de chômage, actuellement de 7,5 %. Si le taux de chômage descendait en-dessous de 6,5 %, les conditions d’indemnisation pourraient ainsi être durcies, avec une durée des droits à l’indemnisation abaissée de 40 %.

Plus globalement, pour François Hommeril, président de la CFE-CGC, cette réforme est « inadmissible ». « C’est un tour de vis qui prétend, contre la réalité, qu’en tapant un peu plus sur les chômeurs, en précarisant les conditions dans lesquelles ils vivent pendant qu’ils recherchent du travail, ils vont trouver plus facilement du travail. Il est démontré que c’est faux », a-t-il récemment déclaré au micro de Franceinfo.

Les organisations patronales se disent, de leur côté, globalement favorables à ces mesures. La CPME regrette toutefois, pour sa part, « l’absence de mesures incitatives à l’embauche des seniors pour les entreprises ». Le gouvernement affirme, de son côté, que cette réforme permettra de réaliser 3,6 Mds€ d’économie.