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Solidarité fiscale : après une séparation, comment obtenir une décharge ?

Fiscalité. Lorsque le fisc réclame une dette commune (impôts sur le revenu, taxe d’habitation, etc.) à un ancien conjoint ou ex-partenaire de Pacs, celui-ci peut demander à ne plus être tenu de payer la part de l’autre. C’est ce qu’on appelle une demande de décharge de solidarité fiscale. Ce dispositif a été complété par de nouvelles dispositions.

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La loi du 31 mai 2024 a introduit la possibilité pour un ancien conjoint ou ex-partenaire de Pacs de demander une décharge gracieuse de solidarité fiscale. (©Pixabay)

L’été est revenu et avec lui l’envoi des avis d’imposition. Des avis porteurs de bonnes ou de mauvaises nouvelles qu’ils indiquent un trop-perçu ou au contraire un complément à régler. Pour certains contribuables cependant, ceux dont la situation a changé en cours d’année, le paiement de l’impôt peut virer au casse-tête. C’est le cas lors d’une séparation. Explications.

Les conjoints soumis à une imposition commune sont en effet solidairement responsables du paiement de l’impôt sur le revenu et de l’IFI. S’ils habitent ensemble ils sont également solidaires de la taxe d’habitation pour la résidence secondaire et les autres logements. La même solution s’appliquent aux partenaires d’un Pacs.

Un dispositif insatisfaisant

Mais en cas de divorce ou de séparation que se passe-t-il ? Lorsque l’administration fiscale réclame une dette commune (impôts sur le revenu, taxe d’habitation, etc.) à un ancien conjoint ou ex-partenaire de Pacs, le conjoint appelé au paiement solidaire peut demander la décharge de son obligation en vertu de l’article 1691 bis-II du code général des impôts.

La décharge de responsabilité est de droit mais est cependant soumise à des conditions restrictives tenant notamment à la disproportion entre la situation financière et la dette fiscale et le comportement fiscal depuis la rupture.

Le conjoint qui sollicite cette décharge doit en l’occurrence être de bonne foi, ce qui signifie, en droit fiscal : ne pas avoir volontairement cherché à frauder, avoir rempli ses obligations fiscales avec honnêteté et ne pas avoir organisé l’insolvabilité.

Il doit y avoir en outre un déséquilibre marqué entre sa situation financière et la dette à recouvrer. En clair, cela signifie ne pas disposer des moyens suffisants pour payer la dette fiscale et que le montant réclamé représenterait une charge excessive au regard de ses ressources.

Des situations humaines graves

Dans la pratique, comme le notait un rapport parlementaire remis en janvier 2024, les chiffres de demandes accordées étaient très faibles. Ainsi, en 2022, sur 245 demandes traitées, 100 décharges avaient été octroyées et 103 avaient été rejetées.

Face à ce constat d’un dispositif insatisfaisant, le législateur a souhaité modifier ce régime pour éviter de faire peser un fardeau fiscal trop lourd sur des ex-conjoints. La loi du 31 mai 2024 visant à assurer une justice patrimoniale au sein de la famille institue donc parallèlement un dispositif de décharge gracieuse de la responsabilité solidaire entre conjoints. Il figure à l’article L 247 du Livre des procédures fiscales.

Il s’agit d’une mesure exceptionnelle par laquelle l’administration peut annuler tout ou partie d’une dette fiscale (impôt, pénalités, frais de poursuite, intérêts). Elle vise principalement des situations humaines graves, sans exiger de disproportion financière. La loi du 31 mai 2024 a ainsi reconnu officiellement que les violences conjugales peuvent justifier une annulation partielle ou totale d’une dette fiscale.

Au bon vouloir de l’administration

L’autre cas de figure visé est celui où la dette provient du comportement de l’ex-conjoint et que le demandeur de la décharge n’y a jamais contribué ni bénéficié. La personne n’ayant tiré aucun profit de la fraude ou de la dette peut alors demander à bénéficier de cette décharge gracieuse.

Concrètement, le conjoint séparé de son époux ou partenaire, qui est à jour de ses obligations déclaratives et à laquelle aucun comportement frauduleux ne peut être reproché, peut désormais demander à être déchargé à titre gracieux de sa responsabilité solidaire, pour le paiement de toutes les impositions y compris l’IFI, ainsi qu’aux intérêts de retard et majorations. Le conjoint peut également demander la restitution des sommes déjà versées avant la demande de décharge.

Cette mesure est cependant soumise à l’appréciation de l’administration fiscale. La demande doit être adressée par écrit, sous forme d’une simple lettre sur papier libre, au directeur départemental des finances publiques du lieu d’établissement des impositions communes concernées.

Elle doit être précise et accompagnée de toutes les justifications permettant d’apprécier, d’une part, la réalité ainsi que la date de la rupture de la vie commune et, d’autre part, la situation financière et patrimoniale du demandeur.