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Quel avenir pour Scopelec ?

Télécommunications. Le tribunal de commerce de Lyon doit se pencher sur le sort de la Scop régionale Scopelec le 8 décembre.

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Quel avenir pour Scopelec ?
Le sort de Scopelec devrait se jouer le 8 décembre à Lyon. (Crédit : DR)

Le tribunal de commerce de Lyon devrait statuer le 8 décembre prochain sur l’avenir de Scopelec, entreprise spécialisée dans la construction et la maintenance d’infrastructures de télécommunication, notamment de réseaux de fibre optique. L’entreprise, dont le siège social est à Sorèze dans le Tarn, fortement implantée en Haute-Garonne et en Tarn-et-Garonne, et sa filiale Setelen ont bénéficié d’une procédure de sauvegarde en avril dernier avant d’être placées en redressement judiciaire en septembre. Depuis, plusieurs repreneurs se sont manifestés pour reprendre une partie de l’activité qu’exerçait sur le territoire national la société coopérative et participative (Scop) régionale.

Considéré comme l’une des plus grosses Scop de l’Hexagone, le groupe qui réunit 13 entités au total, employait près de 3 800 salariés et réalisait 475 M€ de chiffre d’affaires, avant de perdre l’an dernier, à l’issue d’un nouvel appel d’offres, d’importants contrats auprès d’Orange, son principal client, l’opérateur représentant 75 % de son chiffre d’affaires. Après une première vague de départs volontaires et un PSE, ce sont plus de 1900 emplois qui sont aujourd’hui menacés. Parmi les offres que doivent examiner les juges consulaires, figure celle constituée par les salariés du groupe et son nouveau président du directoire, Carlos Verkaeren, avec l’appui de l’Union régionale des Scop (Urscop). Carlos Verkaeren est arrivé à la tête de Scopelec le 1er septembre dernier. Le dirigeant a été durant 15 ans, de 2011 à 2016, le PDG du groupe Poult à Montauban.

1457 EMPLOIS CONSERVÉS

Le projet, porté par Carlos Verkaeren et soutenu par l’Urscop, prévoit de conserver 1457 emplois compte tenu du périmètre des activités reprises, quand les offres concurrentes prévoient de maintenir entre 70 et 550 emplois. « L’idée est de maintenir une certaine taille critique pour disposer d’une offre globale sur le territoire », détaille Cyrille Rocher, directeur de l’Urscop Occitanie Pyrénées. Il a derrière lui une longue expérience d’accompagnement de reprises d’entreprises par leurs salariés et s’est beaucoup impliqué dans le projet.


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« C’est indispensable pour rester sous-traitant de rang 1 vis-à-vis d’Orange, poursuit-il, puisque dans un premier temps, on reprend les contrats qu’a Scopelec avec l’opérateur, contrats qui arrivent bientôt à leur terme. L’entreprise sera encore dépendante d’Orange à hauteur d’un peu moins de 50% la première année, puis 30% et enfin 20% les années suivantes. Notre ambition est de construire un business plan dans lequel la dépendance client ne dépasse jamais 20%. C’est une règle de bonne conduite en affaires. » Pour bâtir le projet, des échanges ont été noués avec le groupe Orange, « des relations constructives », assure Cyrille Rocher.

SALARIÉS SOCIÉTAIRES

« Le chiffre d’affaires prévisionnel frôle 200 M€ en 2024 pour se stabiliser autour de 220 M€ dans les années qui suivent », ajoute-t-il, l’idée étant, tout en « reprenant toutes les activités rentables ainsi que l’activité historique d’Orange », « d’aller chercher des marchés nouveaux ». Pour financer le projet de reprise, l’Urscop Occitanie a mobilisé tout son réseau. « Nous avons trouvé une ingénierie économique avec le réseau Initiative France dont les différentes coordinations dans les territoires ont pour vocation de financer des prêts d’honneur. En parallèle, nous sommes en train de faire un sondage auprès de l’ensemble des salariés pour savoir, s’ils sont repris, quel montant ils pourraient investir et s’ils ont besoin, pour ce faire, d’un prêt d’honneur. Car s’agissant d’une coopérative, 51 % du capital doit être détenu par les salariés. Ils sont donc en train de réfléchir à la somme d’argent qu’ils pourront mettre dans l’entreprise, sachant que beaucoup d’entre eux, qui avaient déjà investi dans la précédente société, ont perdu l’intégralité de leur épargne… »

Plusieurs planchers de participation ont été proposés : 1000 € pour les salariés noncadres, 3000 € pour les cadres et 6000€ pour les cadres supérieurs. On devrait connaître dans les prochains jours la réponse des salariés. Aux côtés de ces derniers, « le monde coopératif devrait intervenir en quasi-fonds propres à hauteur d’1 M€, précise Cyrille Rocher. J’ai également lancé une souscription de type participative en quasi-fonds propres pour collecter 1 M€, ce qui devrait porter l’ensemble des fonds propres et quasi-fonds propres à 3,5 ou 4 M€. »

BESOIN DE CRÉDITS COURT TERME

Pour réamorcer la pompe et relancer l’activité, le directeur de l’Urscop Occitanie Pyrénées évalue par ailleurs à 10 M€ le besoin de crédits court terme. « Cependant, lorsque vous vous présentez à la barre du tribunal pour reprendre une entreprise, vous n’êtes pas dans la meilleure des positions pour obtenir le soutien d’une banque. De fait, il n’y a pas grand monde… Ce qui signifie que nous nous sommes tournés vers les services de la Région, sa présidente, Carole Delga, ayant dès le début, soutenu ce dossier. Nous avons ainsi un fort soutien de l’administration économique de la Région : ce sont eux qui, techniquement, nous apporteront une solution. Sachant que dans l’idéal, il faudrait que la collectivité nous trouve une solution de court terme pour 4 M€ de manière à rassurer le tribunal. Ce dernier vérifie en premier lieu que le projet économique fonctionne, et si c’est le cas, s’il est financé correctement, et ensuite seulement il regarde l’emploi. Sur ce dernier point, nous avons une offre correcte, par rapport aux autres repreneurs. C’est donc ce volet financier de court terme que nous sommes en train de finaliser. »

Six offres concurrentes ont été déposées sur le bureau du tribunal de commerce de Lyon, avec des périmètres très différents. Cyrille Rocher est cependant confiant. « Notre business plan est plutôt solide, avec des salariés qui seront associés et une dimension aménagement du territoire qui n’est pas négligeable. La difficulté est de trouver des financements extérieurs, sa chant que nous ne pouvons pas offrir de caution. Il n’y a pas de banque capable, de soutenir naturellement un projet de cette taille, surtout si c’est pour accompagner un ensemble de salariés qui vont devenir sociétaires de leur entreprise… »