Thomas Ensenat
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Thomas Ensenat

Le fond et la forme.

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Thomas Ensenat
Thomas Ensenat (Crédit : DR)

La pandémie de Covid 19 a mis à mal de nombreux acteurs du marché des salles de sport, déjà impacté par le développement ultrarapide des réseaux low cost. Plusieurs centaines ont ainsi mis la clé sous la porte depuis deux ans. « Ça fait beaucoup », pointe Thomas Ensenat, à la tête de l’enseigne Ensenat Coaching. Le trentenaire a fondé son réseau en 2016 et fait le pari du haut de gamme en optant, dès l’origine, pour le coaching sportif individuel et plus récemment pour le team training et le coaching en entreprise.

Un choix porteur puisqu’il compte aujourd’hui trois salles : à Balma, Montaudran (en franchise) et Toulouse. Cette dernière a ouvert début janvier, rue Urbain Vitry, à deux pas du Capitole. Une seconde franchise ouvrira au printemps à Biarritz, avec à sa tête un des coachs de l’équipe de Thomas Ensenat qui en compte aujourd’hui une vingtaine. Une ascension rapide qui doit beaucoup justement à ses équipiers de la première heure, dont Margot Baqué, devenue sa femme, et Anthony Palazon, rencontré chez Movida. Diplômée d’un master en communication et d’un diplôme d’éducateur sportif, Margot Baqué est son « bras droit depuis la création de la boîte », et Anthony Palazon est aujourd’hui le manager de la salle de Montaudran.

Une histoire d’amitié et qu’une histoire familiale

Thomas Ensenat a aussi embarqué sa mère dans l’aventure. Comme beaucoup de petits Occitans, Thomas Ensenat a grandi avec un ballon oval entre les mains. Celui qui se décrit comme « le premier supporter du Stade Toulousain » a été détecté tôt par le Castres Olympique alors qu’il jouait au rugby à Balma. Après une année de lycée dans le Tarn en section sport étude, il s’est tourné vers l’emblématique club de la Ville rose.

« J’étais très encadré au Castres Olympique et j’avais besoin de ce cadre pour garder la motivation et la rigueur d’un entraînement de haut niveau, se souvient-il. Le Stade Toulousain a un fonctionnement très différent : il faut être beaucoup plus autonome, l’encadrement est beaucoup moins paternaliste. Le centre de formation est aussi beaucoup plus axé sur la compétition, ce qui en fait l’un des meilleurs d’Europe, mais ça ne correspondait pas à mon caractère. Cela n’a donc pas du tout fonctionné ! J’ai rapidement compris que je ne toucherais pas le rêve de gosse que j’avais d’être joueur professionnel de rugby. »

Fin du rêve. Thomas Ensenat trouve cependant le moyen de rebondir. « Un sportif de haut niveau émerge réellement lorsqu’il a un cadre autour de lui et une méthodologie à respecter, comme aller tous les jours à l’entraînement, c’est cette régularité qui amène du résultat. Lorsque je suis sorti de ce milieu, je me suis rapidement dit que je pouvais proposer ce type de prestation, à savoir un suivi de sportif de haut niveau, à monsieur et madame tout-le-monde. »

Armé de son Brevet professionnel de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport (BPJEPS), Thomas Ensenat travaille deux ans chez Movida, puis, à 22 ans, décide de se lancer comme autoentrepreneur. Grâce au crédit à la consommation de 3 000 € qu’une banque lui octroie généreusement, il ouvre un premier studio de 40m2 à Balma et débute son activité de coach sportif individuel. « J’ai tout de suite mis en avant une méthodologie afin de créer un cadre pour que l’adhérent mesure ses résultats et vienne régulièrement », détaille Thomas Ensenat.

Le Toulousain s’appuie d’abord sur son réseau, coache les parents de ses amis, puis leurs amis… Au bout de huit mois, tous ses créneaux sont sur liste d’attente. Le coach décide de passer à la vitesse supérieure, crée « une vraie entreprise » et loue un local plus grand. Appuyé par un prévisionnel plus sérieux, la banque accepte enfin de lui prêter de l’argent.

« Avec le recul, c’est vraiment la passion qui a permis au jeune de 22 ans sans expérience que j’étais, d’avancer. Ces douze premiers mois m’ont permis de devenir un vrai entrepreneur, m’ont appris à gérer de l’argent, à aller chercher ma clientèle puis à recruter puisqu’en septembre 2017, j’ouvrais le nouveau local à Balma avec trois studios de coaching et deux nouveaux coachs dont l’un, Anthony Palazon, est notre premier franchisé à Montaudran. »

S’en suit une rapide ascension puisque tous les trimestres, Thomas Ensenat recrute un nouveau coach. « On a très vite développé le chiffre d’affaires mais plus que ça, nous avons développé une clientèle fidèle avec près de 90% de réinscription. »

L’HUMAIN AU CŒUR

Une réussite qu’il fait reposer sur trois fondamentaux. En premier lieu, cette fameuse méthodologie. « Je n’ai rien inventé. En revanche j’ai réellement structuré une façon de travailler, de telle manière que les gens puissent quantifier leurs résultats. » Une méthodologie qui vaut aussi bien pour les adhérents que pour les coachs.

« Ils commencent tous au grade junior puis passent aux grades advance puis major. Pour cela, ils suivent des formations en interne, puisque nous sommes également un organisme de formation Qualiopi. Ces formations, élaborées avec des kinésithérapeutes et des ostéopathes, leur permettent d’être plus performants dans le coaching. Une fois major, au bout de trois ans minimum, ils peuvent jouer des rôles beaucoup plus importants, soit en devenant par exemple manager d’un club, soit en créant une franchise. Cela donne aux coachs un cap, les encourage à être toujours plus performants, à acquérir de nouvelles connaissances, ou tout simplement à développer leurs compétences personnelles, car s’ils décident de quitter la société, au terme de ces trois ans, ils auront gagné en compétence et acquis une belle expérience pour continuer à travailler de leur côté. » Des perspectives, c’est ce que le jeune dirigeant veut offrir à son équipe.

« Nous pallions cette problématique des coachs sportifs qui, à 35 ans, en ont marre de faire du sport toute la journée, et quittent ce métier pour devenir agent immobilier ou agent d’assurances. Ce que je propose à mes coachs, c’est un avenir : ce sont des autoentrepreneurs qui ont leur propre clientèle. Je les pousse à devenir des chefs d’entreprise, je les y entraîne, je leur montre mes techniques de vente, la façon d’aborder le client, etc. » Le second pilier sur lequel s’appuie Thomas Ensenat, c’est l’environnement.

« Je voulais vraiment créer un cadre qui ne ressemble pas une salle de sport, mais soit un lieu de vie autour du bien-être. »

« L’idée est de donner le sentiment d’être comme à la maison, avec des amis, de pouvoir s’asseoir sur des canapés chaleureux, dans des petits coins cosy. Beaucoup de nos adhérents viennent par exemple y faire leurs rendezvous professionnels, puis effectuent une séance de sport et enfin déjeunent sur place grâce à notre offre de restauration diététique et nos frigos connectés, avant de repartir au boulot après s’être douchés ! Plutôt que d’aller dans un restaurant classique manger un steak frites, nous offrons ce côté bien-être hygiène de vie, dans l’air du temps. »

Venu du rugby, Thomas Ensenat s’inspire quotidiennement de cet état d’esprit pour avancer. « J’ai vraiment voulu remettre l’humain au coeur de la démarche, autant côté adhérent que côté coach. Nous avons en effet une relation privilégiée avec nos adhérents : on est vraiment là pour prendre soin d’eux, les écouter. Certains ne viennent pas seulement faire du sport mais aussi parler de leurs problèmes, sans objectif très précis. Je connais 100 % de nos adhérents, je reçois 100 % d’entre eux. Il y a une vraie relation de proximité, ce ne sont pas des numéros. » Fier d’avoir structuré une entreprise avec un concept et une belle image de marque, Thomas Ensenat espère l’amener loin et notamment développer la franchise dans le grand sud de la France, à Marseille, Bordeaux, Montpellier, La Rochelle, et devenir « une marque de référence tout en gardant ce côté humain ».

En parallèle, le dirigeant entend développer le sport en entreprise. « L’idée m’est venue à la suite de la pandémie de Covid. Depuis, beaucoup d’entreprises se retrouvent avec des bureaux inutilisés. Je leur propose d’installer à mes frais dans ces espaces un studio de coaching et en échange elles me garantissent un nombre d’heures. Cela répond à un vrai besoin. » Deux entreprises, Brico Privé et la clinique Croix du Sud, ont déjà été séduites par la formule.

« On y a installé un studio de 50m2 ouvert depuis novembre aux salariés et aux infirmières. Dans ce dernier cas, c’est une cause qui me tenait particulièrement à coeur car je connais bien le milieu médical et je sais à quel point le métier d’infirmière est difficile », précise le manager qui met aussi un point d’honneur à ouvrir ses studios aux personnes en situation de handicap, à celles qui ont vaincu le cancer ou encore aux femmes enceintes, « avec des résultats incroyables », s’enthousiasme-t-il.

Thomas Ensenat, qui continue de coacher les personnes de renom, comme Michel Sarran, et certains adhérents qu’il suit depuis des années et qu’il ne veut pas lâcher, l’assure : « tous les matins je viens travailler avec plaisir. J’aime ce que je fais et ça, ça n’a pas de prix. »