Collectivités

Repenser la place de l’eau dans l’aménagement du territoire

Urbanisme. Sylvain Boucher, président du pôle Aqua-Valley, il faut « passer à la logique d’hydro-quartier, comme nous avons su développer les éco-quartiers, pour intégrer l’exigence de sobriété et d’efficacité dans le cycle de l’eau. »

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Pluie
(Crédit : Pixabay)

Organisés par Aqua-Valley, le pôle de compétitivité qui fédère un réseau de 230 adhérents (entreprises, organismes de recherche et de formation, associations) principalement localisés en région Occitanie et Sud Paca, au palais des congrès de la Grande Motte, dans l’Hérault, en décembre, les Aqua Business Days ont réuni près de 200 représentants des acteurs institutionnels, collectivités et entreprises de la filière eau, sur le thème de l’eau dans la planification et l’aménagement de la ville et des territoires.

L’occasion de réfléchir et d’imaginer des actions locales pour gérer les ressources aquifères au plus près des besoins et des spécificités locales. Les conférences, ateliers techniques et rendez-vous d’affaires qui ont rythmé ces Aqua Business Days ont favorisé les échanges entre des acteurs majeurs de la filière eau et de l’aménagement du territoire qui n’ont pas forcément l’habitude de se rencontrer.

Représentants des agences de bassin, des assurances et du monde des aménageurs ont ainsi pu jeter les bases d’un dialogue et initier une réflexion autour des démarches communes à entreprendre pour préserver les ressources en eau et optimiser leur réutilisation dans un contexte de changement climatique.

RÉUTILISATION DES RESSOURCES

Les outils technologiques existent. Encore faut-il réunir les gestionnaires des ressources et les décisionnaires de l’aménagement dès l’amont des phases d’étude des projets afin de changer la manière de planifier les villes, de bâtir des schémas durables et de construire le plan local d’urbanisme en prenant en compte la quantité d’eau et les capacités d’épuration du territoire.

Les progrès réalisés dans le traitement des agents pathogènes, l’analyse de l’eau et la traçabilité permettent dorénavant d’envisager de réutiliser l’eau à grande échelle. De nombreuses expérimentations sont menées depuis une quinzaine d’années et attestent de l’efficacité et de la sûreté de ces solutions, d’ores et déjà largement mises en oeuvre en Italie et en Espagne. En France, les aérogares 1, 2 et 3 d’Orly économisent 200000m³ d’eau par an en récupérant et traitant l’eau de pluie des pistes.


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À Grenoble, Bouygues a, pour sa part, imaginé un bâtiment capable de recycler l’eau de pluie et l’eau utilisée par les locataires pour s’en servir ensuite à l’arrosage, au nettoyage ou encore à l’alimentation des chasses d’eau. Avec à la clé une réduction de 60 % de son cycle d’eau.

À Montpellier, l’irrigation des vignes avec l’eau de station d’épuration a débuté il y a 12 ans avec un constat étonnant : cette eau est de meilleure qualité pour la vigne que l’eau du ruisseau voisin. D’autres tests fleurissent un peu partout, comme à la Grande Motte où l’eau de la station d’épuration sert à l’arrosage du golf durant la période estivale, ou encore à Toulouse où le lavage des voiries et des trams fait appel en partie à des eaux recyclées.

IMPLIQUER TOUS LES ACTEURS ET LA POPULATION LOCALE

Alors que la phase préparatoire du 12e programme d’intervention des Agences de l’eau(2025-2030) s’apprête à démarrer, les acteurs réunis lors des Aqua Business Days se sont entendus sur la nécessité que l’ensemble des décideurs aient une connaissance claire des solutions disponibles et des expérimentations menées avec succès. Il faut aussi que les autorités de contrôle osent délivrer des autorisations d’expérimenter à l’échelle du territoire pour favoriser l’innovation et le changement des pratiques.

Car si certaines orientations doivent être décidées au niveau national, des solutions peuvent être développées à l’échelle d’une ville, d’un quartier ou d’un immeuble. En créant, par exemple, des espaces verts, des jardins de pluie ou des fossés végétalisés pour limiter le ruissellement et retenir l’eau. Atteindre ces objectifs suppose une concertation étroite entre les acteurs, gestionnaires de l’eau et pouvoirs publics. Il faut aussi associer la population à la réflexion et obtenir l’adhésion des consommateurs au plan de diminution de la consommation.