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Un an de lutte contre la petite délinquance et les incivilités du quotidien

Justice. Le ministère de la Justice fait un premier point d’étape sur le volet civil de la justice de proximité, un an après son entrée en application.

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114 729 décisions qui ont été rendues hors les murs des tribunaux judiciaires.

Un an après son lancement en matière pénale, quel bilan peut-on tirer de la mise en place de la justice de proximité ? Cette politique publique permet de lutter plus efficacement contre la petite délinquance, grâce à des moyens financiers et humains sans précédent et de nouvelles mesures prises pour simplifier les procédures dans les juridictions. De fait, la petite délinquance est un des facteurs de dégradation des conditions de vie des citoyens. Elle donne, qui plus est, une impression d’impunité de leurs auteurs faute d’une réponse judiciaire immédiate et visible. Au pénal, la justice de proximité a pour objectif de lutter contre la délinquance quotidienne en apportant une réponse pénale rapide, systématique et proportionnée.

Depuis un an ce sont donc 350 infractions qui ont été répertoriées (nuisances sonores, atteintes à la tranquillité publique, injures, dégradation…) pour lesquelles le garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, a demandé aux parquets d’accélérer la réponse pénale en privilégiant, lorsqu’elles sont adaptées, les mesures alternatives, telles que le travail non rémunéré, la contribution citoyenne, les mesures de réparation, etc. Avec un budget de 200 M€ en 2021 et 252 M€ en 2022, les projets engagés vont être confortés et développés. Pour mettre concrètement en oeuvre la justice de proximité, le ministère de la Justice a lancé un vaste plan de recrutement : plus de 900 emplois de juristes assistants, de chargés de mission et de renforts des services de greffe sont arrivés dans les juridictions ; et le budget consacré aux délégués du procureur a été doublé afin de multiplier les possibilités pour les procureurs d’y avoir recours. Les procureurs de la République peuvent aujourd’hui s’appuyer sur 1022 délégués du procureur contre 901 au 1er décembre 2020 (+11,8 %). Ainsi, le recours aux délégués a augmenté de 35 % entre 2020 et 2021. Ces délégués du procureur de la République se mobilisent au service des territoires et se déplacent désormais dans les 2 000 points Justice ainsi que dans les tribunaux de proximité afin notamment de notifier aux auteurs des infractions, les décisions prises par les procureurs de la République.

Pour les délits et contraventions de proximité relevant de la compétence d’un seul juge, le recours à des audiences dédiées et à des audiences « foraines » dans les 125 tribunaux de proximité a fortement augmenté. En 2021, des audiences foraines se sont tenues partout en France dans des tribunaux de proximité comme à Cholet, Villeneuve-sur-Lot, Gien, Château-Thierry et continueront de se déployer en 2022. Les juridictions se sont pleinement mobilisées pour lutter contre la petite délinquance. Ce sont ainsi 114 729 décisions qui ont été rendues hors les murs des tribunaux judiciaires depuis le lancement du plan de soutien à la justice de proximité, pour une moyenne de 9560 décisions chaque mois. En 2021, 1297 audiences de délégués du procureur de la République (DPR) ont été tenues hors les murs chaque mois.

La justice de proximité pénale un an après en quelques chiffres

75% des tribunaux judiciaires ont désigné un ou des magistrat( s) pour être l’interlocuteur des élus afin de fluidifier les échanges ; 60,1% des tribunaux judiciaires ont mis en place une boîte mail ou tout autre outil, dispositif ou circuit dédiés aux relations avec les élus locaux. 4743 mesures de réparation ont été réalisées entre le 1er décembre 2020 et le 1er décembre 2021 à l’encontre de personnes majeures, et 10 121 pour les personnes mineures. Ce dispositif peut prendre des formes très diverses : versement pécuniaire au bénéfice de la victime ou restitution, remise en état des lieux ou des choses dégradés, versement pécuniaire au bénéfice de toute personne physique ou morale ayant eu à engager des frais pour re mettre en état les lieux ou les choses dégradés. 3472 travaux non rémunérés ont été prononcés entre le 1er décembre 2020 et le 1er décembre 2021.

35 tribunaux ont également développé un circuit court de mise en oeuvre des travaux non rémunérés (TNR), c’est-à-dire une notification par un délégué du procureur après défèrement ou une convocation à bref délai. Les interdictions de paraître ont été multipliées par 4,6 entre 2018 et 2021 (passant de 606 interdictions prononcées en 2018 à 2780 en 2021). 41,4 % des tribunaux judiciaires ont mis en place la contribution citoyenne créée par la loi du 8 avril 2021. Cette mesure, permet au procureur de la République de demander à l’auteur des faits de s’acquitter d’une contribution citoyenne auprès d’une association d’aide aux victimes agréées par le ministère de la Justice. Plafonnée à 3000€, cette contribution demandée à l’auteur des faits est déterminée par le procureur de la République, selon la gravité des faits.

59,75 % des tribunaux judiciaires ont signé des conventions de rappel à l’ordre avec des communes afin de faciliter le traitement des petites incivilités. Près de 967 rappels à l’ordre ont été effectués par les maires. Ce dispositif leur permet de convoquer à un entretien officiel, l’auteur des faits susceptibles de porter atteinte au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité ou à la salubrité publiques. Enfin, dans le cadre de la signature de 38 protocoles et conventions, la justice s’est associée avec une centaine d’associations (La Croix-Rouge, les Restos du Coeur, Emmaüs, Secours Populaire…), afin de leur remettre ses scellés. Ces initiatives permettent dans un même temps de lutter contre la petite délinquance et d’oeuvrer pour l’intérêt général.

Une dynamique de résorption des stocks enclenchée en matière civile

Le 3mai dernier, le ministre de la Justice, a annoncé l’attribution de moyens importants pour la justice civile de proximité. Un plan de recrutement de 1000 emplois a été lancé à l’été pour renforcer l’action des greffes, des magistrats et de tous les fonctionnaires en matière civile, priorisant les affaires familiales, le contentieux de la protection et celui des pôles sociaux.

Sur 149 tribunaux judiciaires, des baisses moyennes de stocks ont été constatées, entre le 31 décembre 2020 et le 31 décembre 2021, dans les contentieux ciblés :

  • 23,35% de stock aux affaires familiales,
  • 15,39% de stock du contentieux de la proximité,
  • 23,71 % de stock des pôles sociaux.

S’il est trop tôt pour imputer exclusivement la baisse de ces stocks aux renforts accordés qui sont majoritairement arrivés en juridiction en septembre dernier et ont dû être formés, les juridictions relèvent que les recrutements opérés ont permis d’incontestables gains qualitatifs. À cet égard, 54% des juridictions indiquent que les renforts d’effectifs accordés ont d’ores et déjà permis de fixer davantage de dossiers à l’audience ; 39% des juridictions indiquent même que les renforts accordés ont permis de créer des audiences supplémentaires. Par ailleurs, 49,66% des juridictions considèrent que les magistrats peuvent désormais consacrer davantage de temps à l’étude des dossiers complexes.

Enfin, 59,73 % des juridictions indiquent enfin que les recrutements opérés permettent de rendre une justice civile de meilleure qualité ; Par ailleurs, pour poursuivre et améliorer la mise en oeuvre de cette politique publique, le garde des Sceaux a d’ores et déjà annoncé en décembre dernier la pérennisation de 1 414 emplois de la justice de proximité et la mise en oeuvre de la formation des agents recrutés par l’École nationale de la magistrature et l’École nationale des greffes.