Tri des déchets : l’Occitanie peut mieux faire
Environnement. Alors que l’Occitanie se classe au 10e rang des régions françaises en termes de collecte, Citeo, l’acteur français de la Responsabilité Élargie des Producteurs (REP) pour les papiers et les emballages ménagers, soutient plusieurs projets de modernisation des centres de tri et de développement du réemploi.
En 1992, la poubelle jaune faisait son apparition dans nos rues. Trois décennies plus tard, elle est toujours là, signe que les emballages n’ont malheureusement pas disparus de notre quotidien, ils se sont bien au contraire multipliés. Seul point positif, il n’est plus nécessaire d’être ingénieur en génie des matériaux pour savoir quoi placer à l’intérieur, puisque désormais tous les emballages et les papiers se trient. Depuis le 1er janvier en effet, la consigne de tri simplifiée s’est imposée partout en France. Une évolution qui constitue un enjeu majeur pour Citeo, l’acteur français de la REP, Responsabilité Elargie des Producteurs, pour les papiers et les emballages ménagers.
Créée il y a plus de 30 ans (sous le nom d’Eco-Emballages) par les entreprises du secteur de la grande consommation et de la distribution pour réduire l’impact environnemental de leurs emballages et papiers, Citeo les accompagne dans leur recherche de solutions d’éco-conception, de réemploi, de recyclage ou de valorisation.
Depuis sa création, ces entreprises ont investi plus de 13 Mds€ notamment pour installer et financer la collecte sélective et pour créer, avec leurs partenaires (collectivités locales, opérateurs) des filières de recyclage. Avec un résultat : 72 % des emballages ménagers et 62 % des papiers sont recyclés grâce au geste de tri des Français.
L’Occitanie au 10e rang
Dans le détail, Citeo vient de dévoiler les performances de tri des emballages ménagers et papiers en France pour l’année 2022. Selon ces données, les Français s’améliorent, mais de fortes disparités demeurent entre les régions.
Avec 73 kg d’emballages ménagers et de papiers triés chaque année par les habitants d’Occitanie, la Région se situe dans la moyenne nationale qui s’élève à 72 kg. Elle se classe cependant au 10e rang des régions de France, loin, très loin derrière la Bretagne, championne toutes catégories avec 106 kg d’emballages ménagers et papiers triés par habitant en 2022.
Toutefois, les performances de tri de la région Occitanie s’améliorent. « On progresse aussi bien au niveau national que local de 3 kg par habitant et par an. Nous sommes donc dans une dynamique de progrès à l’échelle de la région », détaille Antoine André, directeur régional de Citeo pour l’Occitanie et une partie de la Nouvelle-Aquitaine, en poste depuis mars 2023.
En région, parmi les bons élèves, l’Ariège se hisse en tête avec 83,5 kg d’emballages ménagers et de papiers triés l’an dernier par chaque habitant contre seulement 59 kg en Haute-Garonne, le département figurant en queue de classement.
Simplification du geste de tri
Ces importantes disparités s’expliquent notamment par des différences de mode de vie. « On trie deux fois moins bien en ville qu’à la campagne, reconnait le directeur régional. Car, forcément, les contraintes urbaines, liées à l’habitat dense, sont plus importantes. Et puis, c’est aussi lié à l’historique de mise en place du geste de tri, notamment la simplification du geste de tri. Certains l’ont mis en place depuis plus longtemps que d’autres. »
La consigne de tri simplifiée est entrée en vigueur dans toute l’Occitanie au 1er janvier 2023 mais certains départements ont un temps d’avance sur d’autres. La mise en place du tri simplifié a nécessité en effet une modernisation des centres de tri. Or, poursuit Antoine André, « chaque département l’a faite à son propre rythme ». Ainsi en Tarn-et-Garonne, la simplification du geste de tri est effective depuis 2016, alors que la majorité des habitants de la Haute-Garonne n’a basculé qu’au 1er janvier de cette année. Et Antoine André d’ajouter :
Cet enjeu de la simplification est réellement clé. Sur tous les territoires qui l’ont mise en œuvre, on constate une progression des tonnages significative. »
La mise en œuvre de cette nouvelle consigne a nécessité parfois la création de nouveaux centres : c’est le cas dans le Tarn où un nouveau centre de tri, qui permet de traiter 30 000 tonnes d’emballages ménagers par an contre 17 000 auparavant, a été inauguré cet été. Un autre, situé dans l’ouest de l’Hérault, doit l’être dans les tout prochains jours. Il aura lui aussi une capacité de 30 000 tonnes.
D’autres projets ont été lancés : à Masseube (Gers), où un centre de tri interdépartemental doit voir le jour. Il couvrira le Gers, les Hautes-Pyrénées et le sud de la Haute-Garonne, et à Bessières (Haute-Garonne). Ce dernier a vocation à remplacer deux sites actuels obsolètes à Toulouse et Bessières. Doté d’une capacité de 70 000 tonnes, ce centre, qui ouvrira ses portes en 2025, sera le plus grand de France.
Si depuis 30 ans, Citeo aide financièrement les collectivités à mettre en place les moyens de tri - le fameux bac jaune - ses actions pour réduire l’impact des emballages et des papiers ne se limite pas au recyclage. L’entreprise travaille en effet sur deux autres leviers.
Le premier est la réduction des emballages. Nous travaillons en effet avec les industriels à réduire l’impact environnemental de leurs emballages, ce qu’on appelle l’éco-conception. Le second levier est le réemploi des emballages. Dans ce cadre, nous travaillons à la création de boucles, souvent locales, de lavage et de réutilisation des emballages », détaille Antoine André.
Solutions de réemploi
En matière de réemploi, plusieurs initiatives ont émergé en Occitanie. En Tarn-et-Garonne, par exemple, Citeo a travaillé avec Ibbeo Cosmétiques, une entreprise montalbanaise, l’Ademe et la Région, sur le réemploi des emballages de ses produits. La PME, qui fabrique des cosmétiques bio, a mené une étude en vue de développer une technique qui permet de laver les contenants en verre consignés. L’implantation d’une unité de lavage industrielle est prévue début 2024 à Montauban. « Il faut maintenant réussir la montée en puissance », confirme Antoine André.
En Haute-Garonne aussi, des projets ont été soutenus par Citeo. C’est le cas du projet lancé à Toulouse en 2018 par l’association Emboite le plat qui vise à remplacer les tonnes de déchets d’emballages de la vente à emporter, généralement du plastique à usage unique, par des boîtes en verre consignées. La structure toulousaine a déployé son concept sur sept territoires en France et créé un réseau qui compte aujourd’hui 180 commerces.
« Nous avons financé le démarrage de ces projets, afin d’initier la démarche », précise Antoine André. À l’échelle nationale - Citeo, qui a soutenu sur tout le territoire des initiatives de ce genre -dispose d’un fonds de 50 M€ (pour l’année 2023, soit 350 M€ d’ici 2029) pour développer le réemploi des emballages ménagers via un appel à projet. Objectif ?
Faire en sorte que les industriels, qui mettent sur le marché des emballages, s’approprient le sujet et modifient leur chaine de production ou leurs process pour intégrer la possibilité d’utiliser des emballages réemployables. Et ainsi alimenter ces initiatives locales qui ont besoin de gisements pour fonctionner ».
Les lauréats seront connus en fin d’année.
Développer le tri hors domicile
L’autre enjeu majeur pour Citeo, c’est le tri hors foyer. « Il s’agit de systématiser le geste de tri. Or, selon un récent sondage, si neuf Français sur dix disent trier leurs emballages, seul un sur deux le fait systématiquement pour tous les emballages. Dans cette perspective, la simplification du geste de tri va beaucoup nous aider puisqu’elle est aujourd’hui mise en œuvre à l’échelle nationale. Cela signifie que la consigne vaut aussi bien pour le Toulousain que pour les touristes qui séjournent sur le territoire. »
En parallèle, Citeo mène une campagne de communication sur le thème "on ne lâche rien !" pour inciter les Français à maintenir ce geste de tri en toutes circonstances, à la maison mais également en dehors du domicile : dans la rue, dans les parcs et jardins, sur les plages, dans les stades, dans les transports. « Pour ce faire, on accompagne les collectivités dans la mise en place de dispositifs de tri, des corbeilles, des bacs, pour permettre aux citoyens de pratiquer le geste de tri partout. »
Cette généralisation du tri dans tout l’espace public doit aller vite puisque la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (Agec) le rend obligatoire à partir du 1er janvier 2025. « On a lancé plusieurs expérimentations en Occitanie. La Métropole de Toulouse a ainsi mis en place des corbeilles de tri sur la place Saint-Pierre ou sur l’esplanade de la gare Matabiau, des abris bacs dans le jardin des plantes ou à Compans Caffarelli. Idem pendant la Coupe du monde de rugby où des corbeilles ont été installées au Stadium. Le Grand Montauban a fait de même en installant avec JC Decaux une dizaine de points urbains de récupération. Ça fonctionne et puis, cela correspond aux attentes des usagers. Reste maintenant à déployer ces dispositifs de tri : pour ce faire, Citeo va accompagner financièrement les collectivités. »
La tarification incitative pour réduire les coûts
Dernier point de vigilance pour Citeo : la tarification incitative. « Cela signifie que la facture d’enlèvement des déchets est corrélée avec votre production de déchets. Or, majoritairement en France, cette facture est liée à la taxe foncière. Si vous habitez un château, vous paierez plus cher que si vous occupez un petit appartement, indépendamment de la quantité de déchets produits. La tarification incitative vise à associer une part variable à la production de déchets. »
Et ça fonctionne très bien. « C’est même un levier extrêmement puissant : cela sensibilise tous les habitants à la réduction des déchets de la poubelle noire, c’est-à-dire des ordures ménagères résiduelles, en mettant en œuvre des comportements vertueux comme le tri des emballages et des papiers et le compostage des biodéchets. Les collectivités qui l’ont mise en place observent rapidement un effet sur leurs performances environnementales avec une réduction des ordures ménagères et une augmentation du tri. »
En Occitanie, plusieurs collectivités l’ont institué comme les communautés de communes du Bassin Auterivain et de Cœur de Garonne ou encore le Grand Ouest Toulousain. Pionnier, le Sicoval l’a mis en place dès 2014. « En moyenne, on constate une augmentation de 30 % du volume des emballages triés et une réduction des ordures ménagères de 20 à 50 %. L’effet est drastique. »
Citeo prône donc fortement la mise en place de ce levier. Rien n’oblige aujourd’hui les collectivités à mettre en place la tarification incitative, « mais beaucoup sont en train de basculer pour pouvoir respecter leurs obligations réglementaires en termes de valorisation ou de recyclage ou tout simplement pour maîtriser leurs coûts. Les ordures ménagères résiduelles doivent en effet être amenées dans des centres d’enfouissement, telle la Drimm à Montech (82) ou dans des unités de valorisation énergétique telle la Setmi au Mirail à Toulouse ou Econotre à Bessières. Cela a un coût assez important, sans compter la taxe générale sur les activités polluantes prélevée par l’État, qui augmente d’année en année. Il y a donc un enjeu économique pour les collectivités dans la réduction des ordures ménagères. La tarification incitative apparait comme un levier très fort même si cela nécessite de mettre en œuvre une logistique et un suivi », conclut Antoine André.