Peut-on télétravailler depuis son lieu de vacances ?
RH. Depuis plusieurs années, le télétravail a explosé. De nombreuses entreprises l’ont aujourd’hui durablement adopté et, cet été, le gouvernement incite à y recourir pendant la période des Jeux Olympiques et Paralympiques. Mais quid du lieu ? Un salarié doit-il forcément télétravailler de chez lui ou peut-il le faire ailleurs, par exemple depuis son lieu de vacances ? Le point avec Isabelle Vénuat, juriste aux Editions Tissot, spécialistes du droit du travail.
Selon le ministère du Travail, de la Santé et de la Solidarité, alors que 61 % des Français aspirent au télétravail, il n’est une réalité que pour 22 % d’entre eux. La loi sur le renforcement du dialogue social apporte pourtant des simplifications majeures pour mettre en place le télétravail.
Ainsi, le télétravail peut être mis en place de trois manières différentes :
- par un simple accord avec le salarié (accord oral, email, courrier…) ;
- par un accord collectif ;
- par une charte élaborée par l’employeur, après avis du comité social et économique, s’il existe.
La loi sur le renforcement du dialogue social crée en parallèle un droit au télétravail pour les salariés. Dès lors, tout salarié qui souhaite télétravailler informe l’employeur de son intention, par tout moyen. L’employeur donne son accord, également par tout moyen. En cas de refus, l’employeur doit motiver sa décision. Lorsqu’il existe une charte ou un accord, le télétravail est mis en place dans les conditions prévus par ces documents.
Quels sont les lieux depuis lesquels on peut télétravailler ?
Le ministère répond clairement à cette question : il est possible d’effectuer le télétravail au domicile ou en dehors, sauf si la charte ou l’accord qui l’a mis en place prévoient d’autres dispositions. Ce sont eux qui définissent précisément les lieux dans lesquels il sera effectué (domicile du salarié, résidence secondaire, espace de coworking, etc.), en tenant compte du fait que chacun dispose de la liberté de choisir son domicile.
Cependant, un motif légitime comme la nécessité de pouvoir revenir rapidement sur le lieu de travail en cas de besoin, ou encore des questions de sécurité ou de connexions réseau, peut justifier qu’un salarié télétravaille impérativement depuis son domicile habituel. Et dès lors que l’accord collectif ou la charte l’impose, un salarié qui ne respecterait pas cette règle encourt une sanction disciplinaire. Si rien n’a été prévu, un salarié peut donc télétravailler depuis le lieu de son choix, qui peut être son lieu de vacances. Une souplesse particulièrement bienvenue pour les salariés des villes qui accueillent les JO.
Peut-on télétravailler depuis l’étranger ?
La question doit être envisagée d’emblée pour anticiper les difficultés, qui peuvent survenir, par exemple, si un salarié reste trop longtemps en télétravail à l’étranger. Quelle est la législation applicable ? Faut-il envisager l’expatriation ? Des problèmes peuvent aussi survenir en cas de problème de santé, de prise en charge et d’application de la Sécurité sociale. Pour ces raisons, des limites peuvent être posées pour limiter la durée du télétravail hors domicile ou restreindre son exercice depuis l’étranger.
Quels sont les abus sanctionnables ?
Si un salarié télétravaille depuis le lieu de son choix, télétravail ne rime pas pour autant avec liberté totale. L’employeur peut donc parfaitement contrôler l’exécution des tâches qui lui sont confiées.
Mais ce contrôle doit être proportionné à l’objectif poursuivi, ne pas porter pas atteinte aux droits et libertés du salarié et faire l’objet d’une information des salariés et d’une consultation préalable des représentants du personnel.
Le contrôle permanent est, lui, interdit. La CNIL en donne des exemples : webcam, logiciels qui enregistrent les frappes, obligation pour le salarié d’effectuer très régulièrement des actions pour démontrer sa présence derrière son écran comme cliquer toutes les X minutes sur une application.
Enfin, que le salarié télétravaille de chez lui ou de son lieu de vacances ne doit pas avoir d’impact sur la qualité de son travail, et l’employeur peut tout à fait envisager une sanction s’il n’effectue pas ses tâches, n’est pas joignable à ses heures de travail, n’assiste pas aux réunions en audio ou visioconférence, etc.