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ARC prend de l’avance dans le recyclage de la fibre de carbone

Recyclage. La PME toulousaine vient de mettre en service une ligne de production à Castelsarrasin, en Tarn-et-Garonne.

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ARC prend de l'avance dans le recyclage de la fibre de carbone
L’unité de Castelsarrasin a nécessité un investissement de 3 M€. (Crédit : ARC)

Alpha Recyclage Composites (ARC), spécialiste du recyclage des matériaux composites carbone issus de l’aéronautique vient de franchir de nouveaux caps décisifs. Créée en 2009, la société toulousaine, dirigée par Laura Pech, est en effet en passe de réussir son pari industriel. C’est à Castelsarrasin, en Tarn-et-Garonne, qu’ARC a installé son tout nouveau pilote industriel, aujourd’hui dimensionné pour une capacité pouvant aller jusqu’à 450 tonnes de fibre de carbone recyclée par an. L’unité, qui a nécessité un investissement de 3 M€, reçoit notamment des chutes de production de l’aéronautique, issues de l’Airbus A350. Ces volumes sont traités par un réacteur qui met en oeuvre le procédé de vapothermolyse mis au point par ARC. Le site livre ainsi d’ores et déjà de premiers lots de 800 kg à ses clients.

DÉPÔT DE BREVET

Le procédé breveté par ARC est, de fait, capable de traiter non seulement les chutes de production, mais un large spectre de déchets composites, des pièces d’avions aux vélos de course, permettant d’offrir à la fibre recyclée une seconde vie dans des applications techniques à haute valeur ajoutée et à haute performance, pour des secteurs tels que l’automobile ou le nautisme.


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« Le gisement de matière première à recycler devient toujours plus important au fil des années, avec l’essor de la fibre de carbone dans les activités industrielles, indique Laura Pech. On estime que plusieurs centaines voire milliers de tonnes pourraient chaque année en France être valorisées, principalement issues de chutes de production et déchets en fin de vie. Pour autant, la majeure partie de ces déchets demeure aujourd’hui traitée par incinération ou enfouissement, car la législation n’impose pas – pour l’heure – de cadre qui obligerait à trier ou valoriser ces matières. Sans attendre une éventuelle contrainte réglementaire de type REP (responsabilité élargie du producteur), nous avons investi les dernières années afin d’être en mesure de fournir aujourd’hui des solutions pérennes et performantes, sur le plan environnemental et économique, pour donner une deuxième vie à la fibre de carbone avec nos partenaires industriels utilisateurs ».

DEUX NOUVEAUX PARTENARIATS

En 2022, Alpha Recyclage Composites a également signé deux nouveaux programmes de partenariat industriel, avec Multiplast et Plastic Omnium, soutenus par la Région Occitanie et Bpifrance. Après un premier projet mené de 2016 à 2020 avec la Direction générale de l’armement (DGA) pour la mise au point du procédé, ces travaux ont pour objectif le « prototypage matière pour les applications finales », soit le dernier stade avant une production à grande échelle de pièces en fibre de carbone recyclée pour les secteurs du nautisme et de l’automobile. Le programme développé avec Plastic Omnium vise à réaliser des produits recyclés en fibre courte destinés à des pièces automobiles telles que des pare-chocs. Le second programme initié avec Multiplast, vise à développer des fibres recyclées en non-tissés pour des moules de coques de bateaux.

À PLUS GRANDE ÉCHELLE

Ces travaux, en même temps que les projets menés avec une vingtaine d’autres clients, permettront également de définir le modèle économique de l’ensemble de la chaîne de valorisation, sachant qu’Alpha Recyclage Composites entend passer le dernier cap industriel à l’horizon de fin 2025. « Il importe, dans cette dernière étape, de sécuriser les débouchés pour créer véritablement le marché et la filière de la fibre de carbone recyclée, avec des livraisons régulières. C’est l’aboutissement du défi dans lequel nous sommes engagés depuis près de 10 ans. Nous préparons aussi aujourd’hui le passage à l’échelle supérieure, celui de la grande série. D’ici environ trois ans, nous serons prêts à basculer du management de l’innovation à l’exploitation », assure Laura Pech.

UN CHIFFRE D’AFFAIRES DE 10 M€

Alors qu’ARC ambitionne de réaliser plus de 10 M€ de chiffre d’affaires à l’horizon de quatre ans, la jeune pousse qui emploie quatre ingénieurs, veut porter son effectif à une trentaine de collaborateurs. Le gisement de déchets, aujourd’hui estimé à 2000 tonnes par an en France, devrait en effet croître dans les prochaines années. À l’horizon 2030, l’Occitanie devrait ainsi, à elle seule, générer chaque année 800 tonnes de matériau à exploiter, puis 1 500 tonnes annuelles d’ici 2050 selon l’agence Ad’Occ. « Notre ancrage à Toulouse et dans notre région a beaucoup de sens. C’est l’ADN de notre groupe familial, auquel s’ajoute un partenariat de longue date avec l’École des Mines d’Albi, et c’est aussi pleinement pertinent car nous travaillons avec les déchets de l’aéronautique. Nous avons tout, en Occitanie, pour mettre sur pied une filière nationale : les compétences, les acteurs, les ressources », conclut Laura Pech.