Prolongement de Téléo : la collectivité a-t-elle encore les moyens de ses ambitions ?
Mobilité. Le 14 mai 2025, le téléphérique urbain de Toulouse fêtera ses trois ans de mise en service. 82 M€ ont été investis dans ce moyen de transport peu usité entraînant avec lui beaucoup d’attente et d’espoir de la part des Toulousains en termes de confort, de rapidité et de désengorgement du sud de la ville. Un projet de prolongement de la ligne a même été envisagé mais celui-ci semble aujourd’hui s’éloigner.
Alors que les plus hauts sommets des Pyrénées ont revêtu depuis déjà plusieurs semaines leur manteau blanc, le toulousain Altiservice - qui gère les stations de Saint-Lary et Font-Romeu Pyrénées 2000 - a tenu le 14 novembre dernier son traditionnel point presse pour marquer le lancement de la saison 2024-2025.
L’occasion de faire un pas de côté et d’évoquer une autre de ses activités : la gestion, la maintenance et l’exploitation de Téléo pour le compte de Tisséo. Et ce, alors que le téléphérique urbain de Toulouse fêtera le 14 mai prochain sa troisième année de mise en service. L’objectif initial de désengorger les sorties sud de la ville en reliant l’université Paul Sabatier, le CHU de Rangueil et l’Oncopole, trois sites universitaire, scientifique et médical à forte attractivité et donc à forte fréquentation est-il rempli ? Plus largement, les Toulousains se sont-ils appropriés ce nouveau mode de transport qui aura nécessité plus de deux ans et demi de travaux et coûté 82 M€ ?
Téléo tient-il toutes ses promesses ?
Avec en 2024 plus de 6 000 voyageurs transportés chaque jour, l’objectif des 8 000 passagers n’est pas encore atteint mais cela ne saurait tarder si l’on en croit Frédéric Raufast, le directeur du téléphérique urbain de Toulouse Téléo et Jean-Michel Lattes, le président de Tisséo Ingénierie.
« C’est toujours important de rappeler que le projet Téléo, ce n’est pas seulement le téléphérique. Il s’est toujours inscrit dans un projet de mobilité plus large avec la création de deux lignes express en correspondance avec les deux terminus. Côté Oncopole, c’est fait avec la ligne 25 qui va jusqu’à Colomiers. Côté Paul Sabatier, Tisséo lancera le nouveau Linéo 7 en septembre 2025 », annonce celui qui est aussi président de Tisséo Collectivités, l’autorité organisatrice des mobilités de la grande agglomération toulousaine qui a investi 9,1 M€ dans cette ligne de bus à haute fréquence.
Longue de 11,6 km et dotée de 31 arrêts, celle-ci reliera Saint-Orens Lycée à l’université Paul Sabatier, via Malepère, et devrait transporter à elle seule près de 7 000 voyageurs par jour. Sur l’enjeu de décongestionner le périphérique sud toulousain, Jean-Michel Lattes s’inscrit en faux et assure que l’objectif n’a jamais été celui-ci pour une simple et bonne raison : « L’idée de désengorger le périphérique grâce au téléphérique est impossible en raison du delta des flux. Le but était de rendre plus accessible un coin de Toulouse qui ne l’était pas. Il y a 30 ans, nous aurions créé un immense tunnel sous la colline de Pech David pour y parvenir. Le téléphérique nous a permis d’éviter cette hypothèse archéologique », explique l’élu qui se félicite de ce choix :
Le Téléo a parfaitement rempli son rôle. Il nous a en effet permis d’irriguer un campus et deux hôpitaux en créant des habitudes nouvelles de transport. La preuve, 18 000 personnes l’ont emprunté le 2 juin dernier à l’occasion de la course Red Bull caisses à savon. »
Vers une extension de la ligne ?
Tant est si bien qu’en 2023 Jean-Luc Moudenc, le maire de Toulouse et président de Toulouse Métropole, a réitéré son souhait de voir le tracé du téléphérique être prolongé vers Basso-Combo d’un côté et Montaudran de l’autre. Objectif pour la collectivité ? Offrir aux Toulousains « une desserte efficace grâce à un maillage très dense » via, à terme, une interconnexion entre les stations de téléphérique et les stations de métro : ligne A, B et bientôt C.
Mais voilà, alors que ce projet de plongement n’a même pas vraiment commencé, il semble déjà avoir du plomb dans l’aile. En effet, au-delà de sa pertinence, dont la question devra être débattue, c’est surtout sa faisabilité qui est aujourd’hui remise en cause à l’heure où les coûts liés à la construction de la ligne C du métro ont explosé, passant de 2,63 Mds€ en 2021 à plus de 3,1 Mds€, et que le gouvernement Barnier vient de réclamer 5 Mds€ d’économies aux collectivités locales.
« Le projet n’est pas abandonné », affirme pourtant Jean-Michel Lattes. D’autant plus, poursuit-il, que dans l’appel d’offres de création de Téléo, nous avions introduit l’obligation de prévoir la continuité de la ligne. Nous avons d’ailleurs pris à cet effet quelques précautions pour éviter que des immeubles ne soient construits sur ce futur tracé. Après, comme toute collectivité, nous hiérarchisons. Même si ce projet est possible, il n’est pas prioritaire. La priorité est donnée à la ligne C et à la réorganisation du réseau de bus. »
Et l’élu de conclure : « Nous sommes d’ailleurs en train de travailler sur ce que l’on appelle le “Projet mobilité du territoire” qui court jusqu’en 2040. Y figureront notamment les différentes hypothèses relatives au prolongement du téléphérique. Ce sera aux élus qui nous succéderont de budgétiser ce projet. »