Cette sociologue est aujourd’hui coach et formatrice pour les entreprises et les institutions publiques. Un cap entrepreneurial qu’elle ne regrette pas, car elle n’en démord pas : l’intelligence collective et la réflexivité sont des fondements solides pour atteindre la performance. Elle est la cofondatrice du Serious Game Toulouse, une journée dédiée aux formateurs, coachs, dirigeants, responsables RH et managers, pour leur permettre de découvrir les nombreux usages du jeu en situation professionnelle. Après une première session réussie l’an passé, une nouvelle édition aura lieu le 4 juillet.
« Je gère ! », c’est le mantra du matin de Merry Strullu, sa petite piqûre de rappel. Sur la place toulousaine, on l’a surnomme Merry poppins. C’est chez elle que la fondatrice du cabinet Osons une pause, reçoit en toute simplicité, quand elle n’est pas chez ses clients. Cette passionnée, qui préfère au mot coaching celui d’accompagnement, est convaincue par les bienfaits de l’intelligence collective et de la réflexivité, les outils qu’elle utilise pour atteindre la performance au sein des organisations et résoudre les problématiques managériales.
Multiples facettes
La jeune femme collectionne les certifications : sophrologue, formateur en ludopédagogie, approche systémique appliquée au coaching d’entreprise, certification au management 3.0, neurosciences en formation, certification à la méthode DISC/Forces Motrices, certification en intelligence émotionnelle… et la liste n’est pas exhaustive. « Le milieu du coaching est assez controversé. Certains prétendent que c’est une machine à fric : une fois que vous êtes dedans, il faut se former perpétuellement… Pour ma part, acquérir de nouvelles techniques est essentiel car mes missions demandent un large panel de compétences. » En parallèle de son activité, Merry Strullu suit elle-même entre 15 et 20 jours de formation dans l’année. « Ce qui est beaucoup, reconnaît-elle. Toutes ces formations complémentaires m’ont permis de professionnaliser ma démarche. »
De la sociologie au cabinet de coaching
C’est un événement difficile qui a poussée cette sociologue du travail, alors directrice de projets IT au sein du groupe informatique SPIE ICS, à passer, plus vite que prévu, le cap de l’entrepreneuriat. « Après un séjour à l’hôpital, j’ai eu envie de travailler différemment. J’avais un poste à responsabilité où il s’agissait de faire naître les projets ou de gérer des situations de crise. J’ai alors voulu œuvrer non plus seulement pour une seule entreprise mais pour plusieurs organisations. » Et de poursuivre :
Tout se joue dans la compréhension des mécanismes et des dynamiques du client, de son système qu’il a mis en place, de son identité et de ses prises de décisions. Ce sont ces repères sociologiques qui m’aident aujourd’hui dans ma pratique. »
Depuis ce virage effectué il y a cinq ans, la professionnelle a accompagné plus de 3 800 dirigeants, responsables RH, et managers en Occitanie et au-delà, dans le secteur public comme privé. Les problématiques récurrentes portent notamment sur la structuration d’une communauté managériale ou d’un projet de service et nécessitent un accompagnement de longue durée. « On peut citer l’exemple d’une grosse structure qui déploie des chefs de service. Pour atteindre la performance, ce n’est pas uniquement des objectifs que ces derniers doivent fixer à leurs équipes, mais un vrai projet pour ce service. »
Il peut s’agir aussi d’un accompagnement dans la stratégie RH car, ajoute-t-elle, « les problèmes de recrutement, de fidélisation, de parcours d’intégration sont fréquents. Les dirigeants sont soucieux du turnover parce qu’ils perdent du temps à organiser leur structure mais pour moi, il s’agit bien d’une question de viabilité », affirme-t-elle. Du côté des formations courtes, les demandes affluent sur des outils pour mieux communiquer et se connaitre, la gestion du stress, la charge mentale, la prise de poste de directeur ou encore de la prise de parole en public, un atelier phare !
Synergie collective
Quid de l’intelligence collective, cette forme d’intelligence dans laquelle chaque collaborateur contribue à une synergie collective permettant de gagner en efficacité et en productivité ? « Ce besoin est de plus en plus marqué entre les services et entre les managers, que ce soit au sein des services de l’État comme des collectivités territoriales », rappelle celle qui a récemment remporté un appel à projet en vue de la modernisation de l’organisation d’un de ces services.
Depuis la crise de la Covid, les besoins d’accompagnement se font davantage sentir au sein des entreprises. Un rapport récent a révélé qu’en France, sur un échantillon de 30 000 personnes, un employé sur trois s’est fait coaché. Un chiffre qui interpelle. Alors le coaching est-il de la poudre aux yeux ou un vrai levier vers la réussite ? À cette interrogation, la professionnelle répond : « Au-delà d’une bonne méthodologie, il faut vraiment travailler sur les situations concrètes du quotidien professionnel, ce qui conduit aussi à une réflexion personnelle. » La question est plutôt de savoir de quelle manière on définit le coaching. Et d’expliquer :
Pour moi, il s’agit de questionnement, de partage de bonnes pratiques, et de méthode. Ce qui ne fonctionne pas, c’est lorsque le coaching manque de concret et de continuité. Après avoir posé des bases, il faut réfléchir aux prochaines étapes, ce qui demande aussi du pilotage ».
Bourreau de travail
Alors que ses grands-parents paternels sont tous deux enseignants, Merry Strullu rêve un temps d’exercer ce « métier noble ». Mais la jeune fille que ses parents incitent à travailler toujours plus, l’imprégnant de valeurs fortes, a opté pour un BTS communication. Elle enchaînera par un master en management de l’action publique et des entreprises, sociologie des organisations, dont elle sortira majore de promo. Avec sur sa table de chevet, l’ouvrage de Michel Crozier L’acteur et le système. « Je me revois dire à la mère de mon conjoint, à mes risques et périls : "je continue la sociologie". Je n’avais pas envie de faire de la recherche pour travailler sur des concepts mais d’aller au-delà de l’analyse, d’aller vers l’opérationnel ».
Active dans de nombreux réseaux locaux, la coach est aussi la co-organisatrice d’un événement à succès, le Serious Game Toulouse dont la 2e édition aura lieu le 4 juillet. Entre 150 et 200 participants sont attendus à l’école d’ingénieurs INP Purpan lors de cette journée dédiée à la ludopédagogie. En parallèle, à ses heures perdues, celle qui se définit comme « un bourreau de travail », s’est lancée dans la rédaction d’un livre qu’elle espère achever cet hiver. « J’évoque mon métier, avec des études de cas, en expliquant de quelle manière j’analyse les situations en tant que formatrice, en tant que coach facilitatrice et en tant que sociologue ».
Et de pointer la nécessité de : « réfléchir sur la manière dont une organisation peut se repenser, pour qu’elle soit plus économe dans son fonctionnement, moins dispersée. » Car constate-t-elle, « souvent, on ne sait plus qui fait quoi, ça crie dans les couloirs, ça claque la porte des réunions et je vois des gens qui pleurent. » Une situation qui la questionne. « Je prône depuis plus de 10 ans la qualité de vie au travail, et globalement, il y a une évolution marquée dans ce sens. Pour autant, on assiste à plus de démissions et de désengagement, ce qui est contradictoire. Cela donne matière à réflexion. »